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Édition du 1er juillet au 15 juillet 2024

Le film “Nos frangins” alimente le débat
sur les violences policières à contenu raciste
qui persistent en France

Le film “Nos frangins” est inspiré de la mort de Malik Oussekine et de Abdel Benyahia, tués tous deux par des policiers dans la nuit du 5 au 6 décembre 1986. L'étudiant Malik Oussekine a été victime, lors d’une manifestation contre le projet de réforme Devaquet à laquelle il ne participait pas, du peloton de « voltigeurs motocyclistes » mis en place par le ministre de l'Intérieur Charles Pasqua et sa mort a suscité une indignation dont la mémoire collective garde le souvenir. Mais celle d'un autre jeune Français d’origine algérienne, Abdel Benyahia, tué la même nuit par un officier de police ivre, à Pantin, alors qu'il tentait de s'interposer dans une bagarre, est moins connue. A partir de ces deux drames, le film suscite le débat sur les violences policières, souvent à contenu raciste, qui continuent à être commises et sur l'absence de toute autorité indépendante de la hiérarchie policière pour enquêter sur ces faits.

Réalisation : Rachid Bouchareb. Durée : 1h32 Distribution : Le Pacte
Réalisation : Rachid Bouchareb. Durée : 1h32 Distribution : Le Pacte



Nos frangins
Nos frangins Bande-annonce VF



La Ligue des droits de l’Homme soutient “Nos Frangins”,
un film de Rachid Bouchareb

publié sur le site de la LDH, le 15 décembre 2022.
Source

La mort de Malik Oussekine, dans la nuit du 5 au 6 décembre 1986, suite à des violences policières lors d’une manifestation contre le projet de réforme Devaquet (à laquelle Malik ne participait pourtant pas) fait partie de notre mémoire collective. Moins de personnes savent qu’au cours de la même nuit, un autre jeune Français d’origine algérienne, Abdel Benyahia, était tué par un officier de police ivre, à Pantin. Nos frangins est un hommage puissant à ces deux jeunes gens.

Rachid Bouchareb, que le grand public connaît surtout pour son film “Indigènes”, a mené, avec sa coscénariste Kaouther Adimi, un travail de recherche approfondi sur ces deux affaires : plongée dans les archives, entretiens avec des membres des deux familles. De ces rencontres, ils ont imaginé des éléments de fiction qui se mêlent dans une dynamique remarquable aux images d’archives. Et ils ont relié les deux affaires en créant deux personnages tout à fait plausibles : un inspecteur de l’IGS [l’Inspection générale des services] censé enquêter sur ces deux meurtres et un employé de l’institut médico-légal, un Africain, qui accueille les deux corps avec une douceur infinie, en leur parlant et en chantant en bambara.

Fiction inspirée de faits réels, les images d’archives nous font revivre intensément les événements de ces quelques jours : manifestations des étudiants, répression de la police, interventions des voltigeurs, déclarations du pouvoir en place qui cherche à étouffer/déguiser l’affaire Oussekine (il ne dit rien de la mort d’Abdel), témoignages divers, dont celui de Maître Kiejman, avocat de la famille de Malik, celui d’un témoin de la scène de matraquage… et la colère, l’indignation de toute la population, jusqu’à la marche silencieuse en l’honneur des deux jeunes gens le 10 décembre.

En regard, la douleur immense et les réactions, très différentes, des deux familles. Celle de Malik, représentée par son frère aîné et sa sœur, se bat de toutes ses forces contre ce que veut faire croire la police et mène sa propre enquête. Le père d’Abdel, lui, fait profil bas : on lui cache la mort de son fils et il accepte, sans rien dire, les bobards des policiers, refusant de croire son autre fils qui lui assure qu’ils mentent. Contrairement au frère de Malik, jeune entrepreneur, il appartient à une génération d’immigrés qui se fait la plus invisible possible.

L’IGS, un organisme qui appartient à l’institution policière

Entre les deux, cet inspecteur de l’IGS, visiblement très mal à l’aise vis à vis des consignes qu’il reçoit et qui tente de trouver la vérité.

Des images de Malik, chez lui, au club de jazz où il était ce soir-là et dans la rue avant la terrible rencontre, contribuent à rendre ce film encore plus émouvant.

Pour incarner les principaux personnages, d’excellents acteurs, qui les font vivre avec intensité et vérité : Reda Kateb et Lyna Khoudri sont le frère et la sœur de Malik, Samir Guesmi le père d’Abdel, et Raphaël Personnaz l’inspecteur de l’IGS.

La musique du talentueux compositeur Amine Bouhafa (à qui l’on doit, entre autres, celle de “Tumbuktu”, “Gagarine”, “Le Sommet des dieux”) accompagnent admirablement certains passages du film, qui vibre aussi avec des chansons de Mano Negra, Rita Mitsouko, Warda, et celle de Renaud, “Petite”, qui fait allusion aux deux jeunes gens et clôt le film avec beaucoup d’émotion.

Dans une interview accordée à Charles Tesson, critique et historien du cinéma, Rachid Bouchareb reconnaît que les violences policières lors du mouvement des Gilets Jaunes ont contribué à renforcer l’idée de faire ce film : « On est encore dans cette actualité. Sur le sujet de l’immigration et des violences, on y est encore. On pense tout le temps qu’on va passer à une autre étape, mais il n’y a pas vraiment de changement. Cela fait 35 ans. Faut-il plus de temps pour résoudre certains problèmes ? »

Un film recommandé par le MRAP, la LDH, SOS Racisme,
Amnesty International et la LICRA



Quelques-unes des projections organisées
par la Ligue des droits de l’Homme



A Guéret, le jeudi 15 décembre à 18h, au cinéma Le Sénéchal.
A Roanne, le jeudi 15 décembre à 18h, au cinéma Le Renoir.
A Saint Yrieix la Perche, le mardi 10 janvier à 20h30, au cinéma Arévi.

Quelques-unes des projections organisées
par le MRAP



A Saint-Denis, le 12 novembre à 20h30, au cinéma l’Écran.
A Metz, le 24 novembre à 20h, au Klub Metz.
A Paris, le 1er décembre à 20h, au cinéma les 7 Parnassiens.
A Aubenas, le 7 décembre à 18h, au cinéma Le Navire.
A Pantin, le 8 décembre à 19h30, au cinéma 104.


Les actualités de l’époque







Un débat autour de ce film



Abdel pour mémoire, réalisé par Mogniss H. Abdallah , film documentaire de 20 minutes, de 1988, retrace le combat de la famille d’Abdel Benyahia, soutenue par le comité « Justice pour Abdel », pour obtenir une condamnation du policier meurtrier. Celui-ci a été condamné à sept ans de prison par le tribunal de Bobigny le 25 novembre 1988. Ce court-métrage a été montré le 2 décembre 2022 au cinéma L’Etoile à La Courneuve avant la projection en avant-première du film Nos frangins. Malika Benyahia, la nièce d’Abdel, a expliqué que Nos frangins serait précédé d’Abdel pour mémoire pour « travailler sur l’esprit critique et la prise en compte des faits réels ». La famille d’Abdel Benyahia a souhaité à cette occasion rétablir certains faits. Une demande est partie de la salle : projeter le film Pour Abdel avant chaque projection de Nos frangins.


Lire aussi :

• « Avec Malik Oussekine, la conscientisation d’une génération », publié dans l’Humanité le 6 décembre 2021, mise à jour d’un article publié le 9 décembre 2016.

• Myriam Attaf, « “Un pays qui se tient sage”, un documentaire autour des violences policières qui rappelle à l’ordre », sur SaphirNews le 16 Septembre 2020.

• Marie-José Sirach, « Reda Kateb : “le film Nos frangins donne une voix aux morts anonymes” », entretien avec Reda Kateb publié dans l’Humanité le 5 décembre 2022.

• Marie-José Sirach, « Abdel, notre frangin. L’autre mort du 5 décembre 1986 », publié dans l’Humanité le 5 décembre 2022.

• Michaël Mélinard, « L’histoire comme écho à la France contemporaine », publié dans l’Humanité le 6 décembre 2022.

• Michaël Mélinard, « « Nos frangins », de Rachid Bouchareb : un cinéma pour faire bouger les lignes », entretien avec Rachid Bouchareb publié dans l’Humanité le 7 décembre 2022.


• Lionel Lemonier, « Nos frangins, l’hommage cinématographique – contesté – rendu à Malik Oussekine et Abdel Benyahia », sur SaphirNews le 3 décembre 2022.

• « “Les frangins” de Abdel Benyahia », la réaction des frères d’Abdel Benyahia publiée sur internet le 12 décembre 2022.

• Marina Da Silva, « “Nos frangins”, ou comment réécrire l’histoire », sur un blog du Monde diplomatique le 15 décembre 2022.

• Michel Kokoreff, « Fiction ou imposture ? – sur Nos frangins de Rachid Bouchareb », sur AOC le 8 décembre 2022. Qui mentionne les ouvrages suivants :

• Michel Kokoreff, Violences policières, une généalogie d’une violence d’État, Paris, Textuel, 2020.

• David Dufresne, Maintien de l’ordre, Paris, Hachette, 2007.

• Mogniss H. Abdallah, Rengainez, on arrive ! Chroniques des luttes contre les crimes racistes ou sécuritaires, contre la Hagra policière et judiciaire des années 1970 à nos jours, Paris, Libertalia, 2012.

• Dominique Manotti, Marseille 73, Paris, Équinox les Arènes, 2020.

• Yvan Gastaut, « La flambée raciste de 1973 », Revue européenne des migrations internationales, Vol 9, n°2, 1993.

• Maurice Rajsfus, 1953, un 14 juillet sanglant, Paris, Editions du détour, 2022.

• Emmanuel Blanchard, « La Goutte d’or, 30 juillet 1955 : une émeute au cœur de la métropole coloniale », Actes de la recherche en sciences sociales, n°195, 2012/5.

• Jean-Luc Einaudi, La bataille de Paris. 17 octobre 1961, Paris, Seuil, 1991.

auxquels nous ajoutons :
• Fausto Giudice, Arabicides publié en 1991 aux éditions La Découverte.

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