Les noms des grandes artères de la ville de Dakar tout comme ceux de nombreuses places et rues de la ville renvoient à la colonisation française. Selon une étude parue en 2019, 60 % du Quartier du Plateau, centre politique et administratif de la capitale, regorge de noms d’hommes politiques, gouverneurs, écrivains ou médecins français, de Lazare Carnot à Georges Pompidou…
Le premier ministre sénégalais, Ousmane Sonko, a démenti récemment les propos mensongers d’Emmanuel Macron sur le retrait des forces militaires françaises du Sénégal au nom de la souveraineté des pays africains (voir le récent article de Cheikh Sakho sur notre site). La même volonté d’indépendance du pays a été affirmée par le président Bassirou Diomaye Faye qui a appelé mi-décembre 2024 à débaptiser des rues venant de la colonisation française pour les renommer en l’honneur de « héros nationaux ».
Les noms héritages de la colonisation française seront remplacés par ceux de figures de la lutte anti-coloniale, de personnalités de l’histoire sénégalaise et africaine mais aussi de français, asiatiques ou américains, qui ont défendu la décolonisation et combattu l’impérialisme.
Dans cette volonté de se réapproprier le passé national, il a demandé au premier ministre, Ousmane Sonko, de créer un « conseil national de la mémoire et de la gestion du patrimoine historique ». En 2022, alors qu’il était maire de Ziguinchor, Ousmane Sonko avait déjà débaptisé des artères de cette ville de Casamance, ce qui avait été invalidé par la Cour suprême sénégalaise. En 2023, l’avenue Faidherbe avait déjà été rebaptisée du nom du président Macky Sall, souvent docile par rapport à la Françafrique.
Le nouveau pouvoir sénégalais est conséquent dans sa volonté de promouvoir un nouveau récit national, comme ça a été le cas lors de la commémoration du massacre de Thiaroye, le 1er décembre 2024 (voir l’article de Martin Mourre sur le massacre des tirailleurs africains à Thiaroye). Le président a également demandé que les livres sur l’histoire du Sénégal et de sa colonisation écrits ou coordonnés par des sénégalais soient présents en bonne place dans tous les ministères. En invitant, le premier ministre à engager une réflexion sur la création d’un Conseil national de la mémoire et de la gestion du patrimoine historique, son objectif est de faire de la préservation de l’histoire du pays un levier de développement économique, social et culturel pour le Sénégal.
Pour approfondir :
- article de Mensah Degbetch dans Afrique-sur-7 : https://www.afrique-sur7.fr/senegal-diomaye-faye-veut-rebaptiser-les-rues-et-honorer-les-heros
- article de Coumba Kane dans le journal Le Monde en date du 16 janvier 2025.