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Contestations de la provocation de Ménard sur le 19 mars 1962

Le geste provocateur de Robert Ménard – remplacer l'évocation du cessez-le-feu en Algérie par le nom d'un officier au parcours contestable – soulève une émotion compréhensible, non seulement à Béziers, mais également à Narbonne, Perpignan ... Le journal algérien d'expression française El Watan s'en fait l'écho dans un article que nous reprenons.

Anniversaire du 19 Mars 1962 en France : mobilisation contre le révisionnisme

par Walid Mebarek, El Watan
le 13 mars 2015

La municipalité de Béziers s’apprête à commettre une sérieuse entorse à la République, samedi 14 mars, en inaugurant la rue Hélie Denoix de Saint-Marc en remplaçant le nom qu’elle portait jusque-là, «rue du 19 Mars 1962».

Robert Ménard, soutenu par le Front national, parti qui s’est nourri de la haine de l’Algérie, insulte la mémoire de tous ceux qui ont souffert de la guerre qui s’est achevée après les Accords d’Evian, date désormais officiellement inscrite au calendrier français des commémorations. Pour rouvrir les plaies, les prête-noms, qui relayent la triste mémoire de l’OAS qui avait tenté, au printemps 1962, de mettre l’Algérie à feu et à sang, seront là à applaudir le nom de cet officier qui participa au putsch d’Alger en 1961.

Les falsificateurs tentent de faire de ce moment une victoire nationale. Depuis des années, ils veulent officialiser, à travers les stèles ou plaques, leur ressentiment de la nostalgie de l’Algérie française condamnée par l’histoire. Alors que depuis quelques années les autorités, autant françaises qu’algériennes, tentent d’apaiser les blessures, ce sera à Béziers une provocation majeure, à l’aube du 53e anniversaire du cessez-le-feu.

Comme le dit Jean-François Gavoury de l’Association nationale pour la protection de la mémoire des victimes de l’OAS (Anpromevo), cet événement est «l’objet d’une condamnation de la part d’une multitude d’associations nationales, régionales et locales, représentatives du monde combattant, des victimes de l’OAS, des rapatriés, des valeurs humaines, citoyennes et républicaines ainsi que d’organisations syndicales et de formations politiques qui y voient autant une menace au regard de l’ordre public qu’un risque de retour à la guerre des mémoires entre la France et elle-même».

Mobilisation

Il faut dire que les gens du pays n’ont pas apprécié que Ménard règle un problème personnel en entachant la réputation de leur région. «Le maire de Béziers ne s’en cache pas : c’est par respect filial, son père ayant soutenu le putsch d’Alger à la réalisation duquel Hélie Denoix de Saint-Marc apporta le concours de son régiment en avril 1961. L’acte consistant à utiliser un mandat électif pour venger son père d’avoir échoué à garder l’Algérie à la France relève-t-il des bonnes pratiques politiques ?» s’inquiète M. Gavoury.

Si à Béziers et dans les villages alentour la riposte s’organise, elle s’étend aussi à Perpignan et Narbonne. Ainsi, le collectif perpignanais appelle à manifester demain à Béziers « pour une histoire franco-algérienne non falsifiée». Dans le quotidien régional L’Indépendant, un militant, José Perez, estime que «dire que le colonialisme est une bonne chose, c’est inciter à la haine».

A Narbonne, un autre collectif contre le racisme, la xénophobie et les discriminations invite aussi à la mobilisation. «Pour Robert Ménard, qui se proclame l’héritier de l’OAS par l’action de son père, il s’agit donc de supprimer le nom d’une date de paix, le 19 mars 1962, pour donner à la rue le nom d’un criminel terroriste qui a été condamné par la justice française», estime le collectif, qui souhaite que de nombreux Narbonnais se joignent à cette manifestation pour réfuter le changement de nom. Le conseiller d’opposition communiste à la mairie de Béziers, Aimé Couquet, s’insurge : «Au vu de ses déclarations et de bien d’autres, on voit bien que le maire compte en faire un grand rassemblement. Eh bien de notre côté aussi, nous souhaitons en faire un pour dire non au négationnisme et non à l’utilisation du nom d’un putschiste. »

Une pétition lancée sur internet il y a quinze jours pour la sauvegarde de la rue du 19 Mars 1962 a recueilli plus de 2900 signatures, mais rien n’indique, pour l’heure, que l’opération de dévoilement de cette plaque malgré la contre-manifestation puisse être interdite par le préfet. Ainsi, nous explique Jean-François Gavoury, «c’est dans la rue, puis dans les enceintes de justice où des recours ont été déposés, que vont être débattues les questions relatives à la responsabilité d’un premier magistrat municipal faisant l’éloge d’un homme ayant, à un moment crucial de l’histoire des institutions de la France, fait le choix délibéré de tourner contre la République les armes qu’il en avait reçues ! »

Walid Mebarek

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