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Édition du 15 novembre au 1er décembre 2024

Une mère voilée peut participer à une sortie scolaire

Saisi par l’intéressée, le tribunal administratif de Nice a annulé la décision par laquelle la mère d’un élève, qui souhaitait conserver à cette occasion le voile qu’elle porte habituellement, n’a pas été autorisée à accompagner une sortie scolaire organisée par l’école élémentaire Jules Ferry de Nice. Le tribunal administratif a estimé que les parents d’élèves autorisés à accompagner une sortie scolaire à laquelle participe leur enfant doivent être regardés, comme les élèves eux-mêmes, comme des usagers du service public de l’éducation, de sorte que les restrictions à la liberté de manifester leurs opinions religieuses ne peuvent résulter que de textes particuliers ou de considérations liées à l’ordre public ou au bon fonctionnement du service. Il a constaté que, dans le cas particulier de cette affaire, l’administration avait refusé de donner suite à la proposition de l’intéressée d’accompagner la sortie scolaire en ne se prévalant ni d’une disposition légale ou règlementaire précise, ni de considérations liées à l’ordre public ou au bon fonctionnement du service. Il en a déduit que la décision attaquée était entachée d’une erreur de droit qui la rend illégale. 1

Sortie scolaire, la justice donne raison à une mère voilée

Le tribunal administratif de Nice a annulé mardi 9 juin l’interdiction faite à une mère d’élève d’accompagner une sortie scolaire en étant voilée.

par Marie Boëton, La Croix le 10 juin 2015

Restreindre la participation d’une mère voilée aux sorties scolaires doit être motivé, selon un avis du Conseil d’État, par « le maintien de l’ordre public » ou pour « le bon fonctionnement du service public ».

Que dit le jugement du Tribunal administratif de Nice ?

Le tribunal administratif de Nice a annulé l’interdiction de sortie scolaire faite à une mère voilée au motif que la directrice d’établissement n’avait pas motivé sa décision. Cette dernière s’était en effet contentée de répondre à la mère, sur le carnet de liaison de l’enfant?: « Nous n’avons malheureusement plus le droit d’être accompagnés par les mamans voilées. Vous ne pourrez nous accompagner que si vous l’enlevez ».

Or le droit en la matière est clair. La circulaire Chatel de 2012 permet, certes, « d’empêcher les parents d’élèves » de manifester « leurs convictions religieuses (…) lors des sorties », mais un avis du Conseil d’État rendu un an plus tard précise bien qu’une telle interdiction doit être justifiée par « le maintien de l’ordre public » ou pour « le bon fonctionnement du service public ».

En clair, restreindre la participation d’une mère voilée aux sorties scolaires doit être motivé. Un directeur ne peut lui interdire cette sortie par principe ou de façon arbitraire. « La décision du tribunal de Nice a le mérite de rappeler que chaque interdiction faite à une mère d’élève doit être prise au cas par cas, en fonction notamment du comportement de celle-ci », rappelle l’avocat de la plaignante, Me Sefen Guez Guez. À l’entendre, les litiges de ce type resteraient rares, la plupart se réglant par le dialogue entre l’école et les parents.

La décision doit-elle incomber aux directeurs ?

La circulaire Chatel a clos le débat – aussi récurrent que polémique – sur la participation des mères voilées aux sorties en déléguant aux directeurs d’établissement le pouvoir d’accepter ou non ces dernières, et ce au cas par cas. Cette délégation de pouvoir est toutefois loin de faire l’unanimité dans le monde enseignant.

Aux dires de certaines organisations syndicales, le dispositif en vigueur ferait peser une écrasante responsabilité sur les épaules des directeurs. « Cela les expose à de fortes pressions de la part des parents, déplore Christian Chevalier, secrétaire général du SE-Unsa. D’ailleurs, dans les quartiers où la communauté musulmane est fortement représentée, nos collègues acceptent systématiquement les mères voilées. Dans d’autres, à l’inverse, certains parents pèsent pour qu’on empêche la présence de ces mères aux sorties. » Le représentant syndical réclame un texte clair, qui s’impose à tous les établissements et ne mette plus les directeurs dans la délicate position de devoir choisir.

Un point de vue loin d’être partagé par tous. « On ne peut pas interdire l’exercice d’une liberté publique de façon absolue, estime pour sa part Bernard Toulemonde, inspecteur général honoraire. Une interdiction de sortie doit être justifiée au cas par cas, et en fonction du comportement de la mère d’élève. Et cela ne peut relever que de ceux qui la côtoient régulièrement, et donc du personnel de l’établissement. »

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