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Édition du 15 novembre au 1er décembre 2024
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le fichage des Roms

Quatre associations de défense des Roms, des Tsiganes et des gens du voyage viennent de déposer une plainte contre un «fichier ethnique, illégal et non déclaré» constitué par la gendarmerie. Baptisé MENS – «minorités ethniques non sédentarisées» –, ce fichier aurait permis, pendant des années, d'effectuer une «généalogie des familles tsiganes» et un répertoire des «groupes à risques»... Un nouveau témoignage de la confusion et de l'opacité inadmissibles qui entourent l'existence de très nombreux fichiers informatisés utilisés par les services de police et de sécurité, dont certains sont même dépourvus de toute base légale.

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Communiqué LDH

Paris, le 8 octobre 2010

Chasse aux Roms : après la circulaire, le fichier…

Après avoir fiché en 2008 les homosexuels, les militants politiques, syndicaux et associatifs dans le fichier « Edvige », après avoir ajouté en 2009 dans la deuxième version de ladite Edvige, rebaptisée Edvirsp [sic], le fichage des « origines géographiques » (qui ne sont ni le lieu de naissance ni la nationalité…), après avoir organisé discrètement en 2010 l’ethnicisation des expulsions par la circulaire discriminatoire du 5 août, voici donc que les gouvernants actuels sont pris en flagrant délit d’exploitation d’un fichier ethno-racial élégamment dénommé « Minorités ethniques non sédentarisées » (Mens).

Le ministre de l’Intérieur, il est vrai déjà condamné pour injure raciale, feint d’ignorer ce qui se passe dans ses propres services. La direction de la gendarmerie prétend que ce fichier n’existe pas alors que des preuves formelles de son utilisation par un service de cette même gendarmerie ont été apportées et rendues publiques. Et l’on y trouve par exemple le stockage de données sur la « généalogie des familles tziganes », la délinquance y étant donc considérée comme héréditairement transmissible chez « ces gens-là »…

Lorsque Viviane Reding avait observé le mois dernier, s’agissant de la chasse aux Roms organisée par Nicolas Sarkozy depuis juillet 2010, qu’on aurait pu espérer ne pas revoir ce genre de choses après la Seconde Guerre mondiale, le président de la République et ses porte-voix avaient feint de voir dans ses propos un parallèle insoutenable avec la « destruction des juifs d’Europe » par les nazis. Vont-ils cette fois comprendre que les Roms ont leur propre expérience de ce que préparent historiquement le fichage ethnique, le repérage des « généalogies tziganes » et l’identification de la « non-sédentarisation » à la « délinquance itinérante » ? Ou faudra-t-il leur rappeler l’usage qui fut fait du fichier établi en application de la loi de 1912 lorsque les juifs, les tziganes et les homosexuels étaient les cibles des nazis et de leurs « collaborateurs » vichyssois ?

Expulsions ethniques, fichage ethnique… Quelle sera la prochaine étape de la « racialisation » des approches sécuritaires ? La Ligue des droits de l’Homme, fortement investie dans le regroupement de plus de cent dix organisations à la suite de la manifestation du 4 septembre contre la « politique du pilori » xénophobe et discriminatoire, appelle plus que jamais à un sursaut civique contre cette tache qui se répand sur l’honneur de la République.

Pour en savoir plus…

Le fichier des Roms du ministère de l’intérieur, par Franck Johannès

La gendarmerie s’est constituée discrètement un fichier sur les Roms, parfaitement illégal et totalement clandestin. C’est clairement un fichier ethnique, il a d’ailleurs été baptisé MENS – pour minorités ethniques non sédentarisées. Il est géré par l’OCLDI, l’Office central de lutte contre la délinquance itinérante, au fort de Montrouge, à Arcueil, dans le Val-de-Marne, qui a pour mission la lutte « contre la criminalité et la délinquance commises par des malfaiteurs d’habitude qui agissent en équipes structurées et itinérantes en plusieurs points du territoire » – il n’est officiellement pas question de viser uniquement les gens du voyage, même si c’est une obsession des gendarmes. […]

Françoise Cotta et William Bourdon, avocats des quatre principales associations de Roms et de gens du voyage – La voix des Rroms , l’union française d’associations tsiganes (UFAT), la fédération nationale des associations solidaires d’action avec les Tsiganes et les gens du voyage (Fnasat), l’association nationale des gens du voyage catholique (ANGVC) – ont porté plainte, mercredi 6 octobre, auprès du procureur de Paris pour constitution de fichier non déclaré, et conservation « de données à caractère personnel qui font apparaître les origines raciales et ethniques ». Les articles 226-16 et 226-19 du code pénal punissent ces infractions de cinq ans d’emprisonnement et 300 000 euros d’amende.

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Le fichier de police STIC-Canonge contient déjà des «caractérisques ethno-raciales» par Franck Johannès

Ce n’est pas la première fois que le ministère de l’intérieur intègre des critères ethniques dans ses fichiers. En 1950, l’inspecteur principal René Canonge, de la sûreté urbaine de Marseille, crée un fichier manuel, avec photos, qui trie les personnes mises en cause en fonction de douze types : «blanc (caucasien), méditerranéen, gitan, moyen-oriental, nord-africain-maghrébin, asiatique-eurasien, amérindien, indien (Inde), métis-mulâtre, polynésien et mélanésien-canaque».

L’article premier de la Constitution garantit que la République «assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race ou de religion». Le fichier Canonge, informatisé en juin 1992, a pourtant été intégré dans le Système de traitement des infractions constatées (STIC), qui recense 34 millions de personnes.

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Les fichiers hors la loi de la gendarmerie par Jean-Marc Manach

Le Monde vient de révéler l’existence d’un fichier des Roms du ministère de l’Intérieur, «illégal et clandestin». Mais peu de gens savent que la gendarmerie utilise de nombreux autres fichiers, et que deux d’entre-eux au moins devront normalement être «détruits» ce 24 octobre 2010. Le Fichier des personnes nées à l’étranger (FPNE) comprend 7 millions de fiches. Le Fichier alphabétique de renseignements (FAR), créé pour «permettre aux brigades de gendarmerie d’acquérir une connaissance approfondie de la population», comporte, lui, «60 millions de fiches, impliquant 20 millions de personnes».

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