Jupe trop longue et défilé de mode 1
Le buzz de la semaine : Sarah K., une lycéenne musulmane de 15 ans, aurait été exclue de son collège à Charleville-Mézières à cause de sa jupe trop longue, en vertu de la loi française du 15 mars 2004 interdisant les signes religieux ostentatoires dans les lycées et collèges qui obligeait déjà Sarah à retirer son foulard avant d’entrer dans l’établissement.
La jupe longue, un signe religieux ? Pas du tout, affirma la ministre de l’Enseignement Najat Vallaud-Belkacem, manifestement consciente du ridicule d’une telle proposition. La jupe, en tant que telle, ne serait pas le problème. C’est l’attitude de l’élève qui a été sanctionnée, c’est-à-dire « un ensemble de signes ou de comportements qui, à un moment, deviennent ostentatoires, et qui nécessitent de rappeler le cadre et les règles de l’école laïque et républicaine », comme le déclarait le directeur académique du département, signalant que, dans cet établissement, d’autres jeunes filles auraient fait preuve « d’un comportement contraire à la loi sur la laïcité à l’école », en faisant « du même style de jupe […] un signe d’appartenance religieuse ou communautaire ». On ne saura rien de plus que ce salmigondis.
Mais comment distinguer un couvre-chef religieux d’un autre ? Avec le hijab (et la kippa), c’est facile. Mais, depuis peu, une nouvelle mode se répand chez les femmes musulmanes qui s’émancipent des traditions vestimentaires de leur pays d’origine : celle de porter son foulard noué en turban. Deux de mes amies musulmanes le portent ainsi. Comme le portait Ilham Moussaïd, dont la candidature à une élection locale en 2010 pour le Nouveau parti anticapitaliste avait plongé son organisation dans la crise. Et c’est là que les choses vont s’embrouiller. Car si le hijab dénote des « origines musulmanes », ce n’est plus le cas du turban. La preuve avec cette galerie de portraits.
Toutes ces images proviennent de sites de mode. Quatre de ces foulards-turbans sont réputés religieux et tombent sous le coup des interdits (devinez lesquels 2).
Cinq ne le sont pas du tout : ils proviennent de collections pour femmes cancéreuses en chimiothérapie qu’il serait scandaleux d’interdire nulle part. Comment distinguer les uns des autres ? En obligeant les femmes à produire un certificat médical pour avoir le droit de se couvrir la tête ? On frémit à cette idée. Si aucun comportement déplacé de prosélytisme ou de provocation caractérisée n’accompagne le port de ce couvre-chef, c’est même absolument impossible. À moins de présumer à partir d’autres éléments. Le turban sera sans doute réputé religieux si celle qui le porte se prénomme Fatima plutôt que Geneviève. Cela s’appellera alors du ciblage racial et la défense de la laïcité aura bon dos.
- Source : http://blogs.politique.eu.org/Jupe-trop-longue-et-defile-de-mode publié le 3 mai.
- Les quatre premiers. Les deux premiers sont musulmans, les deux suivants sont juifs.