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L’extrême droite a tenté de perturber l’avant-première du film “Hors-la-loi” à Marseille

Une centaine de manifestants nostalgiques de l'Algérie française et militants d'extrême droite — dont six élus locaux du Front national — se sont rassemblés dans la soirée du lundi 20 septembre 2010 devant le cinéma Pathé Madeleine à Marseille pour protester contre l'avant-première nationale du film de Rachid Bouchareb. Ce rassemblement faisait suite à la manifestation organisée à Cannes, le 21 mai dernier, en marge du festival où le film était présenté, à laquelle de nombreux élus UMP des Alpes-Maritimes, dont le député Lionnel Luca, ont participé. Nous reprenons le compte-rendu de la manifestation de Marseille paru dans La Marseillaise ; un reportage de Jean-Baptiste Malet a aussi été mis en ligne sur le site Rue89.

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Manifestation d’extrême-droite à l’occasion de la projection du film de Rachid Bouchareb

par Michel Caire, La Marseillaise, le 21 septembre 2010

Aux cris de « Fellagas assassins », « Mennucci démission », une centaine de personnes a manifesté hier contre la projection en avant-première de Hors-la-loi, le film de Rachid Bouchareb sur la Guerre d’Algérie, en France, au Pathé Madeleine. Une séance, qui s’inscrit dans le cadre d’un accord avec la région, cette dernière ayant aidé à sa réalisation par une avance sur recette de 100 000 euros.

Patrick Mennucci, vice-président PS de la région, en charge de la culture, après avoir été bousculé lors de son entrée dans le cinéma, devait déclarer : « Aujourd’hui des gens d’extrême-droite montrent qu’ils sont contre la démocratie. Les réactions de ce soir sont d’autant plus choquantes que ce film, une fiction, est très intéressant et n’est en rien hostile à la France. Par contre, il faut voir la réalité en face. Et, en ce qui nous concerne, nous n’avons qu’un but, favoriser l’amitié entre notre pays et l’Algérie et montrer tout le respect que nous portons à nos concitoyens d’origine algérienne. »

Jean-Marc Coppola, PCF, également vice-président de la région, devait pour sa part déclarer : « Cette manifestation est un acte d’hostilité à la culture et c’est inadmissible qu’elle ait pu être autorisée. Je suis là pour soutenir cette création. »

Hier, en fin de matinée, l’ambiance était beaucoup plus sereine. Patrick Mennucci tenait une conférence de presse. A ses côtés : Nasséra Benmarnia, directrice de l’Association de l’union des familles musulmanes des Bouches-du-Rhône, Salim Saadi, ancien ministre, El Hadi Benaissa, chef d’entreprise, Djamel Boucheta, président de France Maghreb Algérie, Henri Papalardo, responsable dans le département de cette même association, le chanteur Djamel Allam, et l’ancien footballeur Mustapha Dhaleb.

L’élu revient sur le film : « Il est critiqué par des extrémistes qui, de plus, ne l’ont même pas vu. Ce qui les choquerait serait la représentation du massacre de Sétif, en 1945, mais cela ne prend que cinq minutes dans le film. De plus, ce massacre est aujourd’hui reconnu par notre pays. »

« La majorité des Algériens considère que la plupart
des pieds-noirs sont des victimes de la guerre »

Il ajoute : « J’ai parlé avec Rachid Bouchareb. A Sétif, des gens ont été arrêtés, pieds et poings liés mis dans des camions pour être jetés du haut d’une falaise. Il a songé à le filmer. A renoncé, trop fort, trop dur. » Il poursuit : « Par contre, le réalisateur nous montre bien d’autres choses : l’utilisation de truands, l’affrontement entre le FLN et le MNA. » Djamel Allam précise à ce propos qu’en Algérie « ce film aussi, suite à sa projection en avant-première, a produit des polémiques ». Avant de lancer : « Personne ne doit oublier que ce film c’est du cinéma. »

Une délégation est présente grâce au soutien de l’association France-Maghreb, qui compte dans ses rangs des Algériens et des pieds-noirs. Henri Papalardo précisant : « Nous travaillons à la réfection des cimetières juif et chrétien en Algérie depuis huit ans. Nous avons également lancé une mission retour qui, en sept ans, a vu 80 000 pieds-noirs faire leur demande de visa. Les voyages se sont toujours passés dans les meilleures conditions. »

Pour lui, « la majorité des Algériens considèrent que la plupart des pieds-noirs sont des victimes de la guerre. Après, il y a eu des extrémistes. Mais ce qui reste, surtout, c’est des communautés qui ont vécu ensemble ». Il ajoute : « En fait, les Algériens reprochent à la France de ne pas avoir anticipé l’indépendance, car, si cela avait été le cas, les choses auraient été totalement différentes. » Il conclut : « L’extrême-droite a toujours tendance à s’appuyer sur les Pieds-Noirs, mais, à Sétif, c’est l’armée qui était derrière les fusils. »

Alors que Djamel Allal se souvient qu’enfant, il échangeait son quatre heures, dans la cour de l’école, avec les petits pieds-noirs. Toujours est-il que ce film, sur lequel nous reviendrons demain, prouve le besoin urgent du travail historique, de débats nourris par celui-ci, sur cette période sombre de l’histoire de notre pays. En clair, une fiction révélatrice.

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