Depuis les années 2000, l’histoire et la mémoire liées à l’ère coloniale ne cessent de bousculer une actualité française marquée par la diffusion des idées d’extrême-droite et le contexte politique a été marqué récemment par l’adoption d’une loi sur l’immigration dont l’idéologie héritée de l’ère coloniale constitue le soubassement.
Le 16 février 2024, au siège de la Ligue des droits de l’Homme (LDH), l’association Histoire coloniale et postcoloniale a organisé à l’occasion de la présentation de son nouveau site une table ronde en partenariat avec Mediapart. Sont intervenus Nathalie Tehio, qui représentait la direction de la LDH, Edwy Plenel, cofondateur de Mediapart, Aïssata Seck, directrice de la Fondation pour la mémoire de l’esclavage (FME), Michèle Riot-Sarcey, historienne et cofondatrice du Comité pour la vigilance face aux usages publics de l’histoire (CVUH) ainsi que Fabrice Riceputi et Alain Ruscio, historiens et membres de l’équipe de notre site.
Après une présentation de l’histoire du site histoirecoloniale.net – accompagnée d’une intervention filmée de l’éditeur François Gèze, qui en avait été un acteur essentiel, disparu en août 2023 – et de sa nouvelle formule, ils ont échangé sur la nécessité d’apporter des connaissances sur l’histoire coloniale et les différentes formes de racisme et de discriminations qui en sont des héritages.
On notait notamment la présence de Christian Travers de l’Association des anciens appelés en Algérie et leurs amis contre la guerre (4ACG), Claude Pennetier du dictionnaire en ligne le Maitron, Roland Laffitte de la Société des études saint-simoniennes, Samia Messaoudi de l’association Au nom de la Mémoire, Sarah Benilman de Mazal Podcast, Dominique Sopo de SOS Racisme, Jacques Venuleth et Corinne Coloneaux du Mrap, Jean-Philippe Ould Aoudia de l’Association Max Marchand, Mouloud Feraoun et leurs compagnons, Christian Mahieux de l’Union syndicale Solidaires, Farid Yaker du Forum France-Algérie, ainsi que des représentantes de l’association Le Maghreb des films.
Nous en présentons ci-dessous de premiers échos, à travers des extraits des interventions de Michèle Riot-Sarcey, Aïssata Seck, Alain Ruscio et Edwy Plenel.
Michèle Riot-Sarcey, historienne.
« Le drame actuel c’est l’oubli. L’amnésie a contribué à l’oubli, il a été construit. Il est impossible de se projeter dans un avenir si on oublie le passé. »
Aïssata Seck, directrice de la Fondation pour la mémoire de l’esclavage.
« Moi, petite fille de tirailleur sénégalais, j’ai appris très tard, trop tard, l’histoire de la colonisation. Il faut offrir à un public large les éléments pour comprendre cette histoire. L’actualité nous rappelle chaque jour qu’il est essentiel de la restituer. »
Alain Ruscio, historien.
« Notre rôle est de lutter contre l’oubli et contre les idées fausses qui paraissent évidentes, le “bon sens” dirait Emmanuel Macron. Par exemple, on ne parle jamais de l’origine de la crise à Mayotte. La partition des Comores est le résultat d’une politique coloniale où la France à choisi ses “bons colonisés”. »
Edwy Plenel, Journaliste cofondateur de Médiapart.
« La persistance de l’idéologie coloniale n’est pas une fatalité. Au Portugal, la révolution des œillets. Une armée coloniale a renversé une dictature. C’est l’inverse de la catastrophe française du regain des idées coloniales à partir des années 1970. La question coloniale nous déplace. »
Un problème technique ne nous a pas permis de publier l’intervention initiale d’Edwy Plenel ni celle de Fabrice Riceputi, en visio depuis Besançon. Nous nous en excusons.