4 000 articles et documents

Édition du 1er au 15 février 2025

le rapport Braibant

Rapport BRAIBANT - 40 propositions pour les archives en France - 28 Mai 1996 En mars 1995, le Premier ministre Edouard BALLADUR demandait à monsieur Guy BRAIBANT, Président de Section honoraire au Conseil d'Etat de dresser le bilan de la loi n°79-18 du 3 janvier 1979 sur les archives. Le 28 mai 1996, monsieur Guy BRAIBANT remettait son rapport au Premier Ministre (Alain JUPPÉ).

Ce rapport, « les archives en France », publié la même année à la Documentation Française (Collection des rapports officiels) fait un point très complet et intéressant de la situation, des problèmes rencontrés et propose des solutions pour améliorer celle-ci.

Quarante propositions ont été faites et classées selon trois thèmes :

– Des archives plus riches

– Des archives plus ouvertes

– Des archives mieux gérées

Ce sont celles-ci que nous reproduisons, telles quelles.

PROPOSITIONS

Des archives plus riches

– 1- Consolider et réformer le statut des archives « politiques » publiques, en donnant un fondement juridique à la pratique des protocoles de remise d’archives des hommes politiques. L’accès des tiers à ces archives, pendant le délai au cours duquel elles ne seraient pas normalement communicables, serait soumis à un système de « double clé » : accord, d’une part de l’intéressé, d’autre part de son successeur ou d’un collège de personnalités indépendantes. La personnalité‚ versante conserverait le libre accès aux archives qu’elle a produites.

– 2- Installer des missions des Archives nationales dans tous les départements ministériels, afin de définir systématiquement – et conjointement avec les services versants – une politique de tri et d’élimination des archives courantes.

– 3- Faire clairement reposer la charge matérielle des archives intermédiaires sur l’administration productrice, soit directement, soit par compensation financière en cas de préarchivage dans un dépôt public.

– 4- Exclure, en dehors des prestations techniques ponctuelles, le recours à des entreprises d’archivage pour la collecte et la conservation des archives publiques.

– 5- Renforcer la fonction de contrôle des services départementaux d’archives à l’égard de la gestion et des versements des archives des collectivités locales et des services déconcentrés de l’Etat.

– 6- Mettre en place, au niveau départemental, des organismes interservices de gestion des archives intermédiaires, placés sous l’autorité‚ du préfet et le contrôle du directeur des archives départementales.

– 7- Etendre la compétence des archives départementales aux archives des établissements publics nationaux à compétence locale (ports autonomes, parcs nationaux).

– 8- Exclure de la catégorie des archives publiques les archives des entreprises publiques qui n’ont pas le caractère d’établissement public et qui ne gèrent pas un service public. Aménager le régime des archives des entreprises qui demeuraient soumises au statut d’archives publiques. Préciser dans la loi l’incidence des privatisations et des nationalisations sur le statut des archives des entreprises privées concessionnaires ou délégataires de services publics.

– 9- Organiser la collecte et le dépôt des archives des organismes de sécurité‚ sociale

– 10- Développer une politique de collecte en direction des archives privées, à travers la mise en place de procédures d’information systématique des entreprises et de conseil à leurs dirigeants.

– 11- Préciser le statut des archives privées acquises par les dépôts publics.

– 12- Développer une politique de collecte des archives scientifiques, qui devraient être accueillies dans des services d’archives publics ou dans des structures sur lesquelles s’exercerait le contrôle de la direction des Archives de France.

– 13- Sensibiliser aux archives les futurs dirigeants dans les écoles administratives, scientifiques et commerciales.

– 14- Inscrire dans la loi le principe selon lequel les fonctionnaires ne sont pas propriétaires des archives publiques de leur service. Etendre le champ d’application des décrets relatifs à la reprise des documents publics trouvés au domicile des fonctionnaires lors de leur décès

– 15- Remettre en ordre le dispositif de sanctions pénales en cas de destruction ou détournement d’archives.

Des archives plus ouvertes

– 16- Réduire à 25 ans le délai ordinaire d’accès aux archives qui ne sont pas librement communicables au titre de la loi du 17 juillet 1978.

– 17- Abroger les dispositions illégales relatives aux délais spéciaux figurant dans les décrets d’application de la loi du 3 janvier 1979.

– 18- Ramener à 25 ans après la date du décès de l’intéressé‚ – ou, si elle est inconnue, 50 ans à compter de la date du document – l’ensemble des délais spéciaux destinés à protéger la vie privée au sens large : dossiers de personnel, état civil, affaires portées devant les juridictions – en ne maintenant un régime particulier que pour les informations médicales (délai de 50 ans après la date du décès de l’intéressé‚ ou de 75 ans à compter de la date du document).

– 19- Réduire à 50 ans le délai spécial de protection des documents dont la communication serait susceptible de porter atteinte à certains intérêts publics, en précisant le champ des intérêts protégés : sûreté de l’Etat, sécurité‚ physique des personnes, secret de la défense nationale, conduite de la politique extérieure. L’atteinte susceptible d’être portée à ces intérêts serait appréciée à la date de la demande de consultation.

– 20- Préciser la manière dont l’application du délai de 50 ans aux documents protégés par le secret de la défense nationale s’articule avec les dispositions organisant la classification de ces documents.

– 21- Réserver pendant une durée indéterminée la communication des documents techniques relatifs aux armements nucléaires.

– 22- Engager une politique systématique de dérogations générales pour les archives dont la communication est subordonnée à un délai spécial et modifier le décret n°79-1038 afin de permettre l’ouverture sélective des fonds par dérogation générale pour les documents de moins de trente ans.

– 23- Déconcentrer la procédure de dérogation, en l’assortissant, dans le cas des documents mettant en cause la vie privée, de garanties pour les personnes intéressées. L’harmonisation de cette procédure serait notamment assurée par la direction des Archives de France qui pourrait être saisie de recours hiérarchiques et coordonnerait la pratique des directions départementales par voie de directive.

– 24- Mettre en cohérence les lois du 17 juillet 1978 et du 3 janvier 1979, notamment en ce qui concerne la définition des archives faisant l’objet de délais spéciaux. Une marge serait cependant laissée entre les deux textes, comprenant les documents administratifs non communicables au sens de la loi de 1978 qui ne font pas l’objet d’un délai spécial dans la loi sur les archives : documents relatifs à la monnaie et au crédit public, à la sécurité publique, documents mettant en cause le secret des délibérations du gouvernement ou le secret en matière industrielle et commerciale. Ces documents seraient accessibles au terme d’un délai de 25 ans, sous réserve que leur communication ne porte pas atteinte à d’autres intérêts publics ou privés.

– 25- Préciser les modalités d’articulation de la loi « informatique et libertés » du 6 janvier 1978 avec la loi sur les archives.

– 26- Etendre la compétence de la commission d’accès aux documents administratifs aux refus de communication de documents d’archives fondés sur les dispositions de la loi du 3 janvier 1979.

Des archives mieux gérées

– 27- Mieux organiser la gestion directe des archives pour les administrations centrales ayant opté pour ce système, en la faisant porter sur l’ensemble des fonds de l’administration concernée et en la confiant à des archivistes qualifiés.

– 28- Régulariser la situation des ‚établissements publics nationaux qui assurent directement la conservation et la gestion de leurs archives, en prenant les décisions conjointes prévues par l’article 10 du décret n°79-1037 du 3 décembre 1979. Etendre la compétence des archivistes en mission à ces ‚établissements publics.

– 29- Etendre la possibilité de gestion directe prévue par l’article 10 du décret n°79-1037 aux archives des services déconcentrés et des ‚établissements publics locaux, sous réserve qu’elle soit confiée à des archivistes professionnels, sous le contrôle scientifique et technique effectif de la direction des Archives de France.

– 30- Régulariser et encadrer juridiquement la situation des services actuellement dotés d’une autonomie de fait pour la gestion de leurs archives.

– 31- Donner une autonomie de gestion aux Archives nationales, en les érigeant en établissement public national, chargé de la gestion des archives centrales de l’Etat, qui coexisterait avec la direction des Archives de France, administration centrale chargée de définir une politique nationale d’archives et d’en contrôler la mise en oeuvre

– 32- Organiser le dépôt aux archives départementales des fonds des services centraux de l’Etat délocalisés en province, par convention prévoyant la compensation par l’Etat du coût de gestion de ces archives. Préciser dans la loi que la conservation par un service départemental unique d’archives produites par plusieurs personnes publiques reste sans incidence sur la propriété de ces archives.

– 33- Eriger les archives départementales en établissements publics départementaux, financés par des contributions des collectivités publiques en proportion du volume de leurs fonds respectifs. Certains ‚établissements pourraient se voir reconnaître une vocation particulière en matière d’archives régionales et d’archives d’entreprises.

– 34- Supprimer l’obligation de dépôt aux archives départementales pour les communes de moins de 2000 habitants, en contrepartie d’un contrôle scientifique et technique, et de la possibilité pour l’Etat d’imposer le versement si les archives sont en danger.

– 35- Organiser la collecte et la conservation des archives des ‚établissements publics de coopération intercommunale, ainsi que des organismes interdépartementaux, inter-régionaux et transfrontaliers.

– 36- Recentrer l’activité‚ de la direction des Archives de France sur ses missions d’administration centrale, notamment la conception de la politique archivistique, l’élaboration de la réglementation générale et des normes techniques, les missions au sein des administrations versantes, la coordination générale des questions liées à la communication et la conduite de la coopération internationale en matière d’archives.

– 37- Renforcer la direction des Archives de France pour lui permettre d’accomplir ces missions, en y affectant des administrateurs civils et en étoffant l’inspection générale.

– 38- Adapter la formation des archivistes aux nouveaux besoins, en organisant une filière préparant aux emplois de responsabilité archivistique dans les entreprises et en développant les enseignements juridiques, administratifs, économiques et sociaux. Modifier le décret du 1er Août 1963 afin de préciser le statut des élèves-fonctionnaires stagiaires de l’Ecole des chartes. Mieux coordonner les activités des différents établissements qui participent à la formation des archivistes.

– 39- Créer un institut des hautes études d’archives, pour organiser le perfectionnement des archivistes et sensibiliser les responsables des organismes versants aux archives.

– 40- Instituer un Conseil national des Archives, organe national de réflexion, d’impulsion et de coordination associant l’ensemble des partenaires et présidé par le Premier Ministre.

Facebook
Email