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Édition du 1er au 15 novembre 2024

L’accès en France aux documents
liés à la guerre d’Algérie
est toujours aussi difficile
selon l’historien Marc André

Dans une tribune au Monde, l’historien Marc André explique que les archives de la guerre d’Algérie en France sont trop souvent inaccessibles aux demandeurs. Emmanuel Macron s’était pourtant engagé en septembre 2018 à en faciliter la consultation. Une bataille a dû être livrée par des archivistes, des juristes et des historiens devant le Conseil d'Etat pour que les entraves mises en place par le SGDSN (Secrétariat général à la défense et la sécurité nationale) soient levées. A la décision remarquable rendue par le Conseil d'Etat a suivi un article de loi voté à la hâte au nom de la lutte antiterroriste. Ci-dessous l'enregistrement des débats du colloque qui s'est tenu au Sénat le 5 septembre 2022 sur le thème « Archives et démocratie : au-delà du Secret défense », ainsi que l'article publié par un archiviste algérien dans Le Quotidien d'Oran.

« L’accès aux documents liés à la guerre d’Algérie
reste toujours aussi difficile »

le_monde_logo.pngpar Marc André, publié par Le Monde le 14 novembre 2022.
Source


Marc André est historien, maître de conférences à l’université de Rouen-Normandie. II vient de publier Une prison pour mémoire. Montluc, de 1944 à nos jours (ENS éditions, 572 p., 24 €).



archivesalge_rie.jpg

Dans une tribune au Monde, l’historien Marc André explique que par méconnaissance de la guerre d’Algérie et de la nature de ses archives, ces dernières sont trop souvent inaccessibles aux demandeurs. Emmanuel Macron s’était pourtant engagé à en faciliter la consultation.

Huit mois après l’annonce de l’ouverture à tous « des archives publiques produites dans le cadre d’affaires relatives à des faits commis en relation avec la guerre d’Algérie » (décret du 22 décembre 2021), le président de la République, Emmanuel Macron, affirmait le 25 août la nécessité de donner aux historiens « un accès complet aux archives de la guerre d’Algérie ». Cette insistance témoigne de l’instrumentalisation politique de la question des archives. Car malgré l’intention réitérée d’« ouvrir », « simplifier » ou « faciliter » l’accès aux documents liés à cette guerre, en pratique cela reste difficile tant pour les familles que pour les historiens.

Entre les discours qui accompagnent l’action politique et les réalités du terrain, le décalage est tel que l’on se demande même si le décret dit de « dérogation générale » n’a pas été rédigé au croisement de deux méconnaissances : celle de la guerre d’Algérie et celle de ses archives. De multiples contradictions surgissent, à l’origine de pratiques administratives restrictives aux conséquences sociales, scientifiques et politiques contre-productives.

Citons le cas d’une fille de condamné à mort algérien qui décide il y a un mois de se rendre aux Archives nationales pour consulter le dossier d’enquête reconstituant le réseau de son père et celui de son recours en grâce, tous deux théoriquement accessibles. L’accès lui est refusé car ce père, jugé en 1960 à l’âge de 20 ans et 6 mois, était mineur (il avait moins de 21 ans) au moment des faits. La fille d’un autre condamné à mort s’est vu quant à elle refuser également en octobre l’accès aux archives non parce que son père était mineur au moment de son arrestation, mais parce que ses compagnons de lutte l’étaient. Certes, le décret prévoit que les documents relatifs aux mineurs demeurent soumis à un délai de communicabilité de cent ans (vingt-cinq ans en cas de décès), mais cela soulève plusieurs problèmes.

Gestion bureaucratique

En reprenant la majorité légale de l’époque, la méconnaissance historique redouble symboliquement la violence contre un « mineur » qui, comme bien d’autres de son âge, n’a pas été jugé par un tribunal pour enfants mais a comparu devant un tribunal militaire : suffisamment majeur à l’époque pour avoir la tête tranchée, il est aujourd’hui suffisamment mineur pour voir son dossier soustrait de la dérogation générale.

Cette gestion bureaucratique conduit à ignorer la réalité d’une guerre menée par des jeunes. Cela est vrai tant dans l’immigration algérienne en France que dans les maquis, les réseaux urbains et les prisons où les indépendantistes, leurs soutiens, les réfractaires, les appelés avaient pour nombre d’entre eux autour de 20 ans lors de leur engagement. Une distinction entre enfants (moins de 18 ans) et jeunes adultes (18 à 21 ans) éviterait qu’à rebours des discours politiques, un grand nombre de dossiers de police ou de justice restent soumis à examen et demande de dérogation individuelle.

Par ailleurs, alors que parmi les revendications des historiens sur l’ouverture souhaitée des archives, figurait la volonté de traiter de la même manière seconde guerre mondiale et guerre d’Algérie, on constate que la dérogation générale dans le premier cas, prise en 2015, n’a aucunement exclu de son périmètre les résistants et collaborateurs âgés de 18 à 21 ans, sans que cela ait posé de problème depuis.

Marges d’interprétation

Si l’on ajoute les autres alinéas du décret relatifs aux documents pouvant porter atteinte à la sécurité de personnes impliquées dans des activités de renseignement ou à l’intimité de la vie sexuelle des personnes, la majorité des dossiers se referme. Car, là aussi, la méconnaissance de la guerre d’Algérie et de ses archives est manifeste : la logique répressive étant fondée sur le renseignement, les enquêtes fourmillent d’indicateurs ou d’informateurs ; et la vie sexuelle est autant scrutée par les policiers ou experts psychiatres que les violences sexuelles constatées mais non reconnues au terme des procédures.

A la question de ces restrictions s’ajoute celle des marges d’interprétation. Entre l’esprit du décret, qui proclame l’ouverture des archives à tous, et son application à la lettre, qui tend vers la fermeture, le hiatus est tel qu’il peut conduire à des contradictions d’affichage et de catalogage problématiques : il a été possible pendant des mois de commander un carton entier contenant plusieurs dossiers d’enquêtes, quand la demande individuelle de l’un d’eux rendait son accès impossible. Ainsi, certains des dossiers qui étaient inaccessibles aux familles pouvaient pourtant être consultés par d’autres.

L’examen au cas par cas, ou par « extraits », selon le jargon, a une double conséquence. D’abord, il ralentit l’accès aux documents. Alors qu’avant le décret, une dérogation demandée à titre individuel sur l’ensemble d’un fonds permettait de consulter sereinement tous les dossiers, aujourd’hui, le manque de cohérence et de lisibilité conduit les chercheurs à découvrir au gré de leur recherche que tel ou tel dossier n’est pas communicable. Quant aux familles, elles ne savent pas à l’avance si elles auront accès au document souhaité. Ensuite, et surtout, l’application du décret est susceptible d’interprétations différentes selon les dépôts d’archives. L’incertitude prévaut.

Si un historien habitué des archives arrivera à avancer dans ce labyrinthe, il n’en est pas de même des citoyens ordinaires, premiers destinataires de ce décret. Et la question des personnes « intéressées » (descendants, etc.) reste posée, sans même parler de leur accompagnement face à des documents qui peuvent être troublants.

En l’état, la dérogation dite « générale » apparaît pour ce qu’elle est : une initiative politique rendant illisibles les conditions d’accès aux archives de la guerre d’Algérie et freinant, tout à la fois, le travail de la mémoire et celui de l’histoire.


Les débats du colloque au Sénat du 5 septembre 2022 sur le thème « Archives et démocratie : au-delà du Secret défense »






Le contentieux archivistique algéro-français… 60 ans après



titre_quotidien_d_oran.pngpar Lakhdar Amrani, publié par Le Quotidien d’Oran le 14 novembre 2022.
Source de cette deuxième partie

Lakhdar Amrani est archiviste, enseignant retraité de l’enseignement supérieur, enseignant contractuel – Université d’Oran Ahmed Ben Bella.

Deuxième partie

1.2.2 Un deuxième transfert en 1962 :

Celui-ci fut amorcé sous l’impulsion de la Délégation Générale en Algérie et sur indication du Conservateur des Archives Régionales d’Alger. En effet, suite à une note du 6 mars 19621, émanant de Maxime Roux, en sa qualité de Secrétaire Général de la Délégation Générale en Algérie, les transferts reprirent, de plus belle, en 1962. Conformément à l’esprit de cette note, 29 containers transportant une deuxième partie de la mémoire du peuple algérien, quittaient par bateau, le port d’Oran, les 11 et 14 mai 1962 et par la même occasion, trois autres envois à savoir, ceux du 9 mai, du 26 et 29 juin de la même année ont été programmés pour quitter Constantine, vers la France.

Au Total, pour les seuls Centre Régionaux d’Archives d’Oran et de Constantine, il y eut pas moins de sept transferts d’archives de l’Algérie vers la France, entre 1961 et 1962.

2. Quantité et contenu sommaires des transferts d’archives

2.1 La quantité approximative des archives transférées

Il faudrait avouer à ce propos que la quantité réelle des archives transférées est très difficile à cerner, faute d’indications tangibles. Le contentieux a connu une médiatisation telle, que les chiffres avancés par les uns et par les autres doivent être pris avec beaucoup de précautions, en attendant une étude sérieuse qui serait en mesure de fixer un chiffre exact sur la quantité des archives ayant été transférées entre 1961 et 1962, de l’Algérie vers la France. C’est ce qu’essaie de nous dire Fouad Soufi quand il note que: « Seule une étude serrée sur les fonds repérés avant leur transfert peut fournir une idée de la quantité des archives enlevées des dépôts publics. Or, si l’état des archives de Constantine a été retrouvé, si celui d’Oran peut être reconstitué, celui des Archives d’Alger est encore plus difficile à établir. »2. En effet, les chiffres avancés de part et d’autre, sont si disparates3. et l’unité de comptage, tellement variée (tantôt en tonnes, tantôt en sacs ou en kilomètres linéaires, ou en liasses) qu’il est très difficile de se retrouver.

Néanmoins, sans vouloir être exhaustif, il nous a paru utile voire, nécessaire de rapporter, les chiffres avancés par la partie algérienne représentée par feu Abdelkrim Badjadja4, Fouad Soufi5, tous deux, membres du premier comité mixte intergouvernemental sur les archives (1980-1981), Yves Pérotin (pour les Archives d’Alger, surtout) et Gérard Ermisse6 pour la partie française.

Voyons pour commencer ce que nous rapporte, à ce sujet Fouad Soufi7 :

Pour le Centre Régional d’Archives d’Oran :

– 43 tonnes ou 1.600 sacs (dont 899 liasses) ou 33 containers ont été transférées entre 1961 et 1962.

Pour le Centre Régional d’Archives de Constantine :

– 120 tonnes ou 21.566 liasses d’archives avaient quitté les dépôts du centre, entre 1961 et 1962, en direction de la France.

Pour le Centre Régional d’archives d’Alger :

Fouad Soufi ne donne aucun chiffre tandis que Yves Pérotin, lors son enquête sur la situation des archives publiques en Algérie, en 1964, au profit de l’UNESCO, avait noté dans son rapport que : « Il semble qu’avant l’indépendance, le dépôt comptait 8 Km de documents. Il semble, également que la masse des collections ait été amputée par le transfert (vers la France, ndlr), d’à peu près 50%. »8.

Feu Abdelkrim Badjadja en sa qualité de Directeur Général des Archives Nationales, rapporte pour sa part, dans la synthèse du contentieux archivistique algéro-français9, « qu’au total, 600 tonnes/20.000 ml d’archives ont été déplacées du territoire algérien, entre 1961et 1962 »10. D’ailleurs, ce chiffre a été repris tel qu’il est, par Léopold Auer, dans l’étude relative aux contentieux archivistiques, qu’il avait faite au profit de l’Unesco, en 199811.

Pour sa part, Gérard Ermisse réduit quelque peu, le chiffre avancé par la partie algérienne quand il affirme : « que le Centre des archives d’outre-mer (CAO) à Aix-en Provence12, conserve 7,5 kml à 7,8 kml d’archives dites de souveraineté, soit environ 10% de la masse des archives publiques qui existaient en Algérie en 1962, masse évaluée à 80 kml, sans garantie sur ce chiffre. Les documents… proviennent principalement du Gouvernement Général (800 ml), et des administrations départementales d’Alger (2000 ml), d’Oran (1500 ml), et de Constantine13 (1.000ml) »14.

Il résulte après la somme de ces chiffres que seuls 5.300 ml, soit 5,3 kml d’archives algériennes sont conservées au CAO et non, 7,5 kml à 7,8 kml comme l’a si bien précisé Gérard Ermisse.

Convenons-en, puisque nous n’avons pas tellement le choix mais, peut-on savoir dans ce cas, où sont passés les 2,5 kml d’archives qui représentent au strict minimum : la différence entre les « 7,5 Kml à 7,8 Kml » signalés et les « 5,3 kml » constituant la somme des fonds détaillés par provenance indiqués par ce dernier? Ou peut-être que ces fonds selon G. Ermisse n’ont pas une grande importance et qu’il vaudrait mieux les omettre parce que leur perte n’affecterait pas l’écriture de l’histoire de l’Algérie ?

Cela étant dit, on peut penser d’un autre côté, que les 2.500 ml dont il est question et qui ont été omis constituent la masse des archives conservées dans les magasins du CAO et qui n’ont pas été traitées depuis, pas moins de 43 ans au minimum, au vu de date de la publication de l’article de G. Ermisse, qui eut lieu en 2004. Mais, même dans ce cas, Gérard Ermisse en tant que praticien, aurait signalé cela !!!!!!

L’historien Benjamin Stora, en reprenant à son compte les thèses de la partie française en matière d’archives de gestion et de souveraineté avait parlé dans son rapport sur la réconciliation des mémoires…. de 10 kml « d’archives rapatriées à partir de 1961 en France et conservées aux archives nationales d’Outre-mer »15.

Essayons maintenant, sans parti pris, ni passion, de combiner entre les chiffres, rapportés par les uns et les autres, afin de nous rapprocher, plus ou moins, de la quantité des archives transférées :

1. Commençons d’abord par unifier notre unité de mesure.

– A ce propos, il est reconnu que 1 mètre linéaire = 50 kg d’archives, et par conséquent 1 tonne d’archives équivaudrait à 20 ml.

2. Passons maintenant à la conversion des données recueillies par Fouad Soufi/Abdelkrim Badjadja,Yves Pérotin et Gérard Ermisse :

– 43 tonnes d’archives x 20 = 860 ml (Oran).

– 120 tonnes d’archives x 20= 2.400 ml (Constantine).

– 4.000 ml divisé par 20 = 200 tonnes d’archives (Alger).

– 800 ml divisés par 20 = 40 tonnes d’archives (GGA).

– 640 ml divisés par 20 = 32 tonnes d’archives (représentant, selon notre déduction, les archives des départements de l’Ouest algérien et qui font la différence entre les 1500 ml affichés par Gérard Ermisse et les 860 ml cités par Fouad Soufi).

3. Faisons le total de ce que nous avons :

43 t. + 120 t. + 200 t. + 40 t. + 32 t. = 435 tonnes d’archives ou 8.700 mètres linéaires d’archives. Ne sont pas compris, dans ce chiffre, les archives qui ont été récupérés sur les Moudjahidines de l’ALN, les archives militaires conservées au château de Vincennes et les archives des banques (régies, toutes les 2 par un statut particulier).

Tout compte fait, il y a lieu de constater que selon notre propre estimation, nous ne sommes pas très loin du premier chiffre avancé par Gérard Ermisse et que Benjamin Stora, pour sa part avait parlé de 10 kml d’archives dans son rapport, en faisant allusion selon ses dires « archives rapatriées à partir de 1961 en France et conservées aux archives nationales d’Outre-mer »16.

**2.2 Exemples de fonds d’archives déplacées entre 1961 et 1962 :

2.2.1 Archives du troisième âge.

2.2.1.1 Archives du Gouvernement Général de l’Algérie17 :

Séries—-Intitulé du fonds—-Dates extrêmes

A—-Archives antérieures à 1835—-1686-1835

B—-Concessions d’Afrique—-1750-1828

C—-Archives espagnoles—-XVIIe s – XVIIIe s

G—-Personnel et administration générale—-1870-1956

H—-Affaires musulmanes et sahariennes—-1843-1959

I – J – K—-Affaires Arabes (Alger/Oran/Constantine)—-1843-1962

M—-Propriété indigène—-1863 – 1956

N—-Travaux publics—-1831 – 1882

S—-Instruction publique—-1897 – 1962

2.2.1.2 Archives locales (Préfectures, Sous-préfectures, Communes, etc.)

Séries—-Intitulé des fonds

E—-Elections

F—-Police et sécurité

H—-Agriculture, commerce, industrie

I—-Affaires musulmanes

M—-Colonisation

N—-Propriété indigène

2.2.2. Archives du 1er et du 2ème âge ou archives administrativesB18:

Ayant été ramassées entre 1961 et 1962, dans les bureaux du GGA, préfectures, sous-préfectures, communes mixtes, communes de plein exercice, etc., ce sont des archives de gestion courante des individus dans tous les secteurs de la vie quotidienne : administrative, économique, sociale, culturelle, technique, etc.

Comme il a été constaté à la lecture des bordereaux de transfert des archives (Archives départementales de Constantine) ou après reconstitution (Archives départementales d’Oran), ceux qui étaient chargés des opérations du transfert des archives entre 1961 et 1962 ne faisaient aucune distinction entre les différentes catégories d’archives.

Ils avaient ramassé tout ce qui leur tombait sous la main, à commencer par les archives antérieures à la colonisation et qui n’avaient aucun rapport avec la « souveraineté » de la France, jusqu’aux archives du premier âge qui étaient classées dans les armoires. Tout était enliassé et bon à être transféré. Et par conséquent, on peut supposer que les documents qui sont restés sur place, l’ont été, non pas, parce que les Français les ont laissés par bonne intention, mais parce qu’ils n’ont pas pu être déplacés soit faute de moyens logistiques, soit faute de temps.

Un simple regard sur la liste des documents transférés, qui est loin d’être exhaustive19 donne l’impression que l’Algérie est plus victime d’un « hold-up de son histoire » que d’un transfert de ses archives pour des raisons qu’on essaie vainement de justifier et auxquelles adhère volontiers l’historien B. Stora. On voit bien qu’aucun document n’est épargné, qu’il soit produit par l’administration française ou par une autre, pendant la colonisation française ou, bien avant elle.

3. Le contentieux vu par la partie algérienne :

3.1 La réaction algérienne face aux transferts massifs de leurs archives :

Les Algériens se sentant frustrés, spoliés, lésés, jusque dans leur patrimoine national et leur souveraineté, n’avaient d’autres choix que de se constituer « partie civile » contre une puissance qui n’a pas cessé de les exploiter depuis 1830. Dès 1962, ils mettent au point un système leur permettant de revendiquer, en toute légitimité, la restitution de leurs archives.

Cela est d’autant plus vrai que, feu A. Badjadja, membre du premier comité intergouvernemental sur les archives, affirme dans la synthèse du contentieux qu’il avait établi en 199520 que : « Depuis 1962, l’Algérie n’a à aucun moment cessé de réclamer la restitution des archives transférées. Dès 1967, nous avons demandé l’application des recommandations de la table Ronde Internationale des Archives (Varsovie 1961) ». Au lieu de cela, la France comme à son habitude fit la sourde oreille et se contenta pour calmer un tant soit peu le jeu, de restituer des lots de cartons d’archives contenant des registres et d’autres documents, revenant à la période ottomane (cf. section 6 : archives restituées).
(A suivre)

Troisième partie


Lire aussi


• Retour sur le contentieux archivistique entre l’Algérie et la France
par Fouad Soufi, publié dans Le Soir d’Algérie le 6 février 2014.
Source


La bataille des archives en France



En dépit des déclarations du président de la République, Emmanuel Macron, au moment de sa visite chez Josette Audin en septembre 2018 sur la nécessité d’ouvrir l’accès aux archives de la guerre d’Algérie, des fermetures ont été constatées à la fin de 2019, en particulier au Service historique de la Défense. Le Collectif Accès aux archives publiques s’est alors constitué et, en juillet 2021, a obtenu satisfaction auprès du Conseil d’Etat. D’autres textes ont été publiés depuis, mais force est de constater que des difficultés persistent.

Le site histoirecoloniale.net — qui a participé à la bataille menée de 2018 à 2021 pour la liberté d’accès aux archives, a contribué à l’ouvrage ci-dessous qui en rend compte et il a publié de nombreux articles sur ce sujet.


Le livre « Les disparus de la guerre d’Algérie » suivi de « La bataille des archives 2018-2021 » le 8 septembre 2021.
couverture-2-2.png
Ce lien donne accès à la table des matières de ce livre qui retrace la bataille menée de 2018 à 2021 et aussi à des informations sur sa commande possible sur le site de l’éditeur ou sur celui de la Ligue des droits de l’Homme.



Nos articles sur cette bataille des archives
depuis septembre 2019



Le débat sur l’accès aux archives de la guerre d’Algérie le 29 octobre 2019

Des historiens protestent contre la fermeture de l’accès aux archives coloniales le 13 février 2020

La mémoire historique classée secret-défense ? le 17 février 2020

Nouvelles recherches sur le massacre de Thiaroye commis par l’armée française au Sénégal en 1944 le 26 mars 2020

Les archives du président Mitterrand autour du génocide au Rwanda vont être accessibles aux chercheurs le 14 juin 2020

Un recours a été déposé au Conseil d’Etat pour demander l’ouverture des archives classées « secret-défense » le 25 septembre 2020

Divers articles, émissions de radio et un reportage d’Al Jazeera diffusé sur les réseaux sociaux après le dépôt du recours au Conseil d’Etat le 5 octobre 2020

La table ronde publiée par l’Humanité le 23 octobre 2020

Le gouvernement persiste à vouloir entraver, quitte à contredire les promesses du président, l’accès aux archives des guerres d’Indochine et d’Algérie le 29 novembre 2020

Le génocide des Tutsi au Rwanda. Des archives sur le rôle de la France dévoilées le 17 janvier 2021

A la suite d’un nouveau texte qui aggrave la fermeture en cours. Pour l’accès aux archives. Un nouveau recours déposé au Conseil d’Etat le 18 janvier 2021

Accès aux archives de la guerre d’Algérie, un communiqué de l’Elysée
ne donne pas satisfaction aux demandes d’un respect pur et simple de la loi
le 10 mars 2021

La bataille citoyenne pour l’accès aux archives a connu un succès au Conseil d’Etat et se poursuit au parlement le 16 juin 2021

Nouvelles prises de position sur le droit d’accès aux archives publiques le 25 juin 2021

L’accès aux archives publiques doit-il dépendre du bon vouloir de l’armée ou découle-t-il d’un droit des citoyens ? le 1er juillet 2021

Accès aux archives : une décision importante du Conseil d’Etat le 4 juillet 2021

Archives : la lourde responsabilité des députés français le 13 juillet 2021

Après la décision du Conseil constitutionnel du 30 juillet 2021, un débat est nécessaire sur l’accès des citoyens aux archives le 31 juillet 2021

Pour l’accès des citoyens aux archives publiques une rencontre-débat importante le 13 septembre 2021 le 10 septembre 2021

L’accès aux archives continue à être entravé. Les images de la rencontre « L’accès aux archives publiques, un enjeu citoyen » du 13 septembre 2021 le 16 novembre 2021

Archives de la guerre d’Algérie : il faudra surveiller de près l’ouverture partielle annoncée par un arrêté du gouvernement le 26 décembre 2021

L’accès toujours entravé aux archives de la guerre d’Algérie le 6 avril 2022

  1. Note n°05 34DGA/AG.2 du 06 mars 1962 citée par Badjadja A. Hachi O. et Soufi F. Synthèse du contentieux archivistique algéro-français. Op.cit p. 3.
  2. Fouad SOUFI. En Algérie : l’Etat et ses archives. Op. cit. p .170.
  3. C’est ainsi que de 20 tonnes sur 8 Kml signalées par Pierre Nora (7 novembre 1981), on passe aux 200 tonnes sur 7 Kml affirmés par Pierre Catherine (26 octobre 1981, et aux 400 tonnes sur 7 Kml affichés par Libération (30 octobre 1981) cité par Akbal MEHENNI. Problématique générale du contentieux algéro-français. Op.cit. p. 29
  4. En sa qualité de Directeur des Archives de la Wilaya de Constantine, de 1974 à 1990.
  5. En sa qualité de Directeur des Archives d’Oran de 1974 à 1993.
  6. En sa qualité de Chef de l’Inspection générale des Archives de France à partir de 2004.
  7. Fouad SOUFI. En Algérie : l’Etat et ses archives, Op. cit. p. 171
  8. Yves PEROTIN. Algérie, archives publiques. p.10.
  9. BADJADJA A. HACHI O. et SOUFI F. Synthèse du contentieux archivistique algéro-français. Op. cit. p.5.
  10. A signaler que ce chiffre devrait être revu à la baisse car, il n’est pas conforme aux règles reconnues en matière de stockage des archives. En effet, il est d’usage de compter 50 kg (approximativement) pour 1 ml et 20 ml pour 1 tonne d’archives. Et par conséquent, si on multiplie 20 par 600 t , ça donnerait 12000 ml et non, 20000 ml. En revanche, si on divise 20000 ml par 20 (équivalent aux 20 ml que contient approximativement une tonne de documents), le résultat sera 1000 tonnes et non 600 t.
  11. AUER Léopold. Les contentieux archivistiques. Analyse d’une enquête internationale Op.cit. p.3.
  12. Le Centre en question a été bâti spécialement en 1966 pour abriter les archives des anciennes colonies françaises.
  13. Abdelkrim Badjadja : affirme qu’« il s’agit de 2000 ml d’archives extraites des départements de Constantine, Batna, Annaba, et Sétif dont la moitié se trouvait encore en territoire algérien en Septembre 1962, soit 3 mois après l’indépendance de l’Algérie », in Abdelkrim BADJADJA. A propos du contentieux archivistique algéro-français. Clarifications et mises au point au sujet des vérités occultées, p. 22.
  14. ERMISSE Gérard, L’actualité des contentieux archivistiques. Archives et patrimoines, p.51.
  15. STORA Benjamin : Les questions mémorielles portant sur la colonisation et la guerre d’Algérie. Rapport remis à Emmanuel Macron. Janvier 2021.
  16. STORA Benjamin : Les questions mémorielles portant sur la colonisation et la guerre d’Algérie. Rapport remis à Emmanuel Macron. Janvier 2021.
  17. AKBAL Mehenni, Le contentieux archivistique algéro-français. Op. cit. p. 88-136.
  18. ADJADJA A., HACHI O. et SOUFI F. Synthèse du contentieux archivistique algéro-français. Op. cit. p.5.
  19. Pour plus de détails, voir : Akbal MEHENNI. Le contentieux archivistique algéro-français. Op. cit. p. 136-163.
  20. BADJADJA A. et HACHI O. Idem. p. 6.
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