Face-à-face entre nostalgiques de l’OAS et opposants à Perpignan1
Une cérémonie de nostalgiques de l’OAS, organisée le jour anniversaire de l’exécution en 1962 des deux activistes de l’organisation condamnés pour l’assassinat du commissaire central d’Alger, a donné lieu mercredi à un face-à-face tendu, mais sans incidents, avec des opposants à Perpignan, a constaté un journaliste de l’AFP.
Devant le cimetière, une cinquantaine de manifestants2 regroupés derrière une banderole « Non à l’hommage de la honte » étaient venus en silence marquer leur désapprobation, à l’appel de la Ligue des Droits de l’Homme, du Mrap, du PCF, de la LCR, de l’union départementale CGT et de la Fédération nationale des anciens combattants d’Algérie (FNACA).
Les quelque 200 nostalgiques se sont rendus devant une stèle érigée en 2003 dans le cimetière, face au monument officiel aux morts militaires d’Algérie, Maroc et Tunisie. Celle-ci honore notamment Jean-Marie Bastien-Thiry, qui dirigea l’attentat du Petit-Clamart contre le général de Gaulle, Roger Degueldre, fondateur des commandos Delta de l’OAS, et les deux meurtriers du commissaire Roger Gavoury.
Lors du rassemblement, on reconnaissait notamment, parmi les
participants, de nombreux candidats locaux sous l’étiquette Front National.
A la sortie du cimetière, les nostalgiques ont de nouveau entonné « C’est nous, les Africains » face aux opposants, qui leur ont répondu par des sifflets et des slogans tels que « Il est fini le temps des colonies » ou « OAS assassins ».
La cérémonie n’avait pas été interdite par le préfet des
Pyrénées-Orientales qui avait considéré que l’appel à la cérémonie « pour rendre hommage aux réfugiés tombés pour que vive la France n’est pas en lui-même constitutif d’un délit » et que le déroulement des précédentes cérémonies « n’avait donné lieu à aucun trouble à l’ordre public ».
La manifestation a lieu depuis 2004, le 7 juin, date de l’exécution
d’Albert Dovecar et Claude Piegts, à l’appel de l’Association amicale pour la défense des intérêts moraux et matériels des anciens détenus et exilés politiques de l’Algérie française (ADIMAD).
Fils du commissaire assassiné, Jean-François Gavoury a estimé que le
préfet avait « pris une responsabilité écrasante en ne s’inspirant pas des jurisprudences de Louvroil et Marignane », où des manifestations similaires ont été interdites par les préfets du Nord et des Bouches-du-Rhône ».
En revanche, Jean-Philippe Ould Aoudia, fils de l’un de six inspecteurs
des centres sociaux éducatifs d’Algérie assassinés par Roger Degueldre,
s’est indigné de « l’inversion des valeurs de la République qui fait qu’on honore les bourreaux d’un commissaire de police et de fonctionnaires morts pour la France ».
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Face à face tendu entre les ex-OAS et leurs opposants – L’indépendant – 8 juin
L’hommage des nostalgiques de l’OAS à leurs morts a bien eu lieu hier matin au cimetière nord. Face à eux, une cinquantaine d’opposants sont venus en silence marquer leur désapprobation.
Il y a visiblement un droit local à Perpignan qui est différent du droit national.
Jean-François Gavoury, fils du commissaire central d’Alger assassiné en 1962, n’avait hier matin plus aucun espoir que la cérémonie de nostalgiques de l’OAS soit annulée par le préfet. « Le préfet a pris une responsabilité écrasante en ne s’inspirant pas des jurisprudences de Louvroil et Marignane », où des manifestations similaires avaient été interdites.
Face à ce fils indigné, soutenu par une cinquantaine de manifestants regroupés derrière une banderole « Non à l’hommage de la honte », quelque 200 anciens de l’Algérie française, remerciaient, quant à eux, le représentant de l’Etat français. « On a un préfet intelligent dans les P.-O. Un préfet digne de ce nom ». Après le dépôt de gerbe devant la stèle érigée en 2003 à la mémoire des deux activistes Dovecar et Piegts, fusillés pour leur participation à l’assassinat du commissaire Gavoury, les nostalgiques ont une seconde fois et « ostentatoirement » entonné à la sortie du cimetière le chant « Les Africains ». Alors que le face à face entre ex-OAS et opposants s’était déroulé dans le calme, version « chacun a choisi son camp, c’est la démocratie », le ton est subitement monté.
Au chant patriotique, les opposants ont répondu par des sifflets et des slogans du type » OAS assassins », « Il est fini le temps des colonies ». De l’autre côté, pieds noirs, harkis et membres du Front National n’hésitaient pas à crier » Les cocus, c’est vous! », « Gavoury barbouze ». Bras d’honneur, insultes et mauvais regards. Les 40 gendarmes mobilisés par la préfecture sous l’autorité du commissaire de police, ont veillé à ce que la situation ne dégénère.
Amer, Jean-Philippe Ould Aoudia, fils de l’un des six inspecteurs sociaux éducatifs d’Alger assassinés par Roger Delguedre, s’est indigné de « ces honneurs illégitimes et inappropriées » ainsi que de « l’inversion des valeurs de la République qui fait qu’on honore les bourreaux d’un commissaire de police mort pour la France ». Pour les nostalgiques de l’OAS, les choses sont claires: » On est venu déposer nos gerbes en paix. Quand on nous accuse de fascisme, ça nous fait rigoler… »