Dossier : le premier Front populaire et la question coloniale
Au moment où se forme un Nouveau Front populaire, il est important de réfléchir aux compromissions et inconséquences du premier Front populaire sur la question coloniale.
Au moment où se forme un Nouveau Front populaire, il est important de réfléchir aux compromissions et inconséquences du premier Front populaire sur la question coloniale.
Alors que l’extrême droite est aux portes du pouvoir en France, la revue Orient XXI publie un dossier des articles qu’elle a publiés sur les racines coloniales de l’idéologie du
Avec Sylvie Thénault et Ugo Palheta Écouter ce podcast ici « Minuit dans le siècle », un podcast produit par Spectre Chaque mois, Ugo Palheta décortique le fascisme, non par fascination morbide
Entretien exclusif pour En vie à Béziers avec Pierre Daum, spécialiste de l’Algérie et auteur notamment de Ni valise, ni cercueil (éditions Actes Sud, avec une préface de Benjamin Stora), un livre consacré aux Pieds noirs restés en Algérie après l’indépendance 1.
Les propos de Pierre Daum sont rapportés par Robert Martin. À propos de l’article paru dans le Journal de Béziers de janvier 2015 concernant le 19 mars 1962, Pierre Daum déclare : « C’est un torchon ! » 2.
On ne peut oublier les combats de Robert Ménard, fondateur de Reporters sans frontières, pour défendre la liberté de la presse. On ne peut également que déplorer sa défense de l’indéfendable au nom de la liberté d’expression.
Élu maire de Béziers en mars dernier avec le soutien du Front national, Robert Ménard ne fait plus mystère de ses affinités avec l’extrême droite, et les nominations à la tête de son cabinet de deux activistes d’extrême droite l’attestent.
Il faut lire les déclarations de Louis Aliot, vice-président du Front National, s’étonnant que Robert Ménard se démarque du FN tout en engageant à son cabinet des gens «qui sont beaucoup plus, beaucoup plus radicaux que ne le sera jamais le Front National». D’après le Midi Libre, Robert Ménard a recruté comme directeur de cabinet André-Yves Beck, ancien collaborateur de Jacques Bompard à la mairie d’Orange et ancien membre, selon Mediapart, des mouvements d’extrême droite Troisième voie et Nouvelle résistance. Robert Ménard s’est également attaché les services, comme chef de cabinet, de Christophe Pacotte, qui avait intégré en 2012 le bureau directeur du Bloc identitaire. Retour ci-dessous sur un parcours bien tortueux.
Robert Ménard est né en 1953 à Oran dans une famille installée en Algérie depuis un siècle – on comprend le déchirement que représente toujours pour lui le départ brutal de son pays natal en 1962. Il est l’un des fondateurs en 1985 de l’organisation Reporters sans frontières dont il a été secrétaire général jusqu’en 2008.
Depuis lors, son parcours est particulièrement tortueux. Il s’affiche partisan de la peine de mort 3 et légitime l’usage de la torture 4. En avril 2011, il fait paraître un opuscule intitulé Vive Le Pen !, dont il a justifié la publication par la défense de «la liberté d’expression». L’année suivante, c’est Vive l’Algérie française !, écrit en collaboration avec le président du Cercle algérianiste, un pamphlet censé mettre un terme à la lecture de l’histoire de la guerre d’Algérie «avec des lunettes idéologiques»5.
Aujourd’hui Robert Ménard est candidat aux prochaines élections municipales à Béziers avec l’appui du FN, qui représente près de 20 % des voix dans cette commune de l’Hérault. Il a présenté sa liste le 4 mars 2014 : elle comporte notamment 6 FN, 1 Bleu marine, 3 DLR, 1 RPF, et 6 UMP ou ex-UMP… Par ailleurs, deux cadres du Bloc identitaire, Arnaud Naudin et Christophe Pacotte, seconderaient cette liste6. Ci-dessous quelques précisions sur l’itinéraire d’un individu en qui certains voient un poisson-pilote d’un projet de coalition FN-UMP7.
Pour l’historien Jean-Jacques Jordi, spécialiste des pieds-noirs, les rapatriés d’Algérie n’ont voté « comme un seul homme » que pour faire battre le général De Gaulle. Ils sont aujourd’hui répartis sur tout l’échiquier politique et leur poids électoral est limité. L’historien l’affirme : « Le vote pied-noir n’existe pas », mais les politiques le savent-ils ? On peut en douter si l’on en juge par les consultations qui se déroulent en haut de l’État.
Ces propos sont extraits d’entretiens avec Jean-Jacques Jordi8
rapportés par Pascal Charrier dans un dossier publié dans l’édition électronique du 2 mars 2012 du quotidien La Croix.
Ce que l’on a coutume de désigner par l’expression “communauté pied-noir”, c’est-à-dire les rapatriés d’Algérie et leurs descendants, pèse 7,3 % de la population française inscrite sur les listes électorales, soit 3,2 millions d’électeurs potentiels à la prochaine élection présidentielle. Elle représente 13,7 % du corps électoral en Provence-Alpes-Côte d’Azur.
L’étude récente du Centre de recherches politiques de Sciences Po reprise ci-dessous, évalue à 18 % ce qu’elle a donné à Jean-Marie Le Pen lors du premier tour de l’élection présidentielle de 2007, soit 8 points de plus que sa moyenne nationale. Le Cevipof estime à 28 % en France, et 30 % en Paca, les intentions de vote communautaire pied-noir en faveur de Marine Le Pen, pour avril prochain. Ce qui montrerait que plus des deux tiers des Pieds-noirs dans notre région n’auraient pas l’intention de voter à l’extrême droite. Autre phénomène rassurant constaté par le Cevipof : la préférence électorale en faveur de l’extrême droite s’estomperait avec les générations, les descendants des rapatriés accordant à Marine Le Pen 4 points de moins que leurs parents.
Il y a encore du travail en Paca, comme le montre l’enquête de Jean-Baptiste Malet publiée dans l’édition de février 2012 du mensuel Le Ravi. Au lieu de reconnaître les crimes commis au nom de la France durant la période coloniale et de combattre les tentatives de les récuser, de nombreux élus dits « républicains », le plus souvent de droite mais pas seulement, continuent à flatter des groupuscules « nostalgériques », comme en témoignent les inaugurations et fleurissements chroniques de monuments à la gloire de l’OAS, l’organisation terroriste, ou des généraux putschistes. Cinquante ans après l’indépendance de l’Algérie, ils continuent de façon irresponsable à instrumentaliser l’histoire et à exploiter les blessures mémorielles à des fins politiques.
Inspirateur du thème de la fracture sociale, repris par Jacques Chirac lors de sa campagne présidentielle de 1995, Emmanuel Todd observe depuis longtemps la coupure entre élites et classes populaires. Il livre pour la première fois son analyse du débat sur l’identité nationale, dans un entretien au journal Le Monde daté du 27 décembre 2009. Sans dissimuler sa colère. « Si vous êtes au pouvoir et que vous n’arrivez à rien sur le plan économique, la recherche de boucs émissaires à tout prix devient comme une seconde nature », estime-t-il.
Démographe et historien, Emmanuel Todd, 58 ans, est ingénieur de recherche à l’Institut national d’études démographiques (INED).
Il est parfaitement légitime de vouloir conserver la mémoire des victimes. Mais cela ne doit pas devenir, par la sélection des victimes, un moyen insidieux de parvenir à d’autres fins.
L’un des objectifs avoués de l’association Adimad (de défense des intérêts moraux et matériels des anciens détenus politiques et exilés de l’Algérie française) qui rassemble d’anciens activistes de l’OAS et des nostalgiques de l’Algérie française, est d’obtenir la réhabilitation de l’organisation terroriste. Elle tente d’y parvenir par les hommages qu’elle rend à une certaine catégorie de victimes.
Elle n’est pas la seule à livrer ce combat : dans une lettre qui circule sur Internet9, Thierry Rolando, président du Cercle algérianiste, n’hésite pas à parler de «nos amis de l’Adimad». Mais comment alors accorder le moindre crédit à la prétention du Cercle algérianiste de représenter tous les pieds-noirs ? Et que penser du thème Réhabiliter la mémoire des pieds noirs de son prochain congrès, fin octobre 2008 à Fréjus Saint-Raphaël, au cours duquel se déroulera un colloque intitulé Quand les Français d’Algérie auront-ils enfin droit à leur lieu de mémoire ? …
En fait, comme l’écrit ci-dessous Yann Scioldo-Zürcher, la variété d’opinions est aussi grande parmi les pieds-noirs que parmi le reste de la population.
Un entretien avec Emmanuelle Comtat. 10
Doctorante, Emmanuelle Comtat termine une thèse de sciences politiques sur les relations que les pieds-noirs d’Algérie et leurs enfants entretiennent avec la politique aujourd’hui. Parmi ses terrains d’étude : les Alpes-Maritimes.