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Mémorial du Quai Branly, l’esprit colonial est toujours vivace au cœur de l’Etat

Réagissant à la présence sur la colonne centrale du mémorial du quai Branly des noms des morts lors de la fusillade du 26 mars 1962 rue d’Isly, Anne Guérin-Castell a publié une série en trois volets sur le journal en ligne Médiapart. Elle précise qu’il ne s’agit pas de nier la réalité de ce qui s’est passé rue d’Isly ce jour-là1. Ce qu’elle dénonce dans cette série, ce sont «trois points très précis qui concernent directement Hubert Falco, secrétaire d'État à la Défense et aux Anciens Combattants :
  1. le fait que les noms des morts de la rue d'Isly soient inscrits sur la colonne centrale du mémorial du quai Branly : premier volet ;
  2. le fait que si des noms de victimes civiles de l'OAS étaient inscrits sur cette même colonne, rien ne viendrait renseigner sur les circonstances de leur mort, ces noms se retrouvant rangés par ordre alphabétique avec ceux des morts de la rue d'Isly : troisième volet;
  3. le fait que s'il était demandé que les noms des six inspecteurs dont l’assassinat est relaté dans le deuxième volet figurent sur cette colonne, seuls trois d'entre eux y auraient droit, avec éventuellement un quatrième, le secrétariat d’État à la Défense et aux Anciens Combattants excipant pour cela, sans aucune vergogne, d'un code de la nationalité d'essence raciste. »

Nous avions dénoncé en son temps le détournement mémoriel dont le monument du quai Branly avait été l’objet de la part du secrétaire d’Etat à la Défense et aux Anciens combattants (SEDAC). Des différents aspects du scandale pointé par le beau travail d’Anne Guérin-Castell, retenons la permanence au secrétariat d’Etat d’une conception raciste de la nationalité.

En février 2010, Jean-François Gavoury, président de l’Association nationale pour la protection de la mémoire des victimes de l’OAS (Anpromevo), rencontre Hervé Oudin, alors directeur adjoint du cabinet du SEDAC. Il obtient des précisions à propos de l’annonce par Hubert Falco le 5 décembre 2009 de l’inscription sur la colonne centrale du mémorial des noms de «civils français, victimes innocentes de la guerre d’Algérie».

Il en ressort que ne pourront bénéficier de cet hommage que des personnes ayant trouvé la mort hors de métropole, et surtout que le qualificatif «français» désigne des “Français d’origine européenne” ou admis à la qualité de citoyens français (à l’exclusion des “sujets”).

L’exemple des six inspecteurs des centres sociaux éducatifs créés par Germaine Tillion, collectivement massacrés, sur leur lieu de travail et dans l’exercice de leurs fonctions, par un commando de l’OAS, le 15 mars 1962 à Alger, à la veille de la signature des accords d’Évian est révélateur – voir le second volet – : trois d’entre eux, Marcel Basset, Robert Aimard et Maxime Marchand, pourraient figurer sur la colonne centrale, à condition que leurs dossiers soient validés par les services du SEDAC, tandis que Ali Hammoutène et Mouloud Feraoun en sont exclus d’office ; quant au dernier, Salah-Henri Ould Aoudia, dont le père, Boudjemâ-Benjamin Ould Aoudia, avait été admis à la qualité de citoyen français par jugement du TGI de Tizi-Ouzou, son cas devrait être minutieusement examiné.

Quarante-huit ans après la fin de la colonisation la politique mémorielle du gouvernement continue à s’inspirer d’une conception coloniale de la nationalité !

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Comme Anne Guérin-Castell l’écrit à la suite de son troisième volet, «il ne s’agit pas de revendiquer en dressant les morts contre les morts, en opposant une blessure à une autre blessure. Mais d’essayer de stopper cette progression insidieuse des sympathisants de l’OAS qui ne cessent de maquiller l’Histoire à leur profit». De mettre un coup d’arrêt à cette progression du négationnisme concernant la guerre d’Algérie.

Henri Pouillot a répertorié les villes où se sont déroulées des manifestations pro-Algérie Française ou pro-OAS : il en a dénombré 57, sans compter les cérémonies d’hommages rendus aux anciens de l’OAS sur leurs tombes (Salan, Bastien-Thiry, Degueldre, Piegts, Bazin, Jouhaud …)

Parmi ces villes, Toulon, dont Hubert Falco est maire depuis bientôt dix ans, et qui chaque soir fait bénéficier d’un éclairage tricolore un monument qui a été érigé en l’honneur de Roger Degueldre, le chef des commandos delta de l’OAS responsable de l’assassinat le 15 mars 1962 des six inspecteurs des centres sociaux éducatifs.

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