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Édition du 15 septembre au 1er octobre 2024

L’influence méconnue de Jean Lartéguy sous la dictature en Argentine

La « doctrine de la guerre révolutionnaire » mise en œuvre par des officiers français pendant la « bataille d'Alger » a été largement exportée par la suite dans les dictatures militaires d'Amérique latine des années 1960 et 1970. Tout particulièrement auprès de la dictature argentine pour la guerre qu'elle a menée de 1976 à 1983 contre les groupes révolutionnaires et toute la population. Cet article relate le rôle méconnu joué par les romans du journaliste et ancien militaire Jean Lartéguy dans le « succès » de cette doctrine chez les militaires argentins.

Ce texte est une version raccourcie d’un article plus long, en castillan, de l’auteur : « La doctrina militar francesa popularizada. La influencia de las novelas de Jean Lartéguy en Argentina », Nuevo Mundo Mundos Nuevos, juin 2017.

La « doctrine de la guerre révolutionnaire » (DGR), élaborée par des officiers français pendant la guerre d’Indochine (1948-1954), a été mise en œuvre par leurs pairs lors de la guerre d’Algérie (1954-1962), en particulier au cours de la « bataille d’Alger » en 1957, quand ses principaux « piliers » ont été méthodiquement mis en œuvre : d’un côté, l’action psychologique pour « conquérir les cœurs et les esprits » de la population ; de l’autre, l’utilisation de techniques répressives interdites par les conventions de Genève (torture, exécutions extrajudiciaires, disparitions forcées, ratissages et déplacements forcés de population, etc.) pour éliminer les combattants nationalistes de l’Armée de libération nationale. Cette « doctrine » sera ensuite largement exportée dans d’autres armées du monde occidental, dont celle des États-Unis (qui l’appliquera au Viêt-Nam et plus tard en Irak et en Afghanistan) et celles de plusieurs dictatures militaires latino-américaines des années 1960 et 1970. Au premier rang desquelles la dictature argentine (1976-1983), dans la « sale guerre » qu’elle a menée contre les groupes révolutionnaires et toute la population. Et les romans du journaliste et ancien militaire Jean Lartéguy ont fortement contribué à faire connaître la DGR parmi les militaires argentins, jusqu’à la période actuelle.

Depuis le début des années 2000, et surtout après la diffusion en 2003 du documentaire pionnier de la journaliste Marie-Monique Robin Escadrons de la mort, l’école française sur la réception en Amérique latine de la « doctrine de la guerre révolutionnaire » (DGR) élaborée dans les années 1950 au sein de l’armée française1, plusieurs universitaires français et latino-américains se sont intéressés à l’influence de cette doctrine sur le terrorisme d’État mis en œuvre par les militaires des États du Cône Sud durant les années 1970.

Certains d’entre nous ont enquêté sur les origines de cette doctrine, quelque part entre les guerres coloniales d’Indochine et d’Algérie ; d’autres ont mené de minutieuses enquêtes sur son introduction en Argentine, établissant une précoce influence dès le milieu des années 1950. Après avoir découvert quantité de manuels à diffusion restreinte, de textes de conférences d’obscurs officiers français traduits dans des revues spécialisées tout aussi obscures, nous avons discuté du niveau de l’influence française comparée à celle des étatsuniens, ou bien encore du degré d’imagination des militaires locaux. À la même époque, le général David Petraeus, chef des troupes états-uniennes d’occupation en Afghanistan et en Irak, ainsi que principal auteur d’un manuel de contre-insurrection publié en 20072, a obtenu que soit rééditée en février 2011 la traduction d’un roman, Les Centurions de Jean Lartéguy3, dont il enjoignait la lecture à ses troupes.

Le roman Les Centurions, outil d’action psychologique ?

Il est à craindre que les universitaires ne parviennent jamais au degré de lucidité d’un général états-unien. Car ce que nous cherchions dans de vieux papiers difficilement accessibles, saturés d’un jargon militaire souvent indigeste, était à portée de main, chez n’importe quel bouquiniste de Buenos Aires pour le prix de deux paquets de cigarettes et d’une lecture en rien agréable mais très aisée. La lecture des Centurions ne satisfera sans doute pas toute la curiosité des spécialistes, mais elle offre une idée très claire de ce que veut dire la DGR. En outre, ce roman a la vertu de présenter les origines — en bonne partie mythifiées — de cette doctrine, dans les camps de prisonniers d’Indochine, puis son application en Algérie.

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Ce n’est pas un hasard si les bouquinistes porteños (de Buenos Aires) ont encore ce livre dans leurs bacs. Ces exemplaires sont le vestige des multiples réimpressions qui font suite à sa première édition locale en 1968 – chez Emecé dans une célèbre collection intitulée « Grands romanciers » –, jusqu’à la fin des années 19704. Ce succès ne fait que s’ajouter aux très bonnes ventes dans le reste du monde. En effet, publié en 1960 à Paris par les Presses de la Cité, il est rapidement vendu à plusieurs centaines de milliers d’exemplaires. Le roman connaît aussi une adaptation à Hollywood avec rien moins qu’Anthony Quinn, Alain Delon et Claudia Cardinale en têtes d’affiche (Lost Command de Mark Robson, 1966). Il s’agit d’un petit best seller planétaire.

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Mais s’intéresser à un roman de gare pour traiter de l’élaboration de la DGR par des officiers coloniaux, puis sa diffusion en Argentine à partir du milieu des années 1950 avec ses terribles conséquences à la fin de la décennie et, plus funestes encore, durant la dernière dictature (1976-1983), est ce bien sérieux ? Quel crédit accorder à cette apologie des parachutistes français qui justifie, voire encense, les pires de leurs crimes ? Et comment mesurer l’impact d’un tel objet littéraire en Argentine ?

Pour comprendre le sérieux de l’affaire, il faut rappeler quelques principes de la DGR, en particulier le terrain sur lequel elle souhaite mener la bataille qui est moins un territoire donné que la population qui s’y trouve. Cette doctrine militaire est en effet celle qui prend le plus rigoureusement au mot l’adage « conquérir les cœurs et les esprits »5, de sorte que la guerre psychologique y joue un rôle prépondérant. Or, si l’on comprend par « action psychologique » une opération limitée dans le temps et circonscrite à un territoire déterminé (par exemple, une zone militaire en Algérie durant la guerre d’indépendance ou en Argentine durant la dernière dictature), alors un roman peut difficilement être considéré comme un outil militaire. Dans ce cas, des pamphlets, des hauts parleurs ou une campagne de terreur (à travers des disparitions de personnes plus ou moins sélectionnées et la torture d’une partie assez conséquente de la population, c’est-à-dire des actions qui littéralement terrorisent) seraient les instruments adéquats, selon la DGR, pour convaincre une population.

Néanmoins, les théoriciens de la DGR conçoivent la guerre comme une guerre totale et sans frontière, de sorte qu’il n’existe pas une séparation nette entre un « intérieur » et un « extérieur ». Par conséquent, il ne s’agit pas seulement de convaincre une population spécifique mais son ensemble ; en l’espèce, aussi bien la population de la France métropolitaine que celle de ses colonies. Dans ce contexte plus général, autrement dit en appliquant les mêmes méthodes à une autre échelle, un film ou un roman de grande diffusion peuvent parfaitement être conçus comme des outils d’action psychologique. De là à dire que Les Centurions a été conçu comme une arme, c’est un pas à franchir avec beaucoup de précaution. Des indices mènent à cette hypothèse, mais il n’y a, pour l’instant, pas de preuve formelle. En premier lieu, les liens affectifs de l’auteur avec ses sources d’inspiration ne sont pas un secret : « J’ai bien connu les centurions des guerres d’Indochine et d’Algérie. Un temps je fus des leurs, puis, journaliste, je devins leur témoin, parfois leur confident. […] Je dédie ce livre au souvenir de tous les centurions qui périrent pour que Rome survive. »6

Quant à la maison d’édition, Les Presses de la Cité, s’il est vrai qu’elle suit une ligne éditoriale moins idéologique que commerciale, elle n’en publie pas moins à l’époque de nombreux ouvrages en faveur de l’armée française en Algérie — en cela, elle ne se distingue pas du paysage éditorial parisien général7. Enfin, l’important à-valoir d’un million de francs8 que la maison d’édition octroie à un auteur peu connu et qui n’a encore jamais travaillé pour elle laisse planer le doute sur un financement de l’armée (doute qui pourrait être levé, car le transfert monétaire que suppose l’opération a probablement laissé une trace dans ses archives). Quoi qu’il en soit, il existe une convergence d’intérêts entre les objectifs de propagande de la DGR, les ambitions littéraires de Jean Lartéguy et les buts commerciaux de l’éditeur. Ces expectatives de chacune des trois parties seront largement comblées avec les centaines de milliers d’exemplaires vendus, les traductions et l’adaptation cinématographique.

L’intérêt propagandiste des romans de Lartéguy ne fait d’ailleurs aucun doute. En effet, les ouvrages qui nous intéressent, Les Centurions (1960) et Les Prétoriens (1961), racontent les aventures d’un groupe d’officiers parachutistes, dont les traits sont parfaitement identifiables chez des officiers français bien réels, quand bien même certains empruntent à plusieurs ou que d’autres échangent certains caractères ou actions connus (par exemple, le personnage inspiré de Paul Aussaresses, Julien Boisfeuras, meurt durant une charge dans le désert dans des conditions qui évoquent la mort du capitaine Claude Barrès, lui aussi officier du SDECE et par ailleurs petit-fils du célèbre écrivain nationaliste).

L’influence de Lartéguy dans l’armée argentine

Outre l’enquête de Marie-Monique Robin, de minutieux travaux universitaires ont établi le haut degré de coopération entre des militaires français et argentins, en particulier autour de la DGR, à partir de la moitié des années 1950. Cette coopération concernait essentiellement des officiers appelés à occuper de hauts postes de l’armée argentine. En effet, il s’agit d’élèves de l’École supérieure de guerre et de lecteurs de revues spécialisées. Aussi, la DGR se diffuse du haut vers le bas, depuis les nouvelles promotions d’officiers vers leurs futurs subordonnés, et seulement à l’intérieur du monde militaire. Les romans de Lartéguy, en tant que produits culturels de masse, suggèrent un autre type de diffusion à partir de 1968, qui se réalise à la fois plus démocratiquement à l’intérieur de l’armée — n’importe quel soldat peut saisir les principes de la DGR en lisant un roman facile à lire que lui aura peut-être conseillé un collègue ou un supérieur direct — et en dehors, dans un monde civil qu’il s’agit toujours de séduire selon les principes de la doctrine.

Les romans de Lartéguy contribuent, avec d’autres produits culturels et un ensemble de discours politiques et militaires, à justifier a priori ce que la morale exècre et ce que la loi — qu’elle soit civile ou de guerre — condamne. Car s’il est difficile, voire impossible, de mesurer avec exactitude les effets sur les subjectivités des lecteurs de la présentation de tortionnaires sous les traits de héros aux grands cœurs, cela reste très facilement imaginable. Par exemple, la paternité du tristement célèbre « scénario de la bombe à retardement9 », principale justification rhétorique — et parfaitement fictive — de la torture sensée éviter l’explosion imminente d’une bombe, est généralement attribuée à Les Centurions. Ce scénario connaît des variations infinies que nous retrouvons aujourd’hui quotidiennement dans des séries ou des films. C’est le même argument que brandirent les militaires argentins, si bien qu’il fut longuement réfuté par Luis Moreno Ocampo, alors adjoint du procureur durant le procès aux juntes (1985), qui expliquait que la logique qui le sous-tend mène à faire passer « les citoyens argentins de possibles victimes de la guérilla à de possibles victimes d’un système d’investigation qui commençait par la torture et finissait par la mort10 ».

Autre exemple, cette fois d’une méthodologie qui n’est pas clairement revendiquée par la DGR mais que Lartéguy présente comme valable : le viol. Dans Les Centurions, le commandant de Glatigny commet un viol car il « connut la fureur du désir. […] La fille luttait, mais de plus en plus mollement »11. Ce viol, jamais désigné comme tel dans le roman, a pour conséquence que sa victime, la jeune militante Aïcha, cède et affirme : « Je te dirai tout ce que je sais, tout, l’adresse de la cache des bombes et celle de Khadder la Vertèbre, qui les fabrique. »12 Ainsi, le roman évoque de manière plus que pudique la réalité des viols — très fréquents — des femmes algériennes par les troupes françaises13 et, dans le même temps, les justifie par une « passion » de l’officier et par les résultats dans l’obtention d’informations (nécessaire, selon le roman, pour éviter l’explosion de bombes qui tueraient des innocents). Nous savons que le viol fut une pratique très répandue dans les camps de concentration clandestins argentins et que les autojustifications des militaires qui les commettaient sont très similaires aux justifications exposées par Lartéguy14. Le roman a très probablement été un élément sur lequel les militaires les plus directement impliqués dans ce type de crime ont pu trouver justifications et soutien moral. Dans le roman, le viol n’est pas seulement moralement excusé par la « fureur du désir », il peut aussi être considéré comme une technique de renseignement efficace, puisque la militante ennemie cède (se quebra — se casse, selon la terminologie utilisée par les militaires argentins).

Trop longtemps négligés par les spécialistes, les produits culturels de masse ayant promu l’image des militaires français adeptes de la DGR devraient être analysés avec le plus grand sérieux, à la fois comme arme psychologique et comme exposition des principes de la DGR au grand public. Pour s’en convaincre, peut-être suffit-il de citer un officier argentin célèbre pour avoir mené plusieurs soulèvements militaires durant les années 1980, le lieutenant-colonel Aldo Rico15 : « Nous avons probablement quelques similitudes, en termes de savoir-faire dans le combat et de connaissances techniques et tactiques. Nous pouvons de plus avoir quelques ressemblances avec certains ou tous les membres du groupe de Lartéguy, que ce soit Esclavier, Boisfeuras, Marindelle ou Platigni. Peut-être que nous en rapprochons par notre effort pour comprendre profondément les racines de la guerre subversive que mène en Occident le marxisme soviétique, surtout d’un point de vue culturel et politique. »16

Jérémy Rubenstein.
Avec le soutien de Saudade (Montpellier) et CRIA (Buenos Aires)

  1. Marie-Monique Robin, Escadrons de la mort, l’école française, documentaire, Arte, 2003 ; et livre du même titre : La Découverte, Paris, 2004
  2. The US Army Marine Corps, Counterinsurgency Field Manual, préface de David H. Petraeus et James F. Amos, University of Chicago Press, Chicago, 2007.
  3. Jean Lartéguy (1920-2011), entré dans les forces de la France libre en 1943 (commando d’Afrique), poursuit ensuite une carrière militaire jusqu’à être blessé quand il est engagé dans les forces de la coalition dirigée par les États-Unis lors de la guerre de Corée. Il se reconvertit ensuite dans le journalisme de guerre avec un certain succès (prix Albert Londres en 1955) et il écrit plusieurs romans. Il accède à la notoriété en 1960 avec Les Centurions, roman célébrant la geste d’un groupe d’officiers parachutistes engagés dans la guerre d’Algérie, ce qui lui vaudra une place privilégiée dans l’espace médiatique français, où il sera souvent appelé à commenter les conflits armés au moins jusqu’à la fin des années 1970.
  4. Pour l’Argentine, voir par exemple Daniel Mazzei, « La misión militar francesa en la Escuela superior de guerra y los orígenes de la guerra sucia, 1957-1961 », Revista de ciencias sociales, n° 13, Universidad nacional de Quilmes, 2002 ; Gabriel Périès, « Un modèle d’échange doctrinal franco-argentin : le plan Conintes 1951-1966 », in Renée Fregosi (dir.), Armées et pouvoirs en Amérique latine, Éditions de l’IHEAL, Paris, 2004 ; Mario Ranalletti, « Una aproximación a los fundamentos del terrorismo de Estado en la Argentina : la recepción de la noción de “guerra revolucionaria” en el ámbito castrense local (1954-1962) », Anuario del Centro de estudios históricos, Córdoba, vol. 11, n° 11, 2011, p. 261-278.
  5. La paternité de cet adage est attribuée à Sir Gerard Templer, officier britannique en charge de la répression en Malaisie durant les années 1950 (voir Christian Olsson, « Guerre totale et/ou force minimale ? Histoire et paradoxes des “cœurs et des esprits” », Cultures & Conflits, n° 67, automne 2007).
  6. Dédicace de Jean Lartéguy, Les Centurions, Presses de la Cité, Paris, 1960, p. 4.
  7. Entre 1956 et 1962, on compte deux fois plus de publications qui traitent de la vie militaire que de la torture exercée par les militaires français (voir Nicolas Hubert, Éditeurs et éditions pendant la guerre d’Algérie, 1954-1962, Bouchène, Saint-Denis, 2012, p. 236).
  8. Ibid., p. 263-264.
  9. Voir par exemple, la fiche Wikipedia consacrée au « scénario de la bombe à retardement ». Pour une démonstration de l’inanité d’un tel « scénario », voir Michel Teretschenko, Du bon usage de la torture. Ou comment les démocraties justifient l’injustifiable, La Découverte, Paris, 2008.
  10. El Diario del Juicio , Perfil, n° 18, 24 septembre 1985, p. 6.
  11. Jean Lartéguy, Les Centurions, op. cit., p. 397.
  12. Ibid., p. 398. Cette scène du retournement de la militante suite au viol donne des idées à un autre officier qui, quelques pages plus loin, systématise la méthode : « Comment réveiller les femmes musulmanes, comment les amener à sentir que leur émancipation pourrait venir de nous ? Certainement pas en leur faisant des conférences féministes… Le capitaine eut alors cette idée que la plupart de ses camarades trouvèrent bizarre, déplaisante même. Il fit rafler le lendemain matin dans la Casbah un certain nombre de femmes et de jeunes filles musulmanes ; il en remplit trois camions et les conduisit à un lavoir. Là, il les obligea à laver les tricots de corps imprégnés de sueur, les slips et les caleçons des parachutistes. Ces femmes avaient été enlevées sans que les hommes de leur race interviennent. Ils perdirent ainsi leur prestige de guerriers, ce qui soudain rendit vaine la soumission ancestrale de leurs épouses et de leurs filles. Courbées pendant toute une matinée sur ce linge, elles avaient l’impression d’être soumises au viol infiniment répété des soldats dont elles purifiaient les vêtements. Lorsqu’elles revinrent à la Casbah sans avoir été molestées, quand ces hommes jeunes et forts les eurent aidées à descendre des camions avec une politesse qu’ils avaient tendance à exagérer (alors que souvent leurs fiancés ou leurs maris étaient vieux, débiles et grossiers), quelques-unes d’entre elles pensèrent à quitter le voile et d’autres qu’elles pourraient avoir des amants qui ne seraient pas des musulmans » (ibid., p. 408).
  13. Raphaëlle Branche, « Des viols pendant la guerre d’Algérie », Vingtième Siècle. Revue d’histoire, juillet-septembre 2002, n° 75, p. 123-132. L’auteure ne conclut pas à un programme systématique de viol, mais montre qu’il s’agit d’une pratique très répandue, sans que l’on puisse connaître son échelle exacte du fait d’un évident problème de sources qui est permanent – que ce soit en temps de paix ou de guerre. L’historienne n’a cependant trouvé aucun document officiel qui justifie le viol mais une impunité presque totale, puisque les viols sont rarement dénoncés devant des instances judiciaires militaires.
  14. Voir, entre autres, Débora d’Antonio, « Mujeres, complicidad y Estado terrorista », Cuaderno de trabajo, n° 33, Ediciones del Instituto movilizador de fondos cooperativos, 2003. Nous pouvons aussi recommander le film très troublant de Marcos Bechis, Garage Olimpo (1999), dont j’ai proposé par ailleurs une lecture : Jérémy Rubenstein, « Garage Olimpo de Marco Bechis. Une représentation synthétique des camps de concentration clandestins de la dernière dictature argentine », Bulletin de l’Institut Pierre Renouvin, vol. 25, n° 1, 2007, p. 131-142.
  15. Aldo Rico n’a pas été judiciairement mis en cause pour les crimes commis durant la dictature. Il est néanmoins emblématique pour notre propos car, d’une part, le premier soulèvement militaire contre l’ordre constitutionnel qu’il mène en 1987 a pour principal objectif d’obtenir l’impunité totale de ces crimes ; et, d’autre part, il a fait partie des commandos, une unité d’élite particulièrement imprégnée par l’enseignement de la DGR.
  16. Pablo José Hernandez, Conversaciones con el teniente coronel Aldo Rico. De Malvinas a la operación Dignidad, Editorial Fortaleza, Buenos Aires, 1989, p. 61.
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