Mise à jour (25 mars 2011)
L’édition du 24 mars 2011 de Var-Matin nous apprend que Salah Salmi a finalement été régularisé par la préfecture du Var et qu’il a reçu sa carte de résident il y a quelques jours.
D’autre part, la commission d’indemnisation d’Aix lui a accordé une indemnité pour le préjudice subi du fait de son incarcération injustifiée.
Salah Salmi était défendu par Mes Marc Oreggia et Frédéric Casanova du barreau de Toulon.
Accusé à tort de viol, un harki de 72 ans,
persona non grata en France
Incarcéré durant dix-huit mois, Salah Salmi, un ancien combattant de l’armée est sous le coup d’un refus de séjour délivré par les services de l’Etat
«On m’a accusé de viol. Je suis allé en prison à 70 ans. Une fois libéré, on a dit que j’avais trafiqué du shit. J’ai encore été innocenté. Maintenant, on veut m’expulser! Je suis né Français. J’ai combattu pour la France. Je veux finir ma vie ici! » Salah Salmi, un harki toulonnais, vit un enfer. À 72 ans, le vieil homme brandit fièrement sa carte d’ancien combattant et son titre de reconnaissance de la Nation. Pourtant cet ancien combattant de l’armée française est aujourd’hui sous le coup d’un arrêté de refus de séjour pris par la préfecture du Var. « Je me suis battu pour la France jusqu’en 1961. J’ai été grièvement blessé. Maintenant, on veut me renvoyer en Algérie. Je veux que ce cauchemar cesse », lâche-t-il la voix tremblante. Aux côtés de ses avocats, Mes Oreggia et Casanova, le septuagénaire à la santé fragile vient de livrer de nombreux combats. Et pas n’importe quelles batailles.
Papiers pas régularisés quand il est en prison
À 70 ans, il s’est retrouvé impliqué dans une affaire de viol à La Seyne. En 2004, accusé d’avoir abusé d’une femme, il clame son innocence. En vain. Il purgera dix-huit mois de détention provisoire avant d’être libéré le 5 février 2006. Un non-lieu l’innocente le 14 mai 2008. Marqué par ces longs mois d’incarcération, Salah Salmi pense alors recouvrer la liberté totale. Il n’en est rien. Il est convoqué devant le tribunal correctionnel de Toulon. « Pendant la perquisition, une barrette de cannabis a été trouvée dans le logement qu’il partageait avec d’autres personnes. On a voulu lui coller cette affaire supplémentaire sur le dos. C’est scandaleux. Il a été injustement incarcéré et on le convoque pour ça, sans preuve! C’est honteux », ne décolère pas Me Christophe Casanova. Le tribunal le relaxe. Le vieil homme pense alors voir le bout du tunnel.
Mais l’affaire se corse. En possession d’un titre de séjour depuis 2002, il devait le régulariser avant le 25 septembre 2004. Or, à ce moment-là, il est… en prison. Aucune démarche n’est engagée. L’innocent emprisonné se retrouve libre mais sans titre de séjour en France. « Cette situation, il la vit difficilement. M. Salmi s’est toujours considéré comme Français. Il n’a pas obtenu la nationalité française, il y a cinquante ans, à cause de circonstances exceptionnelles. Touché par une rafale de mitraillette, il a été hospitalisé. Une fois en état de prendre un bateau pour rejoindre la France, il était trop tard. L’armée algérienne l’a arrêté et emprisonné. Les soldats l’avaient trouvé en possession de sa carte militaire française », explique Me Marc Oreggia.
Ému, des sanglots dans la voix, Salah Salmi évoque les tortures qu’il a subies. Montre les traces laissées par les barbelés sur ses chevilles. Les années de misère. L’impossibilité de se marier avec des non-harkis ou d’intégrer la fonction publique. « Nous n’étions rien », lâche-t-il les yeux rougis. Tellement rien qu’en 2000, le gouvernement algérien attribue des visas pour la France. Trente-huit ans après l’indépendance, Salah Salmi arrive en France. Loin de s’imaginer que de nouveaux coups durs ne vont pas l’épargner.
Salah Salmi le harki reste sans-papiers
Salah Salmi, un harki de 72 ans, sous le coup d’un refus d’attribution d’un titre de séjour n’a pas été entendu par la justice française. Contre toute attente, la cour administrative d’appel de Marseille a rejeté en fin de semaine dernière, la requête de cet ancien combattant de l’armée française en Algérie. Pour le vieil homme et ses avocats, Mes Oreggia et Casanova, cette décision est un véritable coup de massue.
« C’est une très mauvaise nouvelle. Une très mauvaise surprise d’autant plus que le rapporteur public avait requis le rejet de l’arrêté pris par le préfet du Var. Dans la plupart des affaires, les conclusions de celui-ci sont toujours suivies par le tribunal. Nous sommes sous le choc. »
La juridiction d’appel a adopté la position du préfet; estimant qu’en matière de régularisation humanitaire, il s’agit de son pouvoir discrétionnaire.
Le sort s’acharne donc contre cet homme qui, à l’aube de sa vie, a choisi de venir s’installer sur sa terre de cœur. Après quarante ans d’attente, Salah Salmi avait pu obtenir un visa en 2000 pour rejoindre la France. En 2004, il avait été incarcéré à tort pour un viol; des faits pour lesquels il a été blanchi. Titulaire d’un titre de séjour validé par la préfecture du Var, il n’avait pas été en mesure de le reconduire car il était en prison. Il se retrouve sans-papiers depuis deux ans après ses tribulations judiciaires.
La décision rendue à Marseille l’a anéanti. « Il s’attendait à une reconnaissance de la justice administrative. Elle ne l’a pas fait. » Bien décidé à aller jusqu’au bout, Me Oreggia envisage un recours devant le Conseil d’État.
Appel à Hubert Falco et à Éric Besson
Ému face à la situation du septuagénaire, l’avocat toulonnais lance une bouteille à la mer. « J’en appelle à Hubert Falco, secrétaire d’État aux anciens combattants et maire de Toulon, ainsi qu’à Éric Besson, ministre de l’Immigration, pour que soit mis fin à une injustice en régularisant les anciens combattants harkis qui ont pu revenir en France et qui se trouvent encore sans papiers », indique Me Marc Oreggia.
« Il y en a au moins deux sur Toulon, Salah Salmi et Ramdane Hamreras. Ils vivent dans la rue. On les a oubliés en 1962, et on les oublie encore aujourd’hui. Cela devrait tous nous remplir de honte » conclut-il.