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Édition du 15 novembre au 1er décembre 2024
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Gerboise bleue, film de Djamel Ouahab

Gerboise Bleue1 raconte l’histoire des vétérans français et des Touaregs algériens victimes des premiers essais atomiques français dans le Sahara de 1960 à 1966. Pour la première fois, les derniers survivants témoignent de leurs combats pour la reconnaissance de leurs maladies, et révèlent dans quelles conditions les tirs se sont véritablement déroulés. La section de Toulon de la LDH organise une projection du film, suivie d’un débat, jeudi 9 avril à 20 h, au cinéma Le Royal. Le débat sera animé par Georges Reynier, représentant en PACA de l'AVEN (Association des vétérans des essais nucléaires), sur le thème :
Essais nucléaires français du Sahara :
le désert n'était pas inhabité

Une affichette de présentation téléchargeable : http://www.ldh-toulon.net/IMG/pdf/affichette_gerboise_bleue.pdf.
[Mise en ligne le 29 janvier, mise à jour le 31 mars 2009]

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Gerboise bleue, premier essai atomique français effectué le 13 février 1960 dans le Sahara à Reggane en Algérie, est le point de départ de la puissance nucléaire de la France. Il s’agit de tirs aériens radioactifs puissants effectués dans des zones appartenant à l’armée française, l’Algérie étant à l’époque un territoire français. Suivront des essais souterrains, et ce même après l’indépendance de l’Algérie.

De 1960 à 1978, 30 000 personnes auraient été exposées dans le Sahara. L’armée française a reconnu officiellement neuf irradiations. Aucune plainte contre l’armée ou le Commissariat à l’Energie Atomique n’a abouti. Trois demandes de commission d’enquête ont été rejetées par la commission de la défense nationale.

Partant à la rencontre des protagonistes de cet épisode de l’histoire coloniale, classé encore « Secret défense », le réalisateur franco-algérien interroge la mémoire de ceux qui ont vécu ces essais en atmosphère (d’une puissance quatre fois supérieure à Hiroshima) et qui, depuis, en subissent les conséquences dans leur chair. Vétérans français et Touaregs nous racontent comment les tirs se sont réellement déroulés, dans le mépris total des normes les plus élémentaires de sécurité. Et comment la République française, n’ayant reconnu officiellement que 9 cas d’irradiation, a, jusqu’en 2008, refusé toute responsabilité dans les différentes maladies développées depuis lors, aussi bien par les anciens appelés de retour chez eux que par les populations locales demeurées sur place.

Suite à la mobilisation de l’AVEN (Association des Vétérans des Essais nucléaires crée en 2001), un projet de loi concernant l’indemnisation des victimes sera enfin discuté au Parlement dans les prochaines semaines. Cependant, ce projet restant très en retrait de ses revendications initiales, l’AVEN, qui s’associe à la sortie du film, a décidé d’amplifier son action afin d’obtenir une véritable loi de reconnaissance.

Calendrier de la programmation (partiel)

  • Paris (Espace St Michel) : à partir du 11 février.
  • Bobigny (Magic Cinéma) : du 11 au 17 février.
  • Brest (Le Studio) : du 11 au 17 février.
  • Lyon (CNP Terreaux) : du 11 février au 3 mars.
  • Marseille (Les Variétés) : du 11 au 24 février.
  • etc…
  • La section de Toulon de la LDH organise une projection du film, suivie d’un débat, le jeudi 9 avril à 20 h, au cinéma Le Royal.

La programmation de Gerboise Bleue pour la semaine cinématographique en cours :
http://www.allocine.fr/seance/filmcp_gen_cprojection=147777.html.

Pour organiser des projections-débats, contacter le 01 42 55 07 84 ou le 01 42 87 33 96, ou ">Philippe Hagué.

Gerboise bleue : un document à charge sur les essais nucléaires français en Algérie, avant et après l’indépendance du pays

par Jacques Mandelbaum, Le Monde du 11 février 2009

Sous le nom de code militaire évoqué par le titre de ce film, se cache le premier essai nucléaire français mené dans le Sahara algérien. Il a lieu le 13 février 1960, à Reggane. Le tir est aérien, sa puissance est quatre fois supérieures à la bombe d’Hiroshima. Trois autres tirs – intitulés « Gerboise blanche », « rouge » et « verte » – suivront rapidement.

Par la suite, y compris après l’indépendance de l’Algérie, en 1962, et selon une clause secrète des accords d’Evian, treize autres essais auront lieu jusqu’en 1967. Ils sont cette fois souterrains, parmi lesquels le tir « Beryl » qui échoue et libère le 1er mai 1962 un nuage radioactif contaminant tous les soldats présents sur le site d’In-Eker, à une centaine de kilomètres au sud de Reggane.

Ces faits – ils ont donné lieu à des enquêtes restées méconnues -, le réalisateur Djamel Ouahab nous les remet en mémoire moins pour sonder un épisode du colonialisme dont ils témoignent que pour évoquer un scandale qui se perpétue.

Ce scandale est de deux ordres. Le premier est que cette zone d’essais, pas aussi inhabitée qu’on voudrait le croire, ne fut pas décontaminée par l’armée française lors de son départ et que le gouvernement algérien n’a visiblement pas pris non plus cette tâche à coeur.

Exposés aux radiations

Le second est qu’il existe aujourd’hui, selon toute apparence, des victimes de cette exposition aux radiations, qui se trouvent tant dans la population touareg que chez les appelés du contingent français qui stationnèrent sans aucune protection sur ces sites. Le film s’appuie essentiellement sur le témoignage de deux anciens soldats, Lucien Parfait et Gaston Morizot. Le premier, présent lors du tir « Beryl », est aujourd’hui énucléé et à moitié défiguré, et continue de subir des opérations chirurgicales.

Le second, avec un poumon irradié et un vieillissement prématuré de la moelle épinière, vit continuellement sous morphine et antidépresseurs. Aux paroles de ces hommes physiquement brisés, et moralement humiliés de n’avoir jamais obtenu réparation du gouvernement français, s’oppose celle de Jean-François Bureau, porte-parole du ministère de la défense en 2007, qui fait état de la difficulté à mettre scientifiquement en corrélation l’exposition aux radiations et l’apparition des maladies.

Cette question de la preuve se révèle centrale, non seulement sur le plan juridique, mais aussi pour le film, selon qu’on la juge déterminante ou non. Dans le premier cas, il sera loisible de juger le film trop compassionnel, pas assez argumenté, ne recourant pas suffisamment à l’arbitrage des experts. Dans le second, faute de pouvoir susciter cette preuve, il convient de s’en remettre à la parole, serait-elle faillible, des témoins. Dans ce dernier cas, Gerboise bleue – à l’instar du documentaire d’Agnès Fouilleux consacré à la politique française dans les Comores sorti le 4 février (Un aller simple pour Maoré) – constitue une nouvelle pierre dans le jardin politique à la française.

Jacques Mandelbaum

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