Passée dans l’histoire sous le nom de « rafle du Vélodrome d’hiver », du nom du lieu où une partie d’entre eux ont été conduits avant leur transfert vers les camps d’internement de Drancy, Beaune-la-Rolande ou Pithiviers, cette vague d’arrestations ne fut ni la première, ni la dernière. Mais elle a été la plus massive.
Les premières rafles ont eu lieu le 14 mai 1941, les dernières au printemps 1944. En tout, 76 000 juifs de France ont été déportés vers les camps nazis, dont bien peu sont revenus.
4 500 policiers, selon les chiffres généralement retenus, 7 000 selon l’écrivain Maurice Rajsfus 1 ont pris part à l’opération des 16 et 17 juillet organisée à la demande des autorités d’occupation, mais sans leur participation. En outre une cinquantaine d’autobus de la compagnie du métropolitain ont été réquisitionnés avec leurs conducteurs.
La rafle devait en principe concerner les seuls juifs étrangers (la déportation des juifs de nationalité française viendrait plus tard) dont une liste avait été dressée mais les autorités françaises ont pris l’initiative d’y adjoindre les enfants, et devant l’insuffisance de la « prise » (la police tablait sur 22 000 arrestations) on s’est parfois montré peu regardant sur la nationalité.
La rumeur circulait depuis quelque temps d’une telle opération parmi la population juive, mais certains pensaient qu’elle ne concernerait que les hommes comme les précédentes, d’autres ne pouvaient pas y croire, la plupart de toutes façons n’avaient pas où aller.
La circulaire du directeur de la police municipale Emile Hennequin précisait que les opérations devaient être effectuées « avec le maximum de rapidité, sans paroles inutiles et sans aucun commentaire ». Les enfants ne devaient pas être confiés aux voisins mais emmenés en même temps que les parents.
Les célibataires et les couples sans enfants ont été conduits directement au camp de Drancy, ouvert en août 1941, en vue d’une déportation rapide vers Auschwitz, tandis que les familles étaient dans un premier temps emmenés au vélodrome d’hiver.
Elles y resteront plusieurs jours dans des conditions épouvantables, car rien n’avait été prévu pour elles, ni sanitaires, ni eau, ni nourriture, ni matelas. Les gens, qui n’avaient eu le droit d’emporter que deux bagages dont un de vivres, s’entassaient sur les gradins parmi les pleurs des enfants et les odeurs d’excréments.
La collaboration de la police française à la chasse aux juifs décidée par les nazis dans la zone d’occupation avait été facilitée par la politique résolument antisémite adoptée par le régime de Vichy dès son installation: il instituait un « statut des juifs » le 3 octobre 1940, interdisait toute une série de professions (avocat, médecin, magistrat etc.) aux juifs, créait le 29 mars 1941 un « commissariat aux questions juives »…
En zone occupée le port de l’étoile jaune avait été imposée aux juifs le 7 juin 1942. Dès lors, pour ceux qui n’avaient pas eu les moyens de fuir, ou qui n’avaient pas pu éviter de se faire recenser en octobre 1940, il n’y avait plus d’échappatoire.
[ AFP – le 15-07-2002 ]