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Édition du 15 novembre au 1er décembre 2024

Roms : Viviane Reding rappelle l’urgence

Viviane Reding, vice-présidente de la Commission européenne en charge de la justice, des droits fondamentaux et des médias, a abordé mercredi 9 février 2011, devant des journalistes de la presse quotidienne régionale française, les plans d'action européens en faveur des Roms. Interrogée sur les propos énergiques qu’elle avait tenus, à l’occasion de la condamnation de la politique d’expulsions menée par la France, elle a déclaré ne pas avoir changé d'avis : « Je construis l'Europe de la justice, des valeurs, des individus et de leurs droits »2. Et elle a rappelé l'engagement de la France de changer la loi : «Dix millions de Roms vivent en Europe avec les mêmes droits et devoirs que tous les Européens. Selon la directive de 2004, ils peuvent circuler librement et s'ils sont interpellés pour avoir commis un délit, ils bénéficient du droit individuel de se défendre. Or, ce droit n'est pas intégré dans la législation française. C'est pour cela que des expulsions de groupes ont été possibles. La Commission européenne a donc menacé la France de la traduire devant la Cour européenne de justice si elle ne change pas sa loi. Depuis, la France a promis de la modifier d'ici au printemps»3. Les évaluations récentes par Brice Hortefeux du nombre de campements illégaux de Roms qui ont été «évacués» et du nombre de Roms «raccompagnés» montrent que la France persiste dans sa démarche d'expulsions. Il a même été révélé l'existence d'une note de la police du Val-de-Marne visant à dénombrer quotidiennement les délinquants originaires des « pays de l’Est » – une initiative visant vraisemblablement les Roms.

Roms : la France dans le collimateur

Dossier publié le 16 février 2011, dans La Marseillaise1

«Il est urgent de prendre les mesures nécessaires pour sortir les 10 à 12 millions de citoyens européens roms de la pauvreté ».
Vice-présidente de la commission européenne en charge de la justice, des droits fondamentaux et de la citoyenneté, Viviane Reding a, de nouveau, tapé du point sur la table à Bruxelles sur la question Roms. Et d’annoncer que « des plans d’action en faveur des Roms au niveau européen devront être mis en place dans toué les pays de l’Union ».

«Rappeler » serait plus juste puisque c’est en effet dans la foulées de la polémique opposant Viviane Reding à la politique d’expulsion des Roms menée par Nicolas Sarkozy l’été dernier que le principe d’un plan européen avait été arrêté. Le cadre général doit être élaboré par la commission européenne d’ici avril, avant son adoption par le Conseil européen de juin, le point ayant même été pointé comme phare par la Hongrie qui a en charge la présidence tournante.

En revenant sur la question, Viviane Reding envoie un signe fort sur l’importance et la pérennité du dossier. «Dix millions de Roms vivent pour la plupart – et nous devrions en avoir honte – dans une très grande pauvreté en Europe. Les plus jeunes sont peu, ou pas scolarisés. Ils ont pourtant les mêmes droits et mêmes devoirs que n’importe quel citoyen européen. ils peuvent donc circuler librement entre les Etats. S’ils commettent un méfait, ils ont, selon la directive de 2004, le droit individuel se défendre ». Une manière de rappeler les engagements pris par la France de modifier sa loi pour le printemps. Car la directive 2004 n’a pas été transposée en droit français et n’est donc pas appliquée dans l’hexagone. Ce qui a permis les vagues d’expulsion de l’été dernier.

« L’affaire française c’était l’alarme »

«II faut dire stop, a martelé Viviane Reding, l’affaire française c’était l’alarme. On perd des générations de Roms en ne faisant rien. 80% d’entre eux sont sédentaires. Les plans portant sur la scolarisation et le logement devraient donc répondre à un besoin ». Les fonds européens n’étant utilisés que de manière minime, la commissaire a également promis d’assouplir les règles d’accès à ces crédits. La complexité des dossiers européens n’est cependant pas la seule raison de la faiblesse d’utilisation des fonds européens. Ces derniers sont en effet soumis au cofinancement et des collectivités territoriales ou l’Etat ne sont pas prompts à s’engager sur des projets peu porteurs dans l’opinion publique.

Revenant sur sa comparaison des renvois de Roms par Paris avec les déportations de la Seconde Guerre mondiale, la commissaire européenne a persisté et signé : «Je ne regrette rien : ce fut un réveil pour la France et pour toute l’Europe. Je le referais si c’était à refaire et je pense que ce fut très utile ».

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Les expulsions dans le Sud

En juillet dernier en plein scandale Woerth-Bettencourt, le gouvernement fait diversion en annonçant l’évacuation de 300 camps illégaux de Roms. Nos régions ne sont pas épargnées : le 10 août, ce sont deux squats d’une cinquantaine de personnes à Montpellier et Lattes. Le 20 août, celui de la Vierge Noire, sur un terrain appartenant à la direction des routes à Aix. Le 24, ce sont 41 personnes qui sont expulsées d’un hangar dans le centre marseillais…

Partout, les associations dénonçaient depuis longtemps les conditions déplorables de survie. Mais au lieu de régler la question, les autorités se servent de l’argument pour expulser. Médecin du Monde prend alors la parole pour dénoncer la rupture brutale des soins entamés voire des campagnes de vaccination ainsi devenues caduques. A Aix, c’est le diacre qui s’alarme de la déscolarisation des enfants. A Marseille, cette politique se poursuit puisque, en début d’année 2011, une nouvelle expulsion a eu lieu dans un hangar du 15e arrondissement. Sans accompagnement social ni relogement.

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Repères

10 à 12 millions de Roms, Tziganes ou Gitans vivraient dans les pays de l’Union européenne. Ce qui fait d’eux la plus grande minorité ethnique d’Europe.

En mars Roumanie et Bulgarie devraient faire leur entrée dans l’espace Schengen. Un dossier qui est donc géré par la présidence hongroise. Mais le report a déjà été évoqué par plusieurs pays.

En avril, la commission européenne doit rendre le cadre européen des stratégies d’inclusion des Roms dans les Etats membres, servant d’orientation pour chaque stratégie nationale.

1400 médiateurs doivent être formés cette année pour assister le Conseil de l’Europe dans ses démarches locales auprès des Roms. Ainsi que 500 juristes.

Fonds européens. Sur les 4,5 milliards d’euros du Fonds social européen pour la France pour 2007/2013, 1 million a été consacré par des organismes français aux Roms qui représentent de 10 à 15 000 personnes.

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Discrimination

Sept années après leur adhésion à l’Union européenne, Roumanie et Bulgarie devraient intégrer l’espace de libre circulation de Schengen en mars prochain. C’est tout au moins ce qui était en théorie prévu. Mais depuis quelques mois, France et Allemagne plaident pour un report, rejoints récemment par les Pays-Bas.

Un sujet où la question Rom est évidemment un point d’achoppement.
Ce qui explique peut-être la « sortie » de Viviane Reding, sur l’urgence de traiter la question rom. Une intervention qui permet aussi de mettre la pression sur Nicolas Sarkozy qui s’était engagé à revoir la loi avant le printemps 2011. Une joute oratoire qui intervient aussi à un moment clé.

Le Parlement européen vient en effet de commémorer publiquement, et pour la première fois, le génocide des Roms par les nazis. Un génocide permis par « des politiques de discriminations dans de nombreux pays européens, comme la France avec le régime des nomades de 1912 », explique Henriette Asséo, historienne à l’Ecole des hautes études en sciences sociales. Depuis, le régime des nomades est devenu Livret de circulation, mais il existe toujours. Ce que ne cessent de répéter les associations : les discriminations se poursuivent. A noter que les expulsions de Roms l’été dernier viennent de provoquer la plainte d’une ONG basée à Genève contre la France pour violation de principes inscrits dans la charte sociale européenne. Plainte jugée recevable et qui va être examinée par un organisme du Conseil de l’Europe. Si ce n’est pas la croisée des chemins, ça y ressemble.

Angélique Schaller

France : 70% des campements de Roms évacués

[ Cyberpresse.ca, le 18 février 2011]

[Agence France-Presse] – Le ministre français de l’Intérieur Brice Hortefeux a affirmé vendredi que 70% des campements illégaux de Roms recensés en juillet 2010 en France avaient été «évacués», et 3 700 personnes raccompagnées «de manière contrainte ou forcée» dans leur pays d’origine.

La politique de fermeté annoncée à l’été 2010 par le président français Nicolas Sarkozy à l’égard des Roms avait suscité un tollé dans le monde entier et des tensions entre la France et la Commission européenne.

«À ce jour, 70% des 741 campements illicites recensés au 31 juillet sur le territoire ont été évacués», a déclaré Brice Hortefeux dans un entretien au quotidien Le Parisien.

«Et 3 741 personnes ont été raccompagnées, de façon contraintes ou volontaire, dans leur pays d’origine», a-t-il ajouté, précisant que tout n’est pas réglé: «Une situation d’une telle ampleur ne peut être résolue en six mois mais nous ne lâchons rien». […]

Val-de-Marne : une note de police vise les délinquants des pays de l’Est

par Vincent Verier, leParisien.fr, le 17.02.2011, 07h00

Il y a quelques jours, la Direction territoriale de la sécurité de proximité (DTSP) du Val-de-Marne a demandé à ses dix-sept commissariats de l’informer quotidiennement du nombre de personnes « interpellées » et placées en « garde à vue » originaires « des pays de l’Est », « hors délit routier ».

Un tableau a même été adressé à chaque commissariat.

Or, si en France les analyses par nationalité sont autorisées, les statistiques ethniques sont en revanche illégales. « Ce tableau est ambigu et très imprécis, reconnaît le ministère de l’Intérieur. Nous n’avons rien demandé, c’est une initiative locale. » […]

« Il ne fait aucun doute que ce sont les Roms qui sont visés, insiste [un] gradé qui souhaite garder l’anonymat. D’habitude, ces chiffres sont demandés oralement, jamais par écrit, pour ne pas laisser de traces ».

Cette démarche ne surprend pas l’association Romeurope 94. « Depuis la tentative de vol de câbles en cuivre sur l’A 86, il y a une augmentation des contrôles et des interpellations de Roms en Ile-de-France », regrette Michel Fèvre, responsable de l’association.

Le week-end des 5 et 6 février, des voleurs de cuivre avaient fortement endommagé le système électrique du tunnel de Thiais, sur l’A 86. Bilan : plusieurs milliers d’euros de dégâts et un trafic routier saturé sur les axes secondaires. Six personnes, toutes roms, ont été arrêtées et incarcérées depuis. « Certains sont tombés dans la délinquance, défend Michel Fèvre. Mais on ne peut pas faire peser sur toute une communauté les agissements de quelques-uns. »

  1. Cette édition du quotidien La Marseillaise comporte un autre article accessible en ligne, sur des actions d’associations marseillaises pour loger des familles roms : «Alors, on pourra chanter la Marseillaise».
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