Boycott de produits israéliens: confirmation de relaxe pour trois militants
La cour d’appel de Montpellier a confirmé lundi la relaxe de trois militants pro-Palestiniens poursuivis pour avoir appelé au boycott de produits israéliens, a-t-on appris auprès des intéressés et de leurs avocats.
Jeanne Rousseau, l’une des coprévenues, a fait part de la « grande satisfaction » des trois membres du Collectif 66 paix et justice en Palestine qui regroupe une trentaine d’associations.
Le 15 mai 2010, ils avaient appelé au boycott des produits exportés par Israël devant une grande surface de Perpignan. Ils avaient été relaxés par le tribunal correctionnel de la ville en août 2013 et le parquet avait fait appel.
« C’est une question d’honneur », a réagi Jeanne Rousseau par téléphone à l’AFP. « Nous combattons le racisme et qu’on puisse nous accuser d’appel à la haine raciale alors qu’on pose des questions sur la politique d’un Etat est une offense. » « On tient à la défense de la liberté d’expression dans le cadre d’un débat politique sur les agissements d’un Etat, quel qu’il soit », a-t-elle ajouté.
Les militants catalans étaient poursuivis pour « provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence à l’égard d’une personne en raison de son origine ou de son appartenance ou non-appartenance à une ethnie, nation, race ou religion ». L’avocat général avait réclamé 300 euros d’amende à leur encontre.
Cette affaire fait suite à une série de procédures lancées en France contre des dizaines de personnes par le Bureau national de vigilance contre l’antisémitisme (BNVCA) et d’autres organismes pour leurs appels à boycotter les produits issus des territoires occupés en 1967. Selon la défense des prévenus, bon nombre de ces procédures ont abouti à des relaxes tandis qu’une ou deux affaires restent pendantes.
Pour Me Antoine Comte, l’un des avocats des trois prévenus, qui défend également de nombreux autres militants poursuivis à travers la France pour les même motifs, ces procédures ont été lancées de manière « ridicule et intempestive ».
« Si demain je critique l’Etat ukrainien ou au contraire l’Etat russe pour ce qu’il fait en Ukraine, et que j’appelle au boycott des produits russes ou ukrainiens, il s’agit d’un débat citoyen, il n’y a pas de discrimination raciale, on demande simplement que les citoyens puissent intervenir dans certaines affaires politiques », a dit l’avocat à l’AFP. Le boycott est « un moyen d’intervention politique classique des citoyens, vieux de plusieurs siècles ».
Me Yann Méric, autre conseil des prévenus, note « qu’il n’y a plus de nouvelles affaires aujourd’hui avec l’arrivée du nouveau gouvernement » qui a fait tomber en désuétude, dit-il, la circulaire Alliot-Marie demandant des poursuites aux parquets dans ce type d’affaire. « Il y avait un bouillonnement et tout ça s’est tassé », a-t-il déclaré.
Communiqué LDH
Paris, le 20 mai 2014
Nouvelle relaxe, il est temps d’abroger les circulaires Alliot-Marie et Mercier
La Ligue des droits de l’Homme se félicite de la relaxe prononcée par la cour d’appel de Montpellier à l’encontre des trois militants s’inscrivant dans la campagne dite « Boycott-Désinvestissement-Sanctions » (BDS) ayant fait l’objet de poursuites pour incitation à la haine raciale. Il leur était reproché d’avoir appelé au boycott des produits exportés par Israël dans le cadre d’une dénonciation de la colonisation, le 15 mai 2010, dans un magasin Carrefour.
Comme pour d’autres affaires similaires, la Ligue des droits de l’Homme réaffirme que ces poursuites étaient non seulement injustifiées mais extrêmement choquantes, l’acte de ces militants ne pouvant une seule seconde être considéré sérieusement comme une incitation à la haine antisémite. Plus généralement, la LDH refuse que toute critique de la politique des gouvernants israéliens et tout acte d’opposition aux graves violations des droits de l’Homme, dont ces gouvernants se rendent coupables depuis des années, soient taxés d’antisémitisme : cet amalgame est non seulement insultant pour les citoyens qui émettent ces critiques mais extrêmement dangereux, y compris pour la lutte contre la haine antisémite que la LDH mène depuis son origine même.
Appliquer le droit international, c’est bien sûr respecter les droits du peuple palestinien, aujourd’hui victime d’un déni d’existence par les autorités israéliennes et la communauté internationale. C’est, d’ores et déjà, appliquer à la lettre la loi de l’Union européenne et permettre à chacun de distinguer entre les produits fabriqués en Israël et ceux fabriqués dans les colonies qui peuvent légitimement faire l’objet d’un boycott.
La cour d’appel de Montpellier confirme ainsi le refus de la justice d’être instrumentalisée. La LDH renouvelle sa demande qu’il soit retiré les circulaires dite Alliot-Marie du 12 février 2010 et Mercier du 15 mai 2012 enjoignant au Parquet d’engager systématiquement des poursuites.