Roxana Azimi, dans Le Monde du 24 janvier 2025, a consacré une intéressante enquête aux « cités de l’histoire », « ces lieux culturels immersifs, conçus comme des parcs de loisirs », dont La Cité de l’histoire, installée depuis 2023 sur 6000 m2 sous l’arche de la Défense, à Puteaux (Hauts-de-Seine). Elle est la propriété d’Amaclio Productions, dont L’Humanité soulignait la proximité avec la droite la plus réactionnaire. Quand on songe qu’ à l’occasion du bicentenaire de la déclaration universelle des droits de l’homme, le 26 août 1989, a eu lieu à cet endroit l’inauguration solennelle de l’Arche de la fraternité à la Défense, on se rend compte à quel point, par des mécanismes divers, la droite extrême n’a cessé de marquer des points dans la diffusion de son idéologie.
« Après s’être acquitté d’un ticket à 24 euros, plus cher qu’une entrée au Musée du Louvre, écrit Le Monde, le visiteur se voit proposer deux « attractions » principales. D’un côté, un « couloir du temps », longue frise chronologique et interactive qui, en 400 textes brefs, prétend parcourir l’histoire mondiale depuis l’Empire romain jusqu’à nos jours. De l’autre, douze siècles d’histoire de France découpés en 17 scènes, jalonnées de figures en cire rescapées du Musée Grévin et ponctuées de saynètes animées par des comédiens. Le récit est délivré par Franck Ferrand, qui collabore à des médias conservateurs, tels CNews et Valeurs actuelles. Sensible aux idées d’Eric Zemmour, l’historien cathodique est aussi perméable aux thèses conspirationnistes. »
Le récit s’autorise ainsi d’improbables « oublis » dans l’histoire de France. L’historienne Mathilde Larrère s’étonne : « Rien sur les canuts, rien sur la Commune, rien sur le Front populaire, rien sur 1968 ».
S’agissant de l’histoire coloniale et plus particulièrement de l’Algérie, on s’attend au pire et on n’est pas déçu :
« Dans les notices lapidaires du « couloir du temps », les raccourcis sont encore plus criants. Celle qui est consacrée aux accords d’Evian de 1962 et à l’indépendance de l’Algérie est pour le moins biaisée. Évoquant les attentats du Front de libération nationale (FLN), sans mentionner ceux de l’Organisation armée secrète (OAS), elle signale de prétendus « sabotages de la part des communistes en France ». « C’est délirant, les communistes n’ont commis aucun attentat en France, ils ont, au contraire, été tués lors de la répression au métro Charonne, s’étrangle l’historien Benjamin Stora, spécialiste de l’Algérie, sollicité par Le Monde. Il n’y a aucune profondeur historique dans cette notice : on parle d’affrontements sanglants sans évoquer le fond du problème, la colonisation. »
Selon la page « nos partenaires » du site de la société propriétaire de La Cité de l’histoire, cette entreprise de relecture identitaire de l’histoire est notamment parrainée par la Région Ile-de-France, la Ville de Paris ou encore l’INA.
Roxana Azimi (Rouen, envoyée spéciale)