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Libération le 17 novembre 2005.

Montpellier : parfums électoralistes autour du projet de musée de la France en Algérie

Le projet de centre qui devrait célébrer la présence française en Algérie, de 1830 à 1962, rencontre des difficultés existentielles. Mais il continue à bénéficier du soutien efficace de Georges Frêche qui, l'oeil rivé sur son électorat, n'a « rien à foutre des commentaires d'universitaires trous du cul. On les sifflera quand on les sollicitera ».
[Première mise en ligne : 7 novembre 2005
mise à jour le 14 janvier 2006.]
Libération le 17 novembre 2005.
Libération le 17 novembre 2005.

Le musée de la France en Algérie repris par l’Agglo

[Le Midi libre du 16 novembre 2005]

Le projet municipal de musée de l’histoire de la France en Algérie rebondit. Face au manque d’enthousiasme du maire Hélène Mandroux, qui a décidé d’attendre les prochaines élections pour tenir les promesses de l’équipe en place, Georges Frêche, président de l’Agglo et de la Région, monte au créneau et annonce que le musée promis va se faire sans la Ville de Montpellier.

C’est ce qu’il a déclaré hier, faisant monter la température d’un coup. « On s’est entendu avec Hélène. Elle m’a demandé si je voulais prendre ce musée à l’Agglo. C’est fait. Ce sera bouclé avant la fin du mandat. »

Georges Frêche a aussi défini l’esprit du musée. « Il s’agit de faire un musée de la France en Algérie et pas un musée sur la guerre d’Algérie ou l’Algérie coloniale. On va rendre hommage au travail qu’ont fait, avec les Arabes, indissociables de cette histoire, les Français en Algérie. »

Une définition qui traduit un changement de cap avec le projet initial, qui semblait naviguer au jugé sur deux courants opposés: celui des associations de rapatriés, qui veulent réhabiliter le rôle de la communauté pied-noire en Algérie, et celui des élus communistes, Verts (et de certains PS), qui veulent un musée d’histoire pur et dur.

Avec Georges Frêche à la barre, fin du louvoyage. « On ne va pas faire un musée de l’histoire de l’Algérie, car c’est à Alger de le faire. On va rendre hommage à ce que les Français ont fait là-bas. »

Et si des universitaires chargés de mettre en avant la complexité des choses n’apprécient pas, au motif qu’ils ne voudraient pas cautionner une entreprise de cette nature, tant pis pour eux: « Rien à foutre des commentaires d’universitaires trous du cul. On les sifflera quand on les sollicitera », a dit le président de l’Agglo 1.

Côté associations de rapatriés, on est heureux que Frêche récupère le bébé. « Il tient ses engagements et je l’en félicite car c’est suffisamment rare dans le monde politique pour être souligné », note Jacques Martin, président du comité d’honneur du musée. « Ce musée, ce sera celui de l’œuvre de la France en Algérie, un musée franco-français », dit Roland Dessy, président de la Maison des rapatriés, qui a réuni les présidents d’une quinzaine d’associations de rapatriés hier après midi « pour leur annoncer la bonne nouvelle ». Une bonne nouvelle que les élus de l’Agglo ne seront peut-être pas tous ravis d’apprendre. « Il est inacceptable de dire que l’Agglo prend le relais alors que l’assemblée n’a même pas été consultée », déplore Jean Déan, vice-président communiste de l’Agglo. 2

Le lendemain de la parution de l’article précédent, on apprenait,
dans Le Midi libre du 17 novembre, que le Comité scientifique s’apprêtait à remettre sa démission3. Ce même journal publiait le même jour une interview de Daniel Lefeuvre.

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A Montpellier, le projet de centre qui devait célébrer la période de 1830 à 1962 est au point mort.

par Jean-Marc Leclerc, Le Figaro, le 7 novembre 2005

Le projet de création, à Montpellier, d’un musée de la présence française en Algérie est-il déjà condamné ? Sur place, en tout cas, la municipalité voudrait désormais se donner le temps de la réflexion avant de prendre le risque de raviver les plaies de l’histoire. L’idée de ce musée a été émise il y a quinze ans par le socialiste Georges Frêche, tonitruant maire de la ville jusqu’en avril 2004. Pour lui, il s’agissait de mettre en valeur les apports de la présence française en Algérie de 1830 à 1962. Une manière de rendre hommage au passé des rapatriés d’Afrique du Nord, ses compagnons de toujours, qui pèsent aussi 20% de l’électorat local.

En 2002, la ville rachetait, pour 2 millions d’euros, un ancien bâtiment de l’armée, l’hôtel Montcalm, pour accueillir le futur musée. Un conservateur était même nommé à sa tête, en attendant la mise en place d’un « comité scientifique ».

Et c’est là que l’histoire dérape. La composition de ce comité, ouvert à de nombreuses associations de rapatriés, va brouiller l’image « scientifique » de l’opération. Nombre de ses membres, en effet, prônent un discours qui évoque davantage la célébration de la colonisation que le nécessaire « travail de mémoire ». Un fort soupçon de clientélisme électoral plane également sur le dossier. L’un des historiens associés au projet, Daniel Lefeuvre, l’affirme, en tout cas : « Ce n’est pas pour rien que l’ouverture du musée était prévue pour 2007, un an avant les municipales. » Et cet enseignant de l’université Paris-VIII d’ajouter : « Les historiens ne sont pas là pour servir la soupe aux politiques ni aux rapatriés ! »

La polémique qui enfle à Montpellier ne fait pas les affaires du gouvernement à Paris. Car la diplomatie française aimerait bien tourner la page du conflit franco-algérien. Elle travaille d’arrache-pied à la signature, d’ici à la fin de l’année, d’un « traité d’amitié » entre les deux pays. Déjà, une loi « portant reconnaissance de la nation et contribution nationale en faveur des Français rapatriés » a jeté le froid à Alger. Adoptée le 23 février 2005, à l’initiative de parlementaires, elle recommandait d’enseigner « en particulier le rôle positif de la présence française outre-mer, notamment en Afrique du Nord ».

Le texte avait ouvert la voie à des initiatives locales considérées comme de véritables provocations par certaines associations de défense des droits de l’homme. Ainsi, la décision d’ériger des stèles à la mémoire des combattants de l’Algérie française, où figurent les noms d’anciens de l’OAS, comme à Marignane (Bouches-du-Rhône) cet été.

La réponse du président algérien Abdelaziz Bouteflika fut à l’avenant. Assimilant l’oeuvre coloniale française au nazisme, il a tenu à rappeler que son pays était prêt à « signer avec l’Etat français un traité de paix et d’amitié », mais qu’il « ne saurait en aucun cas cautionner, même par son silence, une prétendue mission civilisatrice du colonialisme ».

Or c’est bien ce qui fait débat dans l’affaire de Montpellier.

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Montpellier – Un musée qui fait parler…

par L. T., L’Humanité du 6 juillet 2005

20 % de pieds-noirs dans la ville. Une raison suffisante pour faire promettre à Georges Frêche, alors maire de Montpellier, l’ouverture d’un musée de la présence française en Algérie. Ou plus exactement le Musée de l’histoire de la France en Algérie, de 1830 à 1962, dont l’ouverture est prévue pour la fin 2006. Une première en France qui suscite le débat.

« Musée historique ou à la gloire des pieds noirs ? » interrogeait en mai le quotidien régional Midi libre. Le doute est permis. Le comité d’honneur qui suit le dossier comprend des associations de rapatriés mais pas d’anciens combattants, tels que FNACA ou Mouvement des anciens combattants harkis. Bien que l’adjoint à la culture, Henri Talvat, insiste sur le caractère purement historique du lieu, les élus communistes, eux, s’inquiètent et regrettent l’absence de personnalités comme Benjamin Stora dans le comité scientifique.

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Lu dans le mensuel municipal Montpellier Notre Ville, N° 292 (juin 2005) :

Montpellier offrira bientôt aux visiteurs et chercheurs « le seul musée de France entièrement consacré à la présence française en Algérie de 1830 à 1962« .

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Montpellier :musée historique ou à la gloire des pieds-noirs ?

par Jean-Marie GAVALDA, Midi Libre, le 21 mai 2005]

musee_fr_en_algerie_montp.jpgIl ne devrait ouvrir que fin 2006 mais, déjà, le Musée de l’histoire de la France en Algérie de 1830 à 1962 suscite un vif débat. Cet établissement municipal qui sera aménagé dans l’ancienne résidence militaire, rue Foch, constitue une première en France.

C’est aussi la concrétisation d’une promesse électorale de Georges Frêche à des associations de rapatriés.  » L’idée a été lancée au début des années 1990. C’est bien qu’elle se réalise « , commente Me Jacques Martin, président de l’Association nationale des Français d’Afrique du Nord (Anfanoma) et du comité d’honneur constitué pour la création du Musée
Un comité auquel ne sont pas associés les anciens combattants d’Afrique du Nord. Ce que regrette Jean-Marc Laurens, président départemental de la Fnaca, lui même pied-noir « et fils de colon », précise-t-il. « On a interpellé le maire de Montpellier dès qu’on a eu connaissance du projet. Mais sans réponse. Nous souhaiterions quand même être consultés, explique Jean-Marc Laurens. Veulent-ils faire du Musée de la France en Algérie une deuxième Maison des rapatriés ? Je redoute une main mise sur cet établissement… »

C’est aussi la crainte d’Hocine Cherif, président du Mouvement des anciens combattants harkis : « Le musée devra être un lieu de rassemblement et pas de divisions. Quant à sa définition, elle n’est qu’un copié-collé de la loi que vient de voter le gouvernement pour les rapatriés. Et qui exprime la reconnaissance de la Nation à ceux qui ont participé à l’œuvre accomplie par la France dans les anciens départements français. »

Un Musée à la gloire des pieds-noirs ? « On montrera ce que la France a fait de bien mais aussi de moins bien, sans tabou », assure Roland Des, président du Recours Hérault, figure de la communauté locale des rapatriés.

L’œuvre civilisatrice est aussi défendue par Jacques Martin. « Le Musée ne doit pas nourrir de polémique. Il vise simplement à réhabiliter une présence française trop souvent décriée alors qu’elle a laissé de nombreuses traces positives : la fertilisation des terres, la construction de dispensaires, d’hôpitaux, la création de ports, d’aéroports…, s’enflamme le bâtonnier. L’instituteur, le paysan, le fonctionnaire, le boucher, le maréchal-ferrant et bien d’autres qui se sont retrouvés là-bas pour diverses raisons – parfois en exil politique – méritent cet hommage. »

Du côté du consulat d’Algérie à Montpellier, on reste très circonspect. « Je suis résolument tourné vers l’avenir pour favoriser le rapprochement en cours des deux côtés de la Méditerranée et multiplier les passerelles entre France et Algérie, commente le consul Hamy Harangue. Cependant, certains s’ingénient à glorifier la colonisation. Il ne faut pas oublier le passé mais on ne doit pas en abuser pour mieux l’instrumentaliser. »

« Ce ne sera surtout pas le Musée de l’Algérie française », prévient prudemment Henri Talant. L’adjoint à la culture tient à le situer dans un contexte purement historique, préférant évoquer l’œuvre de Napoléon ICI que la guerre d’Algérie. Ce qui n’empêche pas les élus communistes de s’inquiéter de « l’objectivité ». Que devrait garantir un comité scientifique d’universitaires. « Il est dommage que Benjamin Sture, grand spécialiste de l’Algérie, n’y figure pas », regrette Jean Dean, conseiller municipal PCF. « On ne pouvait pas prendre un polémiste qui tape toujours sur l’Algérie », répond le patron du Recours, Roland Des.

Le Musée de la France en Algérie ravivera l’histoire. Mais aussi des passions…

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Montpellier – Au temps de l’Algérie française

par Audrey Emery, Le Point, le 22 avril 2004

Première en France : un musée consacré à la présence française en Algérie ouvrira ses portes en 2007.

Fraîchement nommée conservatrice de ce futur établissement, Catherine Parpoil sait qu’elle avance sur des braises. Comme pour lever toute ambiguïté, elle s’empresse de préciser : « Il ne s’agit pas de régler des comptes, mais de rappeler le fil de l’Histoire. » Celle de tous ceux qui ont vécu en Algérie française, des colons aux musulmans en passant par tous ces immigrés forcés de partir après les événements de 1848 et 1870. « Cette page de l’histoire de France est très mal enseignée. On apprend la décolonisation mais pas la colonisation », observe-t-elle.

A Montpellier, la population compte 20 % de pieds-noirs. Un chiffre assez conséquent pour décider Georges Frêche à édifier un musée de la Présence française en Algérie. « Ce musée est très important pour nous, car c’est une façon de réhabiliter notre mémoire », estime Georges Descat, président du Cercle algérianiste.

Le conseil scientifique regroupera des universitaires, des conservateurs de musée, dont celui du Mémorial de Caen, ou encore la directrice du Centre des archives d’outre-mer d’Aix-en-Provence. « Des experts qui garantiront la rigueur intellectuelle du musée », assure Catherine Parpoil.

Colons et musulmans

Situé dans l’Hôtel Montcalm, bâtiment de l’armée racheté par la ville, il devrait être divisé en deux parties, une historique, une sociologique. La première retracera les grands moments de la présence française en Algérie de 1830 à 1962 et déclinera différents thèmes, comme l’armée d’Afrique, la médecine coloniale, ou la sociologie des immigrés. La seconde sera consacrée aux témoignages de rapatriés et de harkis du Languedoc-Roussillon.

Au terme du parcours, la guerre d’Algérie sera inévitablement évoquée. « Les différentes tendances seront présentées. Faute de trouver les mots, il faudra trouver les bons symboles », explique Catherine Parpoil, qui opte pour un « musée d’atmosphère », à l’image du Mémorial de Caen, en misant sur l’iconographie et l’interactivité. « Des outils qui peuvent permettre au public de s’approprier cette histoire et faire ainsi avancer le travail de deuil. »

  1. Pour ceux qui l’ignoreraient, Georges Frêche est un politique – membre du PS, dit-on – qui ne s’interdit pas de prononcer de fortes paroles. Parlant de personnes qui demandaient la réhabilitation de leur quartier, à laquelle il oppose un non définitif, il aurait déclaré : “ Je les emmerde en long, en large et en travers ”. (Note de LDH Toulon, inspirée par ce commentaire.)
  2. « Bravo à Frêche »

    Christian Schembré, président national du Parti pied-noir, « félicite Georges Frêche pour le maintien de ses engagements et sa détermination à propos de la destination du musée, pour rendre hommage au travail réalisé par les populations françaises et par là même, par les hommes et les femmes de toutes les communautés et de toutes les confessions qui ont œuvré côte à côte pour et en Algérie ». (Le Midi libre du 17 novembre).

  3. DÉMISSION – Le comité scientifique jette l’éponge

    On a appris, hier après-midi, que le professeur émérite d’histoire contemporaine Charles-Olivier Carbonell, (Montpellier III), s’apprête à adresser à la mairie de Montpellier la démission du
    comité qu’il préside et qui était chargé de préparer la création du Musée de l’histoire de la France en Algérie.

    Cette démission collective fait suite à la rencontre du comité avec Hélène Mandroux, la semaine dernière. Rencontre au cours de laquelle le maire a fait part de sa décision « d’anesthésier » ce projet sur lequel travaille, depuis 2003, Catherine Parpoil, le conservateur du musée embauché par la Ville. Évidemment, les propos de Georges Frêche sur les « universitaires trous du cul » ont choqué certains membres du comité scientifique. « J’ai passé énormément de temps, pendant un an et demi, à travailler bénévolement, avec mes collègues du comité, sur ce projet pour finir par apprendre, dans les journaux, qu’il était ajourné, et, comme si ça ne suffisait pas, pour me faire traiter de trou du cul. C’est lamentable, déplore un membré du comité, écœuré. Je suis une scientifique, pas quelqu’un qu’on « siffle ». Et je regrette beaucoup pour ce musée dont j’ai peur qu’on se serve pour continuer à opposer, au lieu de réconcilier. »

    N.B. D’après le cercle algérianiste de Montpellier, à la date du 13 décembre 2005, « le Conseil Scientifique était toujours en place – à l’exception de Mr Frémeaux qui s’est retiré en Juin 2005 pour des raisons d’ordre privé« .

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