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Édition du 15 novembre au 1er décembre 2024

Copé demande la suppression du “droit du sol”

Aujourd'hui, un enfant né en France de parents étrangers peut acquérir automatiquement la nationalité française à sa majorité s'il réside dans le pays depuis cinq ans. Ce droit que l'on désigne par l'expression “droit du sol”, favorise l'intégration des enfants d'étrangers. Il fait partie des valeurs de notre pays où, comme le rappelle l'ancien ministre UMP Patrick Devedjian, « plus de 25 % des Français ont au moins un grand-parent de nationalité étrangère ». A partir des années 1980, la plupart des pays européens l'ont adopté. Jean-François Copé, président de l'UMP, va déposer une proposition de loi pour mettre fin à cette acquisition automatique de la nationalité française pour des enfants nés en France de parents étrangers en situation irrégulière. Il demande également la suppression de l'Aide médicale d'État, un dispositif datant de 1999 dont l'objectif est avant tout de santé publique. En reprenant ces propositions, qui figurent dans le programme du Front national, Jean-François Copé contribue à entretenir la xénophobie ambiante.

Pierre Henry, directeur général de France Terre d’Asile :

“La proposition de Copé fabriquerait des apatrides”

Pierre Henry, le directeur général de l’association France Terre d’Asile, a répondu aux questions du Nouvel Observateur1.

par Claire Béziau, lei 22 octobre 2013, Le Nouvel Observateur

  • L’UMP entend présenter d’ici à la fin de l’année une proposition de loi réformant le droit du sol et prévoyant la fin de l’acquisition automatique de la nationalité pour les enfants nés en France de parents étrangers. Concrètement, qu’est-ce qu’impliquerait une telle loi ?

Aujourd’hui, un jeune dans cette situation a la possibilité, avec le consentement de ses parents, de demander la nationalité française à l’âge de 13 ans, (sous condition de résider habituellement en France depuis l’âge de 8 ans, ndlr) et sans autorisation parentale à l’âge de 16 ans (s’il réside en France et s’il a eu sa résidence habituelle en France pendant une période continue ou discontinue d’au moins 5 ans, depuis l’âge de 11 ans, ndlr).

Une telle proposition de loi supposerait de marquer ces enfants d’une tache indélébile, à partir du moment où leurs parents sont entrés illégalement sur le sol français. Mais ces enfants auraient grandi et été scolarisés sur le sol français. Alors qui seraient-ils, quelle nationalité auraient-ils ? Cette proposition est simplement monstrueuse. Elle consiste à nier toute identité à des enfants nés de parents étrangers en France, elle consiste à fabriquer des apatrides.

C’est également une absurdité : un enfant de 13 ans né en France et qui demande l’accès à la nationalité française, cela suppose que même si ses parents sont entrés dans le pays en situation irrégulière, ils ont vu, depuis, leur situation régularisée. Il y a très peu d’étrangers qui restent en France entre 13 et 16 ans en étant en situation irrégulière.

Cette proposition hystérise la société au lieu de la rassembler.

  • Jean-François Copé évoque plus largement « une nouvelle politique de l’immigration » avec notamment la suppression de l’AME (Aide médicale d’Etat) pour les immigrés. Quelle conséquence aurait cette mesure ?

C’est ahurissant. Il y a 4,5 millions Français à la CMU, qui touchent moins de 716 euros par mois (ndlr, pour une personne seule), et 200.000 étrangers en situation irrégulière touchent l’AME selon le même seuil de ressources. Mais il ne s’agit pas de la même couverture. Vouloir la supprimer revient à une aberration sur le plan sanitaire. On s’attaque toujours aux plus faibles.

  • Symboliquement, qu’est-ce qu’une telle proposition dit de l’UMP ? Est-ce une stratégie politique ou une véritable radicalisation et un rapprochement avec le FN ?

L’UMP sort du pacte de solidarité qui fonde notre nation. Il faut que chacun reprenne ses esprits, au risque d’aller droit dans le mur. Il est urgent que chacun se ressaisisse.

Il s’agit d’une surenchère insupportable, qui n’est plus de la tactique. On est dans la « Buissonnisation » totale de la droite. Sur le fond, ce que ça prépare, c’est une alliance UMP-FN. Jean-François Copé y est déjà.

Communiqué LDH

Paris, le 24 octobre 2013

Jean-François Copé, la main sur le berceau

Après l’enrôlement sauvage des petits pains au chocolat, Jean-François Copé lance une OPA sur les berceaux. La Ligue des droits de l’Homme s’oppose avec force à ce retour particulièrement détestable du débat sur l’identité nationale. Lancé par Nicolas Sarkozy pour ne pas laisser au Front national le « monopole » de la nation, rejeté par une opinion publique inquiète de voir ouvrir une boîte de Pandore, ce dont l’extrême droite avait immédiatement fait son miel, le débat ressurgit sous la forme d’une nouvelle provocation qui bénéficie de l’approbation des hiérarques de l’UMP, dont Francois Fillon, décidément de moins en moins « sectaire ».

Cette sortie a le mérite de clarifier les enjeux : alors que la France se démène dans des difficultés d’ampleur, dans les domaines de l’emploi, de la santé, du logement, alors que l’actualité fait la démonstration de l’inhumanité des lois sarkozystes sur les étrangers et de la stupidité qu’il y a, pour un gouvernement de gauche, à vouloir « bien appliquer » ces mauvaises lois, le premier parti de l’opposition affiche sa priorité : « purifier » le processus de naturalisation, en le débarrassant des enfants nés sur le sol français de parents étrangers en situation illégale. Pour la plus grande joie du Front national, auquel il l’a emprunté.

En inscrivant d’emblée une génération d’enfants dans une situation précaire, en signifiant qu’elles et ils sont aussi indésirables que leurs parents, les propos de Jean-François Copé fabriqueront de futurs apatrides dès le berceau. La LDH rappelle qu’il s’agit d’un extraordinaire mépris de la situation juridique actuelle, et d’une ignorance des conventions internationales ratifiées par la France. Enfin, on ne peut que s’interroger sur l’opportunité de propos qui sont très éloignés des besoins exprimés par les Françaises et les Français, pour peu qu’elles et ils soient interrogés de façon comparative.

L’objectif revendiqué de la « lutte contre le communautarisme » est destiné à engager un processus dont nul ne peut dire à la porte de qui il s’arrêtera. Il vise surtout, encore et toujours, à s’approprier les thématiques de l’extrême droite pour tenter d’en capter l’électorat. Une stratégie dont le Front national n’a eu jusqu’à présent qu’à se féliciter, puisqu’elle n’aboutit qu’à renforcer et ses thèmes, et son enracinement.

La LDH attend de l’opposition parlementaire qu’elle s’honore en désavouant les propos du secrétaire général de l’UMP, tant ils sont éloignés et des valeurs de la République, et des urgences auxquelles se confrontent la plupart de celles et ceux qui vivent et travaillent dans notre pays.

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Lire également, sur le site du Monde : Quatre questions sur l’immigration.

  1. Lire également le communiqué du 23 octobre 2013 de France Terre d’Asile : http://www.france-terre-asile.org/component/flexicontent/124-slider/9086-cpdroit-du-sol-systeme-social-un-fauteuil-pour-deux
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