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Édition du 15 novembre au 1er décembre 2024

Plainte contre Paul Barril pour complicité de génocide

La Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH), la Ligue des droits de l’Homme (LDH) et Survie ont déposé, lundi 24 juin, une plainte contre l’ex-patron du GIGN Paul Barril, pour complicité de génocide au Rwanda.

Communiqué commun

La FIDH, la LDH et Survie déposent plainte contre Paul Barril pour complicité de génocide au Rwanda

Le 25 juin 2013

La FIDH, la Ligue française des droits de l’homme (LDH) et l’association Survie ont déposé ce lundi une plainte contre Paul Barril auprès du Tribunal de grande instance de Paris du chef de complicité de génocide pour avoir notamment contracté le 28 mai 1994 un accord d’assistance de fourniture d’armes et de munitions et de formation et d’encadrement, avec le Premier ministre du Gouvernement intermédiaire rwandais (GIR), Jean Kambanda.

Paul Barril est un ressortissant français, ancien capitaine de gendarmerie, qui a travaillé dans le domaine de la sécurité et a conseillé différents chefs d’Etats notamment en Afrique, et plus particulièrement au Rwanda. Il a dirigé plusieurs sociétés, dont SECRETS ainsi que le groupe GPB – Groupe Privé Barril. C’est dans ce cadre que Paul Barril a conclu, le 28 mai 1994, un contrat d’assistance de fourniture d’armes et de munitions et de formation et d’encadrement, avec Jean Kambanda, le Premier ministre du Gouvernement intermédiaire rwandais de l’époque.

La FIDH, la LDH et Survie dénoncent la conclusion et l’exécution partielle par Paul Barril de ce contrat de fourniture d’armes et de munitions, et de formation et d’encadrement, alors même que le Rwanda était en plein génocide et que la communauté internationale dénonçait ouvertement les multiples violations des droits de l’homme commises dans le pays. C’est dans ce contexte que le Conseil de sécurité des Nations Unies, par une résolution n° 918 du 17 mai 1994, avait notamment adopté un embargo sur les armes interdisant la vente et la livraison « d’armements et de matériels connexes de tous types, y compris les armes et les munitions ».

Paul Barril, qui entretenait des relations privilégiées et de longue date avec les autorités rwandaises, était un fin connaisseur du contexte géopolitique rwandais de l’époque. Il ne pouvait dès lors ignorer les conséquences d’un tel accord permettant d’alimenter les crimes perpétrés au Rwanda durant cette période.

Enfin, l’Instruction devrait permettre de savoir si Paul Barril est seul en cause ou si d’autres responsables français ou d’une autre nationalité doivent être mis en cause.

La FIDH, la LDH et Survie saisissent donc aujourd’hui la justice française afin qu’une information judiciaire soit ouverte à l’encontre de Paul Barril pour complicité de génocide sur le territoire du Rwanda.

Le capitaine Barril visé par une plainte sur le Rwanda

par Piotr Smolar, Le Monde 26 juin 2013

Dix-neuf ans après le génocide commis contre les Tutsi au Rwanda, la question du soutien des autorités françaises au régime hutu demeure brûlante. Elle s’est enrichie d’un rebondissement, mardi 25 juin, avec le dépôt d’une plainte à Paris pour « complicité de génocide », visant le capitaine Paul Barril, au « domicile inconnu ». Cette plainte a été rédigée par l’association Survie, la Fédération internationale des Ligues des droits de l’homme (FIDH) et la Ligue des droits de l’homme.

La démarche vise le contrat d’assistance signé le 28 mai 1994 entre la société de Paul Barril, spécialisée dans la sécurité, et Jean Kambanda, premier ministre du gouvernement intérimaire. Il prévoit la livraison d’une grande quantité de munitions, d’obus et mortiers, de grenades. Montant total : 3,13 millions de dollars. Seul un accompte de 1,2 million aurait été versé, et le contrat non exécuté. L’opération Turquoise, déclenchée en juin par Paris, l’en a empêché.

EXISTENCE D’UNE LETTRE ADRESSÉE À M. BARRIL

« Ce contrat justifie à lui seul l’ouverture d’une enquête préliminaire, estime Me Patrick Baudouin, pour la FIDH. Des poursuites ont été engagées contre des génocidaires rwandais qui se trouvaient en Belgique ou en France. Un tribunal international a été mis en place. Mais personne d’autre, étranger, n’a été poursuivi. On sait que beaucoup de gens, à droite et à gauche, ne souhaitent pas qu’on creuse le rôle de Barril et ses protections. »

La chronologie est cruciale pour saisir toute la dimension du contrat d’assistance. Le 6 avril 1994, l’avion du président rwandais Habyarimana est abattu, donnant le signal pour l’extermination de près de 800 000 Tutsi. Ce jour-là, Paul Barril se trouve sur « une colline perdue au centre de l’Afrique », écrira-t-il dans ses mémoires. Le 17 mai 1994, le Conseil de sécurité des Nations unies adopte un embargo sur les armes.

Pourtant, Paul Barril est suffisamment sûr de ses contacts sur place et en France pour passer outre. En janvier dernier, Le Parisien a révélé l’existence d’une lettre adressée à M.Barril, le 27 avril 1994, par Augustin Bizimana, le ministre de la défense rwandais. Son objet : « recruter, pour le gouvernement rwandais, 1 000 hommes devant combattre aux côtés des Forces armées rwandaises. »

DÉTRICOTAGE DE L’ENQUÊTE

Les rapports entre M. Barril et le Rwanda dataient de six ans. Reconverti dans le privé, l’ex-gendarme de la cellule de l’Elysée avait conservé des liens avec François de Grossouvre, conseiller spécial de François Mitterrand. Il le met en relation avec la présidence rwandaise. Paul Barril est chargé, dit-il, d’infiltrer les structures militaires et politiques du Front patriotique rwandais (tutsi) en Europe et en Afrique.

En juin 2012, le capitaine a été entendu dans le cadre de l’instruction sur l’attentat du 6 avril par le juge Marc Trévidic, qui a fait perquisitionner son domicile. Ce magistrat a décidé dé détricoter l’enquête de son prédecesseur, Jean-Louis Bruguière, qui ne s’était jamais rendu au Rwanda et n’avait pas jugé bon d’interroger M.Barril sur ses activités de mercenaire.

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