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Édition du 15 septembre au 1er octobre 2024

Romeurope accuse Brice Hortefeux «d’acheter» des retours parmi les Roms

Bien que devenus ressortissants de l'Union européenne, Bulgares et Roumains, et en particulier les Roms, continuent à être reconduits dans leur pays. Ils font désormais l'objet de “retours humanitaires” qui sont comptabilisés dans le chiffre des reconduites à la frontière. Une pratique qui a été mise en oeuvre dans le Var fin janvier 008 puis en mars 2008. Le collectif Romeurope, dont la Cimade, Médecins du Monde et la Ligue des droits de l'Homme font partie1, dénonce la «perversité du système» et demande que «les moyens financiers [soient] orientés vers un accueil digne et durable dans notre pays pour les Roms qui le souhaitent, sans discrimination envers des ressortissants européens».

Communiqué du collectif Romeurope

Les Roms abusés par l’Anaem pour les statistiques de Monsieur Hortefeux

le 7 Avril 2008

Les citoyens français doivent savoir comment le ministre de l’immigration achète, grâce à l’Anaem, plusieurs milliers de « retours au pays » qui vont lui permettre d’atteindre ses quotas. Depuis quelques mois, l’Anaem recrute dans les bidonvilles où des familles roms roumaines et bulgares sont contraintes de trouver un abri. Le discours est simple : « retournez dans votre pays, nous paierons votre voyage de retour, nous vous donnerons de l’argent et nous vous aiderons à votre arrivée. »

Déclarer, comme le fait l’Anaem, que les familles sont volontaires pour rentrer en Roumanie en donnant pour preuve l’existence d’une liste d’attentes pour les retours est une manière de dissimuler la vérité. Si les coups de filets précipités comme à Bondy en octobre 2007 semblent avoir cessé, les opérations de retour soit-disant volontaire sont toujours coordonnées avec des opérations policières d’expulsion.

En réalité, le Ministère de l’Immigration, de l’Intégration et de l’Identité Nationale a mis en place un système pervers.

Des familles rroms installées, pour certaines, en France depuis quelques années, qui y ont établi des liens (scolarisation des enfants, emplois, suivi médical….), rompent ces liens pour retourner en Roumanie et bénéficier de cette somme.

Qui plus est, si le système géré par l’Anaem avait pour objectif de diminuer le nombre de personnes présentes en France, il est un échec. Ainsi des familles très pauvres en Roumanie ont eu connaissance de cette opportunité et arrivent en France pour bénéficier de la prime de l’ANAEM, qui représente pour elles un pactole. Certaines personnes n’hésitent pas à quitter leur emploi et interrompre la scolarisation des enfants. Qu’on ne se méprenne pas : les Roms n’abusent pas du système, c’est bien le système qui abuse les Roms, en les utilisant pour augmenter les chiffres des expulsions, au mépris de l’errance ainsi générée et de ses conséquences sur la vie de ces familles.

En effet, au regard de la situation socio-économique en Roumanie, l’argent promis est très attractif : 300 € par adulte et 100 € par enfant. Une famille peut ainsi toucher jusqu’à 1000 euros. En mars 2008, le salaire moyen en Roumanie est de 194 € par mois et un salaire minimum devrait être fixé à 137 € par mois. Le taux de chômage des Roms dépasse encore les 70 % dans certaines régions. La tentation est alors grande pour des familles qui ne disposent que de faibles revenus.

Ces aides au retour sont d’autant plus absurdes qu’en tant que ressortissants européens, les Rroms peuvent revenir quand ils le souhaitent. Ce système permet donc le cas échéant, à une même famille de bénéficier de plusieurs retours successifs et être comptabilisée plusieurs fois dans les quotas. C’est ainsi que le Ministère de l’immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du codéveloppement fait du chiffre, uniquement du chiffre.

Le Collectif Romeurope dénonce l’hypocrisie à toutes les étapes de ce système pervers qui instrumentalise les Roms et déstabilise ceux qui, en Roumanie ou en France, ont commencé à trouver quelques points d’ancrage. Les moyens financiers doivent être orientés vers un accueil digne et durable dans notre pays pour les Roms qui le souhaitent, sans discrimination envers des ressortissants européens. A cette fin, le cadre législatif et administratif doit être modifié, notamment pour lever les entraves existantes dans l’accès au logement et à l’emploi.

Lors de la venue du Premier ministre roumain en France, Romeurope souhaite que les deux Gouvernements décident enfin des mesures concrètes pour permettre aux Roms une réelle insertion dans le pays de leur choix.

L’Anaem, qu’est-ce que c’est ?

Présentation officielle
1

L’Anaem a été mise en place de façon effective en avril 2005 par le décret n° 2005-381, qui précise les missions de l’Agence et son organisation.

«La création de l’Agence Nationale de l’Accueil des Etrangers et des Migrations (ANAEM), en 2005, a permis la fusion des compétences et des moyens de deux structures ayant déjà une expérience ancienne des migrations. D’un côté, l’Office des Migrations Internationales (OMI), créé en 1945 pour gérer et réglementer la venue des immigrés. De l’autre, le Service Social d’Aide aux Emigrants (SSAE), une association créée en 1926, qui mettait au service des migrants, dès leur arrivée sur le territoire national, une action sociale spécialisée.

«Ainsi l’ANAEM dispose aujourd’hui des moyens nécessaires pour appliquer la politique définie par le Ministère de l’Immigration, de l’Intégration, de l’Identité nationale et du Codéveloppement.»

Une assistante sociale de l’Anaem précise

extrait de «Les Toulonnais d’abord», par Jean-Baptiste Mallet, Le Ravi N° 51

« A l’origine, l’Anaem avait pour vocation de développer l’accueil et l’intégration des immigrés ; mais aujourd’hui on nous demande presque de ne faire que de l’aide au retour, une disposition qui permet à un étranger de toucher 153 euros pour revenir dans son pays et au ministère de faire du chiffre.» Afin d’accélérer le mouvement, la prime est en ce moment doublée, à hauteur de 300 euros. Elle est officiellement non renouvelable. « Dans la région, nous travaillons avec des Roms qui retournent chez eux. S’ils ont touché leur argent à Toulon, ils reviennent à Nice pour percevoir encore l’aide au retour.» Le ministère connaît ce genre de dysfonctionnements mais ferme les yeux car cela lui permet d’annoncer des chiffres spectaculaires. Les agents de l’Anaem sont priés de suivre. «Avec l’immigration choisie et la liste régionale des emplois autorisés, un étranger non qualifié qui vient me voir avec un contrat de travail comme maçon ne peut pas travailler légalement.»

« Les expulsions par avion, souvent pour une seule personne, en plus de l’argent des “retours aux pays” et de ces autres politiques absurdes coûtent plus cher à l’Etat qu’une véritable politique d’intégration sociale.»

Jean-Baptiste Malet
  1. Référence : http://www.anaem.fr/qui_sommes-nous_46/historique_22.html.
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