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Édition du 15 novembre au 1er décembre 2024

Marseille : des riverains chassent des Roms

Plusieurs habitants et riverains de la cité des Créneaux (Marseille, 15e) ont contraint à la fuite, jeudi soir 27 septembre, des familles roms installées à proximité et incendié les restes de leur campement, sans violences physiques, a-t-on appris vendredi de source proche de l'enquête. Les policiers sont arrivés sur place vers 19h afin de séparer une trentaine d'habitants mécontents et les familles roms, qui ont reflué avec caravanes et véhicules, laissant quelques affaires qui ont été incendiées dans la soirée, selon la même source, qui a précisé qu'aucune interpellation n'avait été effectuée en l'absence d'agression physique. Pour Caroline Godard, de l'association Rencontres Tsiganes, "ce n'est pas étonnant qu'on en arrive là: il y a un climat de tension qu'on attise. On en arrive à la guerre entre pauvres". Pour le président de la Ligue des droits de l'Homme des Bouches-du-Rhône, Bernard Eynaud, "On a franchi un cap de plus. Il n'y a pas eu de blessé, mais on peut craindre le pire pour la suite".1
[Mis en ligne le 28 septembre 2012, mis à jour le 3 octobre]

Communiqué de la Fasti

Rroms : quand le racisme d’État légitime la violence privée

L’expulsion et l’incendie des abris de fortune de quelques familles Rroms installées dans un quartier du 15e arrondissement de Marseille, jeudi soir, par une poignée d’habitants est inquiétant. Inquiétant car ces actes de violences ne sont pas le fruit amer d’une colère, comme aimerait nous le faire croire les médias dominants, mais bel et bien le résultat d’une politique raciste et discriminatoire légitimant la mise au ban des Rroms. Une politique qui laisse accroire l’idée que chacun pourrait faire régner « son ordre » en dehors de tout principe de légalité.

Cette agression n’est pas sans rappeler les heures les plus noires de notre histoire : les ratonnades d’Italiens à Aigues-Mortes en 1893 ou encore les pogroms dans les années quarante. Du discours de Grenoble à l’évacuation des camps de Rroms par Manuel Valls, les hommes et les femmes politiques au pouvoir portent la responsabilité d’avoir attiser les haines xénophobes et de faire le jeu des extrémistes et autres Dupont-Lajoie.

Nous mettons en demeure le gouvernement de prendre toutes ses responsabilités et de cesser les amalgames et la politique spectaculaire. Ce qui s’est passé hier à Marseille, en présence de policiers passifs, montre bien combien cette politique est dangereuse. C’est la démocratie et les libertés fondamentales qui sont en péril. Il n’est pas trop tard pour changer de paradigme et mener une politique de respect, de solidarité.

Le 28 septembre 2012

Le Bureau Fédéral de la FASTI – Pour le Mouvement des ASTI

Communiqué de Romeurope

Le CNDH Romeurope, indigné par les terribles évènements survenus à Marseille, demande l’ouverture d’une enquête

Paris, le 28 septembre 2012

Le CNDH Romeurope exprime sa plus vive inquiétude suite aux évènements dramatiques qui se sont produits hier soir à Marseille. Des riverains ont évacué des personnes de leur lieu de vie, avant d’incendier le terrain et les effets personnels de ses occupants.

Un tel comportement est intolérable dans un Etat de droit et doit être fermement condamné.

Dans un climat de violence et de stigmatisation envers une population, climat aggravé par une politique qui ne met en œuvre que la fermeté, tout laisse à craindre que cette initiative ne restera pas à un acte isolé.

Nous demandons que le Gouvernement condamne fermement ces agissements et qu’une enquête soit ouverte pour faire la lumière sur ces évènements inadmissibles et l’attitude des forces de l’ordre.

Il est de la responsabilité du Gouvernement d’assurer la sécurité de chacun et de cesser de stigmatiser dangereusement des familles en situation de grande précarité.

Communiqué LDH

Roms de Marseille : faut-il choisir entre la police et la milice ?

Paris, le 28 septembre 2012

Au lendemain de la réhabilitation par un leader de l’UMP de la notion détestable de « racisme anti-blanc », dans la foulée d’expulsions spectaculaires de camps de Roms menées à l’initiative du gouvernement, des habitants du nord de Marseille ont cru devoir accélérer les procédures et passer aux travaux pratiques directs, en organisant une descente sur l’un de ces camps, molestant ses habitants et incendiant leurs habitations de fortune. La raison avancée – une série de cambriolages – quelle qu’en soit la réalité, ne peut en aucune façon justifier ces actes de violence : ils sont insupportables autant qu’illégaux. Leur gravité est extrême et c’est bien tout un groupe de population – vieillards, femmes, enfants – qui se retrouve victime dans une sorte de punition collective totalement hors du droit.

La LDH affirme qu’il serait extrêmement regrettable que les responsables politiques ne prennent pas la mesure de l’événement. La passivité des pouvoirs publics en amont de ce drame, l’absence de solution positive pérenne, les propos, pour le moins très ambigus, d’élus locaux ne peuvent qu’inquiéter toutes celles et tous ceux qui ont à cœur le respect de la loi et des droits attachés aux personnes.

La LDH affirme que la politique de destruction des camps et d’expulsion des personnes est dangereuse et inefficace.

Dangereuse, parce qu’en attisant le rejet, on semble légitimer la violence.

Inefficace, parce que sans la mise en sécurité des personnes, les mêmes causes produisant les mêmes effets, d’autres camps avec les mêmes misérables errants s’organiseront.

La LDH attend des élus et des représentants de l’Etat qu’elles et ils veillent à ce que, dans un Etat de droit, l’exercice de la justice ne puisse appartenir à des personnes privées. La justice, le droit, la loi, les droits, tout le monde y a droit, les Roms aussi.

MARSEILLE, LES MYSTÈRES D’UNE « EXPULSION »

par Daniel Schneidermann, @rrêt sur images le 28/09/2012

Que s’est-il passé, jeudi soir vers 19 heures, à Marseille ? Les sites de presse du matin, reprenant tous une brève de La Provence, et une dépêche de l’AFP, font un concours de synonymes. Une trentaine d’habitants de Marseille ont « expulsé » (Le Parisien) des Roms qui occupaient depuis quelques jours un terrain proche de la cité des Créneaux. Ils les ont « délogés » (Europe 1); « chassés » (Le Point); « fait fuir » (Francetv.info). Aucun journaliste n’ayant assisté à la scène, il faudra s’en tenir aux versions des habitants (ou des Roms délogés, mais cela semble plus improbable).

Ou encore des policiers. Car la police, selon l’AFP, a assisté à la scène. Sans intervenir, apparemment, puisque « l’expulsion », ou la « chasse », a été menée à son terme. D’où quelques questions du matin: la police avait-elle des consignes ? En a-t-elle demandé à la préfecture pendant que se déroulaient les faits ? Ladite préfecture en a-t-elle à son tour demandé au ministère de l’Intérieur ? Questions d’autant plus pressantes que les habitants, dans l’après-midi, avaient prévenu la maire socialiste des 15e et 16e arrondissements de Marseille, Samia Ghali, celle qui avait, voici quelques semaines, demandé au gouvernement l’intervention de l’Armée pour régler les problèmes de sécurité, de leur intention de passer à l’action, si les Roms n’étaient pas délogés par la police. On peut imaginer que l’élue a elle-même averti la préfecture, laquelle a donc disposé de quelques heures pour arrêter sa ligne de conduite. On serait dans un Etat de droit, et plus encore dans un Etat de droit sous un gouvernement de gauche, ces questions seraient posées, et le gouvernement (de gauche) aurait à coeur de ne pas laisser accréditer le soupçon qu’il laisse se constituer des milices spontanées d’évacuation des Roms. Mais patience. Elles le seront peut-être.

Dans la foulée, ces habitants ont incendié ce qui restait sur le campement après le départ des Roms, à savoir des vêtements et de l’électroménager. La police, qui n’a verbalisé personne, maintient pourtant qu’aucune infraction n’a été relevée. Avis aux amateurs: incendier, sous les yeux de la police, le bien d’autrui, ne constitue plus une infraction. Où l’on découvre que Manuel Valls, mais oui, peut aussi parfois être laxiste.

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