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Édition du 15 novembre au 1er décembre 2024

A-gens du voyage en France

L’Assemblée nationale supprime le livret de circulation

L’Assemblée nationale a voté dans la nuit du 9 au 10 juin 2015 la suppression de ce livret ainsi que le renforcement des pouvoirs des préfets pour la construction d’aires d’accueil, un point vivement contesté par l’opposition.

Les députés ont adopté une proposition de loi socialiste sur «le statut, l’accueil et l’habitat» des quelque 350 000 à 400 000 gens du voyage, dont 100 000 voyagent toute l’année. Tous les groupes de gauche l’ont soutenue tandis que le groupe LR et l’UDI se sont prononcés contre.
Le texte, présenté par le député PS Dominique Raimbourg, abroge la loi de 1969 qui faisait obligation aux gens du voyage de détenir un livret de circulation, sous peine d’amende, et qui n’avait été que partiellement abrogée en 2012. En novembre dernier, le Conseil d’État avait donné deux mois au gouvernement pour abroger les deux articles prévoyant encore cette obligation. Autre disposition de la loi de 1969 supprimée par la proposition de loi qui doit maintenant être débattue au Sénat : l’obligation d’être inscrit dans une commune de rattachement pour pouvoir voter, et le seuil de 3% de la population au-delà duquel le maire peut refuser leur inscription.

Par ailleurs, la proposition de loi renforce les pouvoirs du préfet en matière de construction d’aires d’accueil. Actuellement, 65% des 41 500 aires d’accueil prévues depuis la loi Besson de 2 000 dans les communes de plus de 5 000 communes ont été installées. Après une mise en demeure aux communes et intercommunalités défaillantes, le préfet pourra consigner, dans les budgets locaux, les sommes nécessaires, puis se substituer à elles, avec ces fonds.

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Un carnet de circulation à Chaumont, le 23 août 2010 (ZEPPELIN/SIPA).
A-gens du voyage en France

vers la fin du livret de circulation ?

La proposition de loi déposée par des députés PS en décembre 2013 “relative au statut, à l’accueil et à l’habitat des gens du voyage” pourrait enfin abolir la plupart des discriminations administratives qui pèsent sur les Gens du voyage. En effet la proposition de loi, inscrite à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale à la date du 9 juin 2015,
abroge complètement la loi du 3 janvier 1969 sur le statut administratif des gens du voyage, qui les obligeait jusqu’à présent à posséder un livret de circulation – cette loi avait déjà été partiellement abrogée par le Conseil constitutionnel en octobre 2012.

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les voyageurs français, des citoyens de seconde zone ?

A la faveur d’un important colloque organisé à Nantes le 15 mars dernier, la « mémoire tsigane » a rassemblé autour de voyageurs, de conférenciers et d’artistes, près de 300 personnes qui ont participé au projet de constitution d’une stèle sur le site de la Forge, camp d’internement situé à Moisdon-la-Rivière. Pour continuer de se souvenir et, surtout, d’agir 1.

Par ailleurs, les récentes élections départementales ont parfois donné lieu à des propos, tracts ou déclarations de candidats hostiles à la présence de Voyageurs dans leur canton. Ainsi, à Clermont-Ferrand, la LDH a-t-elle porté plainte auprès du procureur de la République, suite à la révélation par sa section locale, saisie par plusieurs associations de Voyageurs ou d’amis de Voyageurs, d’une profession de foi rappelant les heures les plus noires de l’histoire de France. Il paraît donc important de refaire un point sur l’état des droits des « Gens du Voyage » et de poursuivre la réflexion que Maurice Daubannay amorce ci-dessous.

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de quoi la question “Roms” est-elle le symptôme ?

Un?an et demi?après la publication de la ?circulaire du 26 août 2012??2
sur laquelle tant d’espoirs s’étaient?fondés,?quelle politique?en France?
envers les Roms, pour quels effets?? ?Et pourquoi ?sont-ils en passe??de?devenir ?le ?premier ?sujet ?d’une ?campagne ?électorale ?qui ?s’annonce??
Laurent el Ghozi, président de la Fnasat-GdV3, membre du CNDH Romeurope4

Un article publié dans le N° 165 (mars 2014) de la revue Hommes & Libertés de la Ligue des droits de l’Homme, qui comporte un dossier consacré au “Symptôme rom”.

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condamnation de la France pour violation de la liberté de circulation

Le 15 mai dernier, la Fnasat 5 a révélé que « l’ONU condamne la France pour violation de la liberté de circulation ». Interpellé par un voyageur français, le comité des droits de l’homme de l’ONU constate que« la France n’a pas démontré que la nécessité de faire viser le carnet de circulation à intervalles rapprochés, ainsi que d’assortir le non?respect de cette obligation de contraventions pénales sont des mesures nécessaires et proportionnelles au résultat escompté. » A compter du 28 mars, les autorités françaises ont six mois pour indemniser le voyageur et réviser la loi du 3 janvier 1969 qui impose un statut spécial aux gens du voyage.

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nouvelle condamnation de la France par la CEDH

Le 17 octobre 2013, la Cour européenne des droits de l’Homme a condamné la France pour avoir prononcé en 2004, sans nécessité apparente, l’expulsion d’un campement de gens du voyage sans propositions satisfaisantes de relogement.

L’affaire avait été portée devant la CEDH par 25 voyageurs et par l’association ATD Quart Monde. L’association a salué une « décision historique », appelée selon elle à faire jurisprudence: « on ne pourra plus décider d’expulser ainsi des familles sans proposer de solution de relogement », espère-t-elle.
La Ligue des droits de l’Homme se félicite également de cet arrêt.

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la réforme du statut des gens du voyage

Les gens du voyage restent soumis en France à une réglementation discriminatoire. Un rapport a été déposé en juillet dernier par le préfet Hubert Derache préconisant une réforme profonde de leur statut6, et une proposition de loi en cours de mise au point devrait être prochainement soumise au parlement.

Mais, comme l’anthropologue Marc Bordigoni7 l’expose ci-dessous, si cette réforme importante est adoptée, ce ne sera pas sans mal, tant il sera difficile pour les députés et sénateurs qui cumulent actuellement leur mandat parlementaire avec des fonctions exécutives locales de privilégier l’intérêt national sur la défense de leurs responsabilités locales – poste de maire ou de président de conseil général, régional ou d’agglomération8.

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“l’accueil et l’accompagnement des gens du voyage”, synthèse du rapport de la Cour des comptes

La Cour des comptes a publié en octobre 2012 un rapport sur L’accueil et l’accompagnement des gens du voyage, ainsi qu’une synthèse qui en facilite la lecture et l’utilisation et que nous reprenons ci-dessous9.

On estime le nombre de gens du voyage en France à environ 250 000 personnes, réparties de la manière suivante : 70 000 itinérants, 65 000 semi-sédentaires et 105 000 sédentaires 10. Le rapport de la Cour des comptes rappelle que la loi du 5 juillet 2000 est centrée sur le dispositif d’accueil prévu pour les gens du voyage itinérants : elle prévoit la mise en oeuvre dans chaque département de schémas d’aires d’accueil pour répondre aux besoins des gens du voyage nomades, mais elle n’aborde pas véritablement l’habitat des gens du voyage en voie de sédentarisation, sédentarisés ou semi-sédentarisés – en la matière, elle ne crée pas d’obligation et se limite à inciter les communes à mettre en place des solutions adaptées11.

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(photo : Fred Dufour/AFP)
A-gens du voyage en France

gens du voyage : suppression du “carnet de circulation”, mais maintien du “livret”

Dans une décision du 5 octobre 2012, le Conseil constitutionnel a déclaré contraires à la Constitution les dispositions de la loi du 3 janvier 1969 instaurant un “carnet de circulation” ainsi que celles imposant aux personnes sans domicile ni résidence fixe, trois ans de rattachement ininterrompu dans la même commune pour être inscrites sur les listes électorales.

Il a, d’autre part, jugé que l’existence et les règles de visa de titres de circulation applicables aux personnes circulant en France sans domicile ni résidence fixe ne sont pas, en elles-mêmes, contraires au principe d’égalité et à la liberté d’aller et de venir. Déception chez tous ceux qui escomptaient une abrogation complète d’une loi d’origine sulfureuse.

Le communiqué du Conseil constitutionnel : http://www.conseil-constitutionnel.fr/conseil-constitutionnel/francais/les-decisions/acces-par-date/decisions-depuis-1959/2012/2012-279-qpc/communique-de-presse.115705.html, et sa décision n° 2012-279 QPC : http://www.conseil-constitutionnel.fr/conseil-constitutionnel/francais/les-decisions/acces-par-date/decisions-depuis-1959/2012/2012-279-qpc/decision-n-2012-279-qpc-du-05-octobre-2012.115699.html.

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A-gens du voyage en France

la loi du 3 janvier 1969 sur les gens du voyage : une loi discriminatoire

Il y a cent ans – le 16 juillet 1912 – était institué le carnet anthropométrique encadrant « l’exercice des professions ambulantes et la circulation des nomades», une réglementation permettant de surveiller une population circulant en France sans domicile ni résidence fixe. On sait à quel usage ce fichage a pu servir sous le régime de Pétain.

La loi n° 69-3 du 3 janvier 1969 a remplacé le «carnet anthropométrique» par un «livret ou carnet de circulation», sorte de passeport intérieur qui doit être visé tous les trois mois par la police ou la gendarmerie.

Afin de lutter contre la stigmatisation dont les quelques centaines de milliers de personnes baptisées «gens du voyage» continuent à être l’objet, Esther Benbassa, sénatrice du Val-de-Marne, a déposé une proposition de loi co-signée par les membres du groupe écologiste du Sénat, visant à abroger cette loi. Une loi qui « contraint des personnes, en raison de leur mode de vie, à attendre trois années avant de pouvoir s’inscrire sur les listes électorales au lieu de six mois dans les conditions du droit commun, à détenir un titre de circulation et de le faire viser régulièrement par les autorités administratives (trois mois pour les carnets de circulation), sous peine d’une amende voire d’une peine d’emprisonnement. Autant de restriction aux libertés civiques et individuelles que nous devons abroger. »

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Manifestation, au cours de l’été 2010, devant l’ambassade de France à Bucarest, pour protester contre la décision des autorités françaises d’expulser des Roms originaires de Bulgarie et de Roumanie (© AP Photo/Vadim Ghirda)
A-gens du voyage en France

l’antitsiganisme en France et en Europe

Le 2 février 2011, lors d’une session plénière à Bruxelles, le Parlement européen a procédé à une commémoration historique du génocide des Roms par les nazis : «Le moment est venu» de reconnaître l’extermination de 220 000 à 500 000 Roms sous le nazisme, un crime «trop longtemps oublié de la mémoire collective», a déclaré son président, le polonais Jerzy Buzek12.

Mais ne serait-il pas plus urgent de se pencher sur la réalité d’aujourd’hui, et de prendre conscience que « dans nombre de pays européens, les Roms et les Gens du voyage sont toujours privés de droits de l’homme essentiels et souffrent d’un racisme flagrant» ? C’est ce que suggère la lecture du rapport de Thomas Hammarberg, Commissaire aux droits de l’Homme du Conseil de l’Europe, Les droits de l’homme des Roms et des Gens du Voyage en Europe, publié en février dernier.

Ci-dessous l’introduction de ce rapport, qui fait un retour sur le passé de l’antitsiganisme, suivie d’un extrait consacré à la France.

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(photo Arnaud Baur)
A-gens du voyage en France

Alexandre Romanès : “jamais un chef de l’Etat n’avait brutalisé à ce point les Tsiganes”

Poète, ami de Jean Genet et descendant des Bouglione, Alexandre Romanès planche à 61 ans sur son sixème ouvrage13. Chanteuse née en Roumanie, Délia a connu les pires heures de Ceausescu. Mariés depuis 1994, date à laquelle ils fondèrent le cirque Romanès, ils sont la voix du peuple tsigane de France. Ils reviennent sur le quinquennat de Nicolas Sarkozy, le plus douloureux de la Ve République pour leur communauté.

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