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Édition du 15 novembre au 1er décembre 2024

Les Européens d’Algérie et leur exode

Albert Camus et l’indépendance de l’Algérie

Camus est décédé plus de deux ans avant l’indépendance de l’Algérie, mais il avait toujours refusé d’admettre cette évolution. Mouloud Feraoun en témoigne dans l’extrait de son Journal que nous reprenons ci-dessous.

En janvier 1958, Camus écrivait : « en ce qui concerne l’Algérie, l’indépendance nationale est une formule purement passionnelle. Il n’y a jamais eu encore de nation algérienne1 ».
Pour Christiane Chaulet-Achour, Albert Camus n’a jamais accepté l’idée «d’une nation algérienne indépendante où les Français d’Algérie qui voudraient continuer à vivre dans leur pays le pourraient, en acceptant un statut de minoritaires 2».

Comme Areski Metref l’a écrit, «le drame de Camus, marqué par son enfance pauvre à Belcourt dans l’Alger coloniale, c’est qu’il appartenait aux colonisateurs par l’origine et aux colonisés par la condition sociale3».

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Camus et les nostalgiques de l’Algérie française, par Benjamin Stora

Évincé de l’exposition sur Albert Camus qui était prévue à Aix-en-Provence, et après avoir exposé le déroulement de ce mauvais scénario dans un livre écrit avec Jean-Baptiste Péretié, Camus brûlant4, Benjamin Stora revient sur la polémique et décrypte les survivances idéologiques d’une période qui demeure conflictuelle.

Ci-dessous un article de Renaud de Rochebrune, paru le 15 septembre 2013 dans Jeune Afrique n° 2749.

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Albert Camus et l'Algérie

Camus brûlant, par Benjamin Stora

On n’a pas oublié les polémiques qui ont accompagné en 2012 le projet d’exposition sur Camus dont l’inauguration était prévue à Aix-en-Provence en septembre 2013. Intitulée “Albert Camus, l’étranger qui nous ressemble”, ce devait être un des principaux événements de “Marseille-Provence 2013” (MP 2013). L’historien Benjamin Stora et le documentariste Jean-Baptiste Péretié étaient officiellement chargés de cette exposition, mais on apprenait au cours de l’été que la maire (UMP-Droite populaire) d’Aix-en-Provence, Maryse Joissains, avait décidé de les dessaisir.

Les raisons de ce limogeage ne sont pas toutes connues mais il semble qu’ils aient été des victimes collatérales de «la tentative de récupération idéologique» dont Albert Camus fait l’objet de la part de l’extrême droite. Comme ils l’exposent dans un livre paru le 4 septembre 2013, Camus est toujours brûlant5.

L’oeuvre de Camus est intimement liée à l’Algérie. Benjamin Stora saisit l’occasion de la parution de ce livre pour nous présenter la complexité et l’actualité de la pensée d’un homme qui se situait entre deux rives.

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Albert Camus face à la question algérienne, par Christiane Chaulet Achour

Une analyse critique par Christiane Chaulet Achour, professeur de Littérature comparée à l’Université de Cergy-Pontoise, de la position d’Albert Camus dans la guerre d’Algérie/guerre de libération nationale.

Cette intervention dans le cadre de l’Université populaire de Chambéry, le 14 octobre 2011, paraîtra dans les Actes du colloque « 50 ans après les accords d’Evian ».

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Les Européens d'Algérie et leur exode

Pierre Nora, “les Français d’Algérie”

Pierre Nora, né en 1931, agrégé d’histoire, éditeur, directeur notamment des «Lieux de mémoire» et académicien français, a enseigné à Oran de 1958 à 1960. Dans son premier livre, Les Français d’Algérie, publié en 1961, un mois avant le putsch des généraux en Algérie, il insistait sur les contradictions et les responsabilités des Français d’Algérie.

La réédition de cet ouvrage est accompagnée d’une préface de l’auteur, ainsi que de plusieurs documents de l’époque, dont une “réponse” de Germaine Tillion et une longue lettre inédite du philosophe Jacques Derrida, dans laquelle le jeune pied-noir prenait la défense de ceux que l’on nommait alors les « libéraux ».

Ci-dessous : un extrait de la préface de la réédition, un enregistrement vidéo de l’entretien accordé à France-Culture le 19 décembre 2012, et un entretien donné au Nouvel Observateur.

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Hiver 1960, non loin de Ben S'Rour (©Albert Devaud)
Albert Camus et l'Algérie

Albert Camus et les ambiguïtés

Du fait de ses positions libérales et de sa critique de la politique coloniale française – voir notamment l’épisode de la “trêve civile” –, pendant la guerre d’Algérie Albert Camus était considéré par la droite comme un traître. On peut mesurer par là l’ambiguïté du véritable culte dont il est l’objet de nos jours de la part de très nombreux Pieds-noirs.

On a pu – Mouloud Feraoun le premier – reprocher à Albert Camus d’avoir relégué les Algériens à des rôles de figurants dans leur propre pays. Agnès Spiquel a montré que ce grief était assez largement infondé, mais il a alimenté une critique récurrente de la part d’Algériens qui reprochent à Camus de ne pas avoir perçu la montée du nationalisme algérien. Albert Camus était sans doute prisonnier de stéréotypes coloniaux, car ses reportages en Kabylie, en 1939 et en 1945, dénoncent la misère, sans mentionner la revendication du droit à l’existence, à la souveraineté, d’une partie importante de la population musulmane. Son point de vue est marqué d’une sorte de cécité : sa méconnaissance de la langue arabe et de l’islam, ses préventions grandissantes à l’égard du panarabisme de Nasser, puis sa haine du FLN ont fait que, malgré ses liens avec des amis arabes, il n’a pas saisi l’acuité de ce qui se passait en Algérie.

Albert Camus avait le 23 août 1944 fait l’éloge des Français qui s’étaient levés contre l’occupant allemand : «Un peuple qui veut vivre n’attend pas qu’on lui apporte sa liberté. Il la prend» 6. Mais il s’est toujours refusé à mettre le nationalisme algérien sur un pied d’égalité avec le patriotisme de la Résistance française. Mouloud Feraoun, qui comprenait Albert Camus sans partager ses positions, a écrit dans son Journal le 18 février 1957 : «Camus se refuse à admettre que l’Algérie soit indépendante et qu’il soit obligé d’y rentrer chaque fois avec un passeport d’étranger, lui qui est Algérien et rien d’autre. »

La lecture d’un article repris ci-dessous, et deux petites vidéos dans lesquelles deux écrivains algériens, Mouloud Feraoun et Mouloud Mammeri, évoquent Albert Camus, permettent de mesurer l’ambiguïté du rôle que certains font parfois jouer à Albert Camus.

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“Albert Camus parle des Arabes”, par Agnès Spiquel

Professeur de littérature à Valenciennes et présidente de la Société des études camusiennes, Agnès Spiquel a collaboré à l’édition des oeuvres complètes de Camus dans “La Pléiade” (Gallimard) et elle codirige actuellement, avec Raymond Gay-Crosier, un Cahier de l’Herne consacré à l’écrivain, à paraître courant 2013.

Elle a récemment participé à un ouvrage collectif, Les Ecrivains français et le monde arabe, Ralph Heyndels éd., publié sous la direction de Madeleine Bertaud par l’ADIREL – Association pour la diffusion de la recherche littéraire (éd. Droz, 2010, ISBN : 978-2-9518403-8-6).

Nous remercions Agnès Spiquel et les éditeurs de cet ouvrage de nous avoir autorisés à reprendre sa contribution où elle répond de manière nuancée à l’affirmation rebattue selon laquelle les Arabes seraient “absents de l’oeuvre de Camus”.

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“Albert Camus, ou l’inconscient colonial”, par Edward Saïd

Dans son livre Culture et impérialisme, ( Fayard-Le Monde diplomatique, Paris, 2000), Edward W. Said montre que, dans leurs œuvres, de grands créateurs occidentaux – Joseph Conrad, Rudyard Kipling, Giuseppe Verdi, Charles Dickens, Honoré de Balzac, … – n’échappent pas à la mentalité de leur temps : ils évoquent et admettent calmement l’aventure coloniale, cette formidable entreprise de domination conduite par l’ « homme blanc ». Ci-dessous de larges extraits de Culture et impérialisme consacrés à Albert Camus7.

Intellectuel palestinien né à Jérusalem, Edward W. Said (1935-2003) était professeur de littérature comparée à l’université Columbia (Etats-Unis). Parmi ses autres œuvres : L’Orientalisme. L’Orient créé par l’Occident (Le Seuil, rééd. 2003).

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Ghislaine Ruvira, juin 1962. (photo : Bayard jeunesse)
Les Européens d'Algérie et leur exode

 1962 : l’exode de Ghislaine, oranaise …

La guerre d’Algérie est un événement historique complexe qui a broyé beaucoup de ceux qui l’ont vécu. En novembre 2004, les éditions Bayard jeunesse ont publié un dossier Okapi réalisé par Antoine d’Abbundo, J’ai vécu la guerre d’Algérie, 1954-1962, comportant les témoignages de quatre protagonistes – un appelé du contingent8, un moudjahid, un harki et une «pied-noire».

Nous avons choisi, avec l’autorisation de l’éditeur, de reprendre le dernier de ces témoignages, celui de Ghislaine Ruvira, pied-noire d’Oran, qui a dû, début juillet 1962, quitter définitivement l’Algérie, «son pays», «le pays où [elle est] née».9.

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