Aurait-on déjà oublié le motif initial des émeutes en Grande Bretagne ? Il s’agit de la mort de Mark Duggan, un Antillais de 29 ans, abattu le 4 août par des policiers dans le quartier de Tottenham au nord de Londres. Mark Duggan était soupçonné d’appartenir à un gang. Les policiers ont justifié l’usage de leur arme en invoquant la légitime défense. La colère est venue de là, de l’homicide bien entendu, mais également de la relation par la police des circonstances de cette mort, une relation qui n’a pas convaincu le quartier. Et Tottenham s’est embrasé comme Clichy-sous-Bois en octobre 2005, puis Villiers-le-Bel en novembre 2007.
Dans ces deux derniers cas, la police avait commencé par chercher à s’exonérer de toute responsabilité : à Clichy, « les enfants n’étaient pas poursuivis », et à Villiers-le-Bel, « le véhicule de police circulait normalement ». Dans ces deux cas, la relation des faits s’est avérée fausse, mais aucun des policiers impliqués n’a été sanctionné, alors que ce sont les inexactitudes de leurs déclarations qui ont provoqué les émeutes qui ont suivi.
L’avocat Jean-Pierre Mignard, observe sur son blog que le même processus s’est déroulé à Londres : l’IPPC (l’Independant Police Complaints Commission) a fait savoir le 9 août que rien ne démontrait que Mark Duggan se soit servi de son arme ou qu’il ait tenté de s’en servir. La thèse de la légitime défense s’effondre donc.
Jean-Pierre Mignard rappelle d’autre part que, en mai 1968, Maurice Grimaud, alors préfet de police de Paris, avait su, en leur rappelant des règles déontologiques élémentaires, calmer les fonctionnaires de police et contenir la violence qu’ils ont exercée sur les manifestants parisiens. La lettre que Maurice Grimaud avait adressée le 29 mai 1968 à chaque membre de la police parisienne est reprise ci-dessous. Jean-Pierre Mignard signale d’ailleurs que, lors des émeutes de Clichy en 2008, l’actuel préfet de police Michel Gaudin avait fait afficher cette lettre dans les commissariats.