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Édition du 15 novembre au 1er décembre 2024

collectif varois : “expulsions de Roms, pas en notre nom”

Dans une lettre ouverte adressée au Premier ministre, le Collectif varois de soutien aux Roms et Gens du voyage déclare ne pouvoir se résoudre à voir ces derniers désignés comme boucs-émissaires des difficultés de notre société, alors qu’ils en sont souvent les premières victimes.

Lettre ouverte au Premier ministre

Toulon, le 22 mars 2013.

EXPULSION DES ROMS PAS EN NOTRE NOM

Monsieur le Premier Ministre,

Le Collectif varois de soutien aux roms et gens du voyage souhaite vous exprimer son indignation face aux récentes déclarations du ministre de l’Intérieur annonçant la reprise des « démantèlements » de bidonvilles au motif que leurs occupants refuseraient de s’insérer en France.

Ces propos nous paraissent particulièrement choquants et contraires aux engagements de campagne du Président de la République ainsi qu’à la mission que vous avez confiée au Préfet Alain Régnier, délégué interministériel à l’hébergement et à l’accès au logement, visant à organiser un
accompagnement global de ces situations, en recherchant avec les services de l’Etat, les collectivités territoriales et les associations, des solutions dignes et des perspectives d’insertion. Cette orientation strictement répressive, qui a déjà démontré dans le passé son inefficacité, nous semble également éloignée de la position que vous aviez exprimée sur ce sujet à l’occasion de notre dernière rencontre.

Ces déclarations traduisent une méconnaissance profonde des conditions de vie et de misère extrême de ces personnes souvent victimes de discrimination dans leurs pays d’origine, pourtant membres de l’Union Européenne. Comment peut-on en effet affirmer que ces personnes refusent de s’insérer en France, alors que l’accès à l’emploi et au logement social leur est actuellement interdit et que certains maires vont jusqu’à s’opposer à la scolarisation des enfants ?

Nous ne sous-évaluons pas les difficultés posées par l’installation de ces bidonvilles, dont la concentration sur quelques départements provoque des réactions d’hostilité, trop souvent instrumentalisées, voire nourries par des élus locaux.

Nous considérons cependant que la stigmatisation de ces familles particulièrement démunies par un membre de votre gouvernement, en attisant les réactions de rejet, est contraire aux valeurs de la République. Désigner une population par son origine ethnique est inacceptable et contraire aux
principes de notre Constitution, c’est aussi méconnaître le fait que de nombreuses familles présentes dans les bidonvilles sont en France depuis longtemps, contrairement à l’idée véhiculée par le discours du ministre de l’Intérieur. Cette stigmatisation compromet par ailleurs gravement les perspectives d’intégration de ces personnes qui devraient disposer du libre accès au marché du travail dans notre pays.

Dans ce contexte particulièrement inquiétant les associations craignent une accélération des évacuations de bidonvilles sans solution et sollicitent une rencontre pour évoquer avec vous la situation de ces personnes et les orientations de l’Etat permettant de répondre à cette urgence humanitaire.

A l’approche de la fin du plan hivernal, les associations sont pleinement mobilisées pour défendre le principe d’accueil inconditionnel de toute personne sans abri qui sollicite une prise en charge ainsi que l’application effective de la circulaire interministérielle du 26 août 2012 prévoyant un diagnostic sanitaire
et social et des solutions d’hébergement ou de logement pérennes avant toute opération d’évacuation de bidonville.

Après avoir établi en 2012 des records de reconduites à la frontière, le ministre de l’Intérieur annonce son intention de démanteler les campements de Roms et d’en expulser les occupants. Nous condamnons l’expulsion des familles Roms du début de cette semaine. Ne pouvant rester silencieux, nous reprenons la déclaration de Mgr Le Gall, archevêque de Toulouse, en août 2010 :

« Nous ne pouvons nous résoudre à voir les Roms et Gens du voyage victimes de préjugés et d’amalgames, boucs-émissaires désignés des difficultés de notre société, alors qu’ils en sont souvent les premières victimes. Nous sommes convaincus que le remède à la peur et à l’insécurité ne se trouve pas dans une surenchère sécuritaire mais passe par une action de longue haleine nourrie de respect et de connaissance réciproques ».

Veuillez agréer, Monsieur le Premier ministre, l’expression de notre très haute considération.

Signataires :

le Collectif varois de soutien aux Roms et Gens du voyage

(CGT, CNL, LDH, RESF, ATTAC, Fondation Abbé Pierre, Solidaires, Logivar, Secours populaire, FSU, PCF, PS, Parti de Gauche, NPA, EELV, Ligue de l’enseignement)

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