Wallis : l’aéroport pris d’assaut puis libéré par les proches du roi
L’île de Wallis est restée plusieurs heures coupée du monde hier, après la prise d’assaut de l’unique piste d’atterrissage par des partisans du lavelua. Leur but, empêcher l’arrivée de renforts de gendarmerie alors que, dimanche, un nouveau roi pourrait être intronisé.
C’est un week-end sous haute tension qui s’annonce à Wallis, avec la crainte de heurts entre les partisans du vieux roi, Tomasi Kulimoetoke, et ceux qui veulent le destituer. Hier en milieu de journée, les partisans du lavelua ont bloqué la piste de l’aéroport en y installant des dizaines de pick-up, des monticules de terre et autres gravats. Ils ont évacué les lieux dans la soirée à la suite de négociations, mais la remise en état de la piste devrait prendre un certain temps. Des barrages installés un peu partout sur les routes ont paralysé l’essentiel de l’île, obligeant les écoles et les services publics à fermer leurs portes.
Déjà dans la soirée de mercredi, des incidents étaient intervenus aux abords de l’aéroport entre adversaires et partisans du roi menacé de destitution. Les partisans du lavelua craignaient un envoi de renforts de gendarmerie pour les empêcher de perturber la cérémonie d’intronisation d’un nouveau roi prévue dimanche dans le nord de l’île..
Les gendarmes sur place ont repris dans la nuit de mercredi à jeudi le contrôle de la zone aéroportuaire. Un premier renfort de gendarmes mobiles a été expédié depuis Nouméa pour prévenir les velléités d’affrontement.
Nouveaux renforts ?
Craignant l’arrivée de nouveaux renforts, les partisans du lavelua, qui comptent dans leurs rangs de nombreux anciens militaires, ont mené jeudi vers midi une opération éclair pour s’installer en nombre sur l’unique piste d’atterrissage de l’île. Jonchée de gravats et encombrée de véhicules, la piste est devenue impraticable. Du coup, Aircalin a fermé son agence. Les manifestants se sont retirés dans la soirée à la suite de négociations. Selon nos sources, il y aurait actuellement entre 150 et 200 gendarmes en position à Wallis (contre une vingtaine en temps normal). Cet effectif sera-t-il suffisant pour empêcher d’éventuels affrontements entre les deux camps rivaux ? Des renforts sont-ils en route pour rétablir l’ordre et la libre circulation ? Les partisans de la rénovation renonceront-ils à la cérémonie de dimanche sous la menace des armes ?
Manif à Nouméa en faveur du roi
Hier à Nouméa, une manifestation en faveur du vieux roi a déroulé son cortège dans les rues entre le parking de la Moselle et le haussariat où une délégation a été reçue. Selon la police, cette manifestation a rassemblé entre 500 et 600 personnes. Mais les organisateurs, eux, affirment en avoir compté près de 5 000. La plupart des observateurs s’accordent autour d’une estimation d’environ 600 à 700 personnes. En tout cas, l’escalade des chiffres donne la mesure de l’exacerbation des passions autour de la crise de régime que traverse Wallis.
En bonne place dans le cortège des manifestants de Nouméa, Aloisio Sako et les autres chefs coutumiers de la communauté wallisienne installée en Calédonie. « Nous ne reconnaissons qu’un seul roi ! Nous voulons que l’Etat respecte notre culture dont le lavelua est le garant ! »
Ph.F.
Wallis : les fidèles du roi estiment la crise terminée
A la tête d’une délégation de coutumiers wallisiens de Nouvelle-Calédonie, Aloisio Sako est allé soutenir le Lavelua à quelques jours de sa possible destitution. Une initiative dénoncée par le MUR et Tino Manuohalalo.
« La soi-disant crise est pratiquement terminée. Les chefs coutumiers wallisiens de Nouvelle-Calédonie se sont rendus à Wallis. Nous en revenons. Nous avons été reçus par sa majesté Tomasi Kulimoetoke, par la grande chefferie, et nous pouvons dire que la population reste fidèle au Lavelua dans sa grande majorité. Il n’y aura pas de destitution et pas de nouveau roi. » Voilà en substance le message martelé par Aloisio Sako et les chefs coutumiers wallisiens depuis leur descente d’avion.
Un message qui pèse un poids certain auprès de la population wallisienne de Nouvelle-Calédonie, qui s’est organisée et hiérarchisée en répliquant à l’identique les institutions coutumières de Wallis. Des chefs de villages, trois chefs de districts (les Faipule) car Wallis est subdivisé en trois districts, et un représentant du roi.
Conflit foncier en toile de fond
Or cette hiérarchie bis a pris résolument fait et cause pour le vieux roi et son entourage, et accuse la chefferie dissidente, soutenue par l’administration française, de semer inutilement la division. « La vérité, c’est que pour destituer le roi, il y a toute une procédure coutumière, qui est loin d’avoir abouti. Quelques prétendants se sont manifestés et ont voulu rencontrer le roi, mais ils ont été refoulés par sa fille », affirme Aloisio Sako.
« Quant aux intentions séparatistes ou indépendantistes que l’on prête au Lavelua pour justifier ce complot, elles n’ont aucun sens. Je rappelle que c’est lui qui, en 1961, a été signataire de l’acte par lequel Wallis est passé du statut de protectorat à celui de territoire français, ajoute le chef calédonien du district de Hihifo. Quant à sa fille, si décriée, c’est une femme admirable qui s’occupe de son vieux père avec un dévouement auquel je rends hommage. »
La vérité, selon Aloisio Sako, « c’est qu’il y a des intérêts fonciers en jeu derrière tout ça, que le Lavelua est gardien de la coutume et exerce l’autorité en matière foncière, et que certains veulent s’en débarrasser. L’Etat français n’est pas neutre dans cette affaire puisqu’il soutient et finance la grande chefferie dissidente. Il doit cesser cette ingérence dans les affaires coutumières. Je crois que notre visite, ainsi que l’action de Saint-Pierre Chanel, notre Saint-Pasteur, ont fait souffler un vent de sagesse sur Wallis. Il faut bien comprendre que le Lavelua a servi son pays pendant 46 ans, il doit pouvoir vieillir en paix sur son trône. Nous l’enlever, ce serait nous amputer. »
Le comité de soutien au Lavelua organisera une manifestation à Nouméa demain jeudi.
Ph.F.
Crise à Wallis : une délégation calédonienne s’envole aujourd’hui
Une délégation de la chefferie wallisienne de Nouvelle-Calédonie s’envole aujourd’hui pour Wallis, pour participer, ce week-end, à deux réunions organisées par le roi, Tomasi Kulimoetoke, et sa chefferie.[…]
« Nous entendons beaucoup de choses au sujet de la crise qui affecte actuellement Wallis, et nous pensons qu’il est très important d’aller sur place pour nous rendre compte de la situation réelle. Le roi a eu une excellente idée de nous inviter en urgence, précise Aloisio Sako. Mais l’objectif est aussi de trouver des solutions pour sortir de cette crise, et de tout remettre dans l’ordre. »
Il faut dire que la situation est loin d’être simple à Wallis. Les dissidents du roi, qui lui reprochent notamment d’avoir voulu expulser l’Etat français, pour protéger son petit-fils condamné pour homicide involontaire, ont effet procédé à sa destitution, le 14 mai dernier.
Ces familles royales, opposées au roi, ont aussi installé une nouvelle grande chefferie, et envisagent d’introniser un nouveau lavelua (roi) le 25 septembre. Une attitude que condamne la grande chefferie de Nouvelle-Calédonie. « Nous soutenons le roi, comme d’ailleurs la majorité de la population de Wallis ! »
Wallis : les dissidents vont introniser un nouveau roi
La crise institutionnelle que traverse Wallis se déplace en Nouvelle-Calédonie. Les dissidents du roi Tomasi Kulimoetoke sont actuellement en mission sur le territoire pour donner leur version des faits et annoncer qu’un nouveau roi serait intronisé le 25 septembre.
« Pour éviter à l’institution coutumière de demeurer orpheline, la nouvelle grande chefferie propose l’intronisation d’un nouveau roi qui se tiendra le dimanche 25 septembre à Wallis. » Cette annonce a été faite hier matin par les dissidents du roi Tomasi Kulimoetoke, actuellement en « mission d’information » en Nouvelle-Calédonie. Un nouvel épisode de la crise coutumière qui affecte le royaume de Wallis depuis 2004. Point d’orgue de cette crise : l’attitude du roi après la condamnation de son petit-fils pour homicide involontaire.
Conflit avec la justice
« En mai 2005, la grande chefferie a mis en application la décision du roi consistant à supprimer la peine d’emprisonnement de Tomasi Tuugahala. Elle a même menacé d’expulser le préfet, le président du tribunal et le procureur dans le cas contraire », rappellent les dissidents. « N’ayant pas pu convaincre les autorités administratives et judiciaires, qui n’ont pas cédé au chantage, la grande chefferie s’est alors attaquée à l’assemblée territoriale pour donner l’ordre aux élus de fermer les portes du bâtiment public. »
Le roi destitué
Cette intrusion des coutumiers dans le pouvoir politique n’a pas vraiment été appréciée par les élus, ni par certaines familles royales qui décident alors d’apporter leur soutien au préfet.
Ces familles vont même plus loin. « Face à la gravité de l’action du lavelua (le roi) et de son entourage », elles procèdent à la destitution du roi le 14 mai. Un mois plus tard, ces familles royales et la population soutenant le préfet décident d’installer une nouvelle grande chefferie composée de six ministres et de trois chefs. C’est donc une délégation de cette nouvelle équipe, celle des « rénovateurs », qui est venue à la rencontre de la communauté wallisienne de Nouvelle-Calédonie.
« Nous voulons leur dire que nous ne sommes pas pour la destruction de la coutume, bien au contraire, mais que nous pensons que l’avenir de la population doit être avec la France », explique Clovis Logologofolau, nouveau premier ministre coutumier.
Faire évoluer le statut
« Vouloir expulser l’Etat français nous semble une faute grave et une démarche aux visées indépendantistes. Notre statut a certes besoin d’être réformé pour être adapté aux exigences de la vie moderne. Ce sera d’ailleurs le pari du futur roi ! »
Le roi de Wallis affirme sa fidélité à la France
Le roi de Wallis (Lavelua) dans l’archipel de Wallis et Futuna affirme mercredi dans un communiqué son « appartenance patriotique indéfectible à la France » malgré le conflit qui l’oppose au préfet de l’archipel.
Tomasi Kulimoetoke, vieux roi de Wallis âgé de 86 ans et au pouvoir depuis 1959, assure « qu’aucune déclaration ou démarche hostile à la France ne s’était manifestée » et met en cause « les provocations et une campagne de dénigrement de Xavier de Fürst« , administrateur supérieur de Wallis et Futuna.
« La mutation de sa personne [M.de Fürst, ndlr] a été souhaitée et non la renonciation à la France« , ajoute le Lavelua.
Le roi de Wallis et sa grande chefferie, composée de six « ministres », sont en conflit avec l’Administration depuis qu’ils ont demandé en mai dernier à Xavier de Fürst ainsi qu’au président du tribunal et au procureur de quitter l’archipel pour protester contre plusieurs décisions judiciaires.
Le roi et ses partisans entendaient faire prévaloir la justice coutumière sur le droit français.
Leur attitude avait provoqué une scission au sein des familles « royales » dont une partie a engagé une procédure de destitution de Tomasi Kulimoetoke et désigné une nouvelle grande chefferie.
En juin, des heurts entre les deux camps rivaux avaient fait un blessé grave et un peloton de gendarmerie de Nouvelle-Calédonie est maintenu sur place.
« Nous proclamons qu’être loyal envers l’Etat ne signifie nullement lui être inféodé et renoncer à notre droit coutumier« , affirme également le Lavelua.
Territoire français d’Outre-mer le plus éloigné de la métropole, Wallis et Futuna comptent quelque 15 000 habitants, dont le mode de vie repose sur les valeurs de la coutume et de la religion catholique, et qui sont en même temps très attachés à leur appartenance à la République française.
La France reconnaît le pouvoir des trois rois (le Lavelua à Wallis, le Tuisigave et le Tuiagaifo à Futuna), et gère cet archipel du Pacifique sud en concertation avec les autorités traditionnelles.
Crise à Wallis : apaisement après la reddition du petit-fils du roi
Le petit-fils du roi de Wallis, condamné à une peine de prison ferme mais retranché depuis plusieurs mois au palais royal, s’est rendu à la justice, permettant un apaisement entre les coutumiers et l’administration, a-t-on appris mercredi de source officielle.
« Le calme est revenu et les esprits se sont apaisés« , a déclaré à l’AFP Xavier de Fürst, administrateur supérieur de l’archipel de Wallis et Futuna.
« Il y avait deux affaires symboles dans cette résistance au respect du droit, qui étaient la fuite du petit-fils du roi et l’occupation illégale depuis 11 mois d’une entreprise. Ces problèmes ont été réglés mardi dans le calme« , a-t-il précisé.
La reddition de Tomasi Tuugahala, petit-fils du Lavelua, est intervenue au terme d’une médiation des gendarmes de Nouvelle-Calédonie, appelés en renfort à la suite d’une montée de la tension dimanche entre partisans et adversaires du Lavelua.
Le prévenu est arrivé mardi par avion militaire à Nouméa où il a été incarcéré car il n’existe pas de prison à Wallis et Futuna.
Depuis quatre mois, Tomasi Tuugahala était retranché dans le palais royal pour échapper à une peine de 18 mois de prison ferme pour homicide involontaire, à la suite d’un accident de la route en état d’ébriété.
Cette condamnation, en février dernier, avait par ailleurs révoqué le sursis d’une précédente peine d’un an de prison.
Là-bas vivent les derniers rois de France
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Wallis-et-Futuna est, avec la Polynésie française et la Nouvelle-Calédonie, le troisième territoire français du Pacifique-Sud.
Le territoire est constitué de deux archipels : d’une part, l’île Wallis 2, appelée Uvea par les insulaires (81 km²), d’autre part, à 240 km au sud-ouest de Wallis, les îles Futuna (64 km²) et Alofi (51 km²). L’archipel est situé à 2 100 km au nord-est de la Nouvelle-Calédonie, à 3 200 km de la Polynésie française, et à 22 000 km de Paris. La langue officielle est le français, mais les insulaires d’origine parlent des langues polynésiennes.
Wallis-et-Futuna compte environ 15 000 habitants, dont 400 métropolitains. Les deux tiers de la population habitent à Wallis. Il faut noter l’importance de l’émigration, notamment vers la Nouvelle-Calédonie : d’après le recensement de 1996 plus de 17 000 Wallisiens et Futuniens 3 s’y étaient installés depuis 1961 (surtout dans la région de Nouméa). On compte davantage de Wallisiens et de Futuniens hors du territoire qu’à l’intérieur du territoire.
Histoire
L’archipel a été visité par des navigateurs hollandais et anglais à partir du XVIIème siècle. Mais on ne note pas de présence européenne notable avant le XIXème siècle et l’implantation de missions catholiques françaises (pères maristes) qui convertirent rapidement les habitants.
En 1842, les autorités du territoire firent une première demande de protectorat à la France. Cette demande ne fut ratifiée qu’en 1887. Le traité signé consolidait les positions françaises dans le Pacifique, tout en assurant protection aux Wallisiens et Futuniens en cas de conflit.
En 1959, les habitants de l’archipel choisissent par referendum, à une très large majorité (94,3 % des suffrages exprimés), de devenir Territoire d’Outre-mer. Le statut du territoire est fixé par la loi du 29 Juillet 1961.
Le chef du territoire – « l’administrateur supérieur » – est nommé par Paris.
L’organisation coutumière, respectée par la République, distingue trois royaumes : celui d’Uvéa à Wallis et ceux d’Alo et de Sigave à Futuna. Chaque roi est détenteur de l’autorité coutumière pour son royaume. L’archipel envoie un député et un sénateur au parlement de la République.
Jusqu’à ces derniers temps, Wallis-et-Futuna semblait n’avoir connu aucun mouvement autonomiste. Les Wallisiens et les Futuniens ont conservé leurs traditions polynésiennes. Dans ce territoire français d’un autre monde, l’Église et la monarchie se partagent le pouvoir : la coutume des clans et les conflits familiaux supplantent aisément les usages politiques de la Métropole. De plus, la petite aristocratie locale bloque toute réelle modernisation, mais elle profite largement des subventions métropolitaines, qui sont considérables et impossibles à chiffrer avec précision.
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- Sources utilisées : une page de l’université Laval de Québec
et le Ministère de l’Outre-mer
- Du nom du premier marin qui la découvrit en 1767, le Capitaine Samuel WALLIS.
- Soit 9 % de la population totale de la Nouvelle-Calédonie.
- Voir l’article de l’Université Laval cité ci-dessus.