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Édition du 15 novembre au 1er décembre 2024

Restitution des restes humains :
le grand retard français

En sus d'innombrables objets pillés, la France conserve de son ère coloniale des milliers de restes humains dont elle n'a à ce jour restitué qu'un très faible nombre à ses anciennes colonies. Une enquête du New York Times indique que le Musée de l'Homme conserve ainsi dans ses réserves « 18 000 crânes » - comprenant aussi des restes de victimes du génocide arménien - et pointe une forte résistance française à les restituer. Une polémique a par ailleurs éclaté à propos des crânes rendus à l'été 2020 à l'Algérie : certains ne sont pas, selon plusieurs journaux dont Le Monde, ceux de résistants algériens, mais de supplétifs de l'armée française, ce dont le gouvernement algérien aurait été informé. Ce dernier l'a démenti.

Imbroglio autour de crânes restitués
par la France à l’Algérie


par Mustapha Kessous et Madjid Zerrouky, publié par Le Monde le 21 octobre 2022.
Source

Les restes de trois supplétifs de l’armée française ont été inhumés à Alger avec ceux de résistants à la conquête, dans le carré des martyrs.

Les autorités algériennes ont-elles en connaissance de cause inhumé trois « traîtres » dans le carré des martyrs à Alger ? Le 3 juillet 2020, après plusieurs années de pression, l’Algérie rapatrie depuis Paris, à bord d’un avion militaire, 24 crânes censés appartenir à des résistants décapités lors de la conquête française au XIXe siècle. Ces restes humains ont été entreposés, durant des décennies, au Muséum national d’histoire naturelle (MNHN).

Des soldats montent la garde à côté des cercueils censés renfermer les restes de 24 résistants algériens décapités pendant l’occupation française, au palais de la culture Moufdi-Zakaria, à Alger, en 2020. BILLAL BENSALEM / NURPHOTO VIA AFP
Des soldats montent la garde à côté des cercueils censés renfermer les restes de 24 résistants algériens décapités pendant l’occupation française, au palais de la culture Moufdi-Zakaria, à Alger, en 2020. BILLAL BENSALEM / NURPHOTO VIA AFP

La cérémonie, en présence du président Abdelmadjid Tebboune et de Saïd Chengriha, le chef d’état-major de l’armée, se veut alors un moment fort d’unité nationale, solennel, et une belle victoire sur l’ancien occupant. Car la France et l’Algérie sont en pleine crise diplomatique et cette restitution sonne comme un triomphe pour un pouvoir qui puise sa légitimité dans la guerre de libération (1954-1962).

Les 24 « icônes de la résistance populaire », comme les décrit alors l’agence de presse officielle APS, sont exposées, le lendemain, au Palais de la culture pour permettre au peuple de leur rendre un ultime hommage. Parmi ces « héros », l’APS cite les noms de « six chefs de la résistance populaire ». Le 5 juillet, jour de la fête d’indépendance, ces crânes sont enterrés dans le carré des martyrs du cimetière d’El-Alia. Le panthéon de la nation algérienne.

Controverse sur l’origine des crânes

Ce qu’on ignore encore, c’est que trois d’entre eux sont des supplétifs locaux de l’armée française : deux tirailleurs et un zouave. Selon Michel Guiraud, ancien directeur des collections au MNHN (de 2004 à 2021), les dépôts ont été étudiés par un comité d’experts algéro-français missionné par les deux Etats. « Nous avons identifié avec nos collègues algériens tous ces restes, tous ceux dont nous sommes certains de l’identité et des parcours individuels », explique au Monde l’ancien responsable du muséum, qui a coprésidé cette commission.

Ces trois crânes ont donc été inhumés en compagnie de résistants morts lors de la conquête, durant laquelle des centaines de milliers d’habitants ont perdu la vie. Ils pourraient reposer aux côtés de certaines de leurs victimes. Une image difficilement concevable au regard de la sensibilité de l’opinion algérienne sur la question de la colonisation. Comment cette situation a-t-elle été rendue possible ?

La controverse commence le 16 septembre : le site Algérie patriotique publie un article qui affirme que plusieurs crânes n’appartiennent pas à des résistants. Le journal en ligne cite Ali Belkadi, un historien et anthropologue algérien, qui assure : « Deux tirailleurs, mercenaires indigènes opposés au mouvement national, morts les armes à la main pour la France, ont été enterrés […] parmi nos braves, héros martyrs de la résistance. »

A l’appui de sa démonstration, un document estampillé au nom du MNHN identifie les deux « tirailleurs au service de la France » et un « soldat aux zouaves, fils d’un Arabe et d’une négresse », aux côtés de victimes du siège de Zaatcha, où des centaines de civils ont été massacrés en novembre 1849 par les troupes du général Emile Herbillon. Le muséum, qui a refusé d’authentifier ce document, ne nie pas les informations qu’il contient.

Rapatrier les dépouilles de « résistants »

Ignorée par la presse locale, cette révélation interroge : proche du général Khaled Nezzar, ancien homme fort du régime dans les années 1990, Algérie patriotique est surtout coutumier des « scoops » renvoyant à des règlements de compte entre clans du pouvoir. La thèse d’une volonté de déstabiliser Abdelmadjid Tebboune et Saïd Chengriha et de dynamiter le réchauffement entre la France et l’Algérie n’est pas à exclure. Pourquoi avoir choisi ce canal pour dénoncer ce qui peut s’apparenter à un scandale d’Etat ? M. Belkadi n’a pas souhaité répondre aux questions du Monde. Un mois après la publication d’Algérie patriotique, le New York Times confirme les informations du média algérien et relance la polémique.

Ali Belkadi n’est pas n’importe qui : c’est lui qui, en 2011, découvre les crânes de ces victimes au cours de ses recherches à Paris dans les collections du Musée de l’homme, dépendant du MNHN. C’est lui encore qui a été à l’initiative d’une campagne alertant les autorités algériennes pour exiger de la France leur restitution.

Il faut attendre le 6 décembre 2017 pour que ce dossier avance. Le président Emmanuel Macron se rend pour la première fois en Algérie depuis son élection et se dit « prêt » à restituer les crânes pour « ravive[r] la relation avec le travail mémorial entre nos deux pays ». Les autorités algériennes saisissent la perche et réclament officiellement leur restitution le 5 janvier 2018. La demande d’Alger est alors sans équivoque : il s’agit de rapatrier les dépouilles de « résistants ».

En septembre 2018, le comité franco-algérien est mis en place. « C’était un travail de scientifiques sur l’ensemble des restes qui se trouvaient dans nos collections, souligne Michel Guiraud. Il nous fallait identifier des personnes et leur parcours de vie. Pour y arriver, nous avons effectué des prélèvements d’ADN, de tissus et un travail d’archives. » L’ancien directeur des collections du muséum tient à préciser qu’il a, très vite, demandé si le mandat de la commission était de ne retrouver que des résistants. « Lors de la première réunion, j’ai fait préciser : est-ce à nous, comité scientifique, de décider qui est résistant ou pas ? Ou bien est-ce une étude générale ? En fin de compte, il y a eu une extension de notre mandat qui n’a pas été rendu publique. Il fallait trouver les restes d’Algériens du XIXe siècle, les identifier et les documenter. Nous n’avions pas à les qualifier de résistants ou pas. Que ce soit clair », pointe-t-il.

Extrait d'un document de travail de la commission franco-algérienne d'identification de restes humains (© histoirecoloniale.net)
Extrait d’un document de travail de la commission franco-algérienne d’identification de restes humains (© histoirecoloniale.net)

L’Algérie au courant de l’identité des crânes litigieux

Après plus d’une douzaine de réunions, Michel Guiraud atteste de la « compétence » et du « sérieux » de ses collègues algériens qui « ont contribué à ce travail pour déterminer ce qui était restituable ». « Nous n’avons restitué que ce que le gouvernement algérien voulait qu’on lui restitue : les restes d’origine algérienne avec leur documentation », assure-t-il. En juillet 2021, un rapport final a été validé par les scientifiques français et algériens mais celui-ci n’a jamais été officiellement remis aux gouvernements des deux pays.

Ce travail a permis d’identifier 26 crânes ; 24 ont été remis à l’Algérie le 3 juillet 2020. Faute d’une loi-cadre de restitution des restes humains, ils demeurent propriété inaliénable et imprescriptible de la France. Même enterrés à Alger, ils sont officiellement mis en dépôt pour cinq ans.

Et les deux crânes restants ? Comme l’avait raconté Le Monde, le 28 juin 2021, une réception officielle a été organisée au Musée de l’homme à Paris pour les remettre aux représentants de l’Etat algérien. Mais contre toute attente, les Algériens ne sont pas venus les récupérer… Et n’ont jamais donné d’explications.

On ignore pourquoi tous ces crânes ont été présentés par les gouvernements algérien et français comme ceux de résistants uniquement. « Nous avons partagé les informations avec les Algériens ; ce travail commun s’est bien passé et nous en sommes très fiers. Nous avons répondu au mandat que les politiques nous ont fixé », clame M. Guiraud. Les Algériens étaient-ils au courant de l’identité des trois crânes litigieux ? « Bien sûr, c’est dans le rapport qui n’a pas été rendu public, il y a l’ensemble de la documentation, avec des photos. Nous n’avons conservé que ceux dont on a été certains de l’identité, il n’y a pas d’anonyme », ajoute l’ancien coprésident.

Pourquoi les autorités algériennes ont-elles choisi d’inhumer des crânes qui ne sont pas ceux de résistants dans un haut lieu symbolique ? Pourquoi ne pas les avoir écartés ? Négligence ? Précipitation ? Le conseiller à la mémoire du président Tebboune, Abdelmadjid Chikhi, n’a pas répondu à nos sollicitations. Le Quai d’Orsay n’a pas, lui non plus, donné suite à la demande du Monde de lire le rapport de la commission franco-algérienne.

NOTE : Le gouvernement algérien a, depuis la publication de cet article, réagi à ces informations en les démentant.


Un musée parisien possède 18 000 crânes.
Il hésite à dire à qui ils appartiennent



par Constant Méheut, publié par le New York Times le 28 novembre 2022.
Source
Traduction : Fabrice Riceputi.

Selon ses détracteurs, le Musée de l’Homme dissimule des informations sur sa vaste collection de restes humains qui pourraient aider les anciennes colonies et les descendants des peuples conquis à les récupérer. Des documents confidentiels consultés par le New York Times font la lumière sur l’identité de centaines de crânes conservés dans les sous-sols du Musée de l’Homme et pourraient ouvrir la porte à des demandes de restitution.

PARIS – Avec sa façade Art déco monumentale surplombant la Tour Eiffel, le Musée de l’Homme est un monument de Paris. Chaque année, des centaines de milliers de visiteurs se pressent dans ce musée d’anthropologie pour découvrir ses squelettes préhistoriques et ses statuettes anciennes.

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Mais sous les galeries, cachée au sous-sol, se trouve une collection plus controversée : 18 000 crânes, dont les restes de chefs de tribus africaines, de rebelles cambodgiens et de peuples indigènes d’Océanie. Nombre d’entre eux ont été recueillis dans les anciennes colonies françaises. La collection comprend également les crânes de plus de 200 Amérindiens, dont ceux des tribus Sioux et Navajo.

Ces restes, conservés dans des boîtes en carton rangées dans des casiers métalliques, constituent l’une des plus grandes collections de crânes humains au monde, couvrant des siècles et tous les coins de la planète.

Mais ils sont aussi des rappels brutaux d’un passé sensible et, à ce titre, ils ont été entourés de secret. Les informations sur l’identité des crânes et le contexte de leur collecte, qui pourraient ouvrir la porte à des demandes de restitution, n’ont jamais été rendues publiques, mais sont décrites dans des documents du musée obtenus par le New York Times.

Un mémo confidentiel indique que la collection comprend les ossements de Mamadou Lamine, un leader musulman ouest-africain du XIXe siècle qui a mené une rébellion contre les troupes coloniales françaises ; une famille d’Inuits canadiens exposée dans un zoo humain à Paris en 1881 ; et même cinq victimes du génocide arménien au milieu des années 1910.

Parfois, les superviseurs disaient : « Il faut se cacher », raconte Philippe Mennecier, linguiste et conservateur à la retraite qui a travaillé pendant quatre décennies au Musée de l’Homme.

Le musée a peur du scandale

Cette opacité est en contradiction avec la prise en compte croissante par la France de son héritage colonial, qui a ébranlé nombre de ses institutions culturelles. Elle a également entravé les demandes de restitution d’objets provenant d’anciennes colonies ou de peuples conquis, dans lesquelles les restes humains sont souvent désignés comme une priorité – une question qui agite actuellement les grands musées européens.

Si la France a montré la voie en Europe en matière d’enquête et de restitution des collections d’artefacts de l’époque coloniale – des objets culturels fabriqués par la main de l’homme – elle est à la traîne par rapport à ses voisins en ce qui concerne les restes humains.

Les musées d’Allemagne, des Pays-Bas et de Belgique ont tous développé des protocoles clairs pour traiter les restes humains, avec des critères de restitution différents de ceux des objets. Les demandes concernant les objets culturels prennent généralement en compte les conditions dans lesquelles ils ont été prélevés ; pour les restes humains, il suffit généralement de prouver un lien ancestral. Dans plusieurs affaires récentes très médiatisées, les musées de ces pays ont restitué des crânes et des têtes momifiées, tout en promettant davantage de transparence et de responsabilité.

Aux États-Unis, une loi fédérale de 1990 a facilité le retour des restes amérindiens, bien que les restitutions aient progressé à un rythme lent. Un certain nombre d’universités et de musées de premier plan, dont le musée d’archéologie et d’anthropologie de l’université de Pennsylvanie et la Smithsonian Institution, ont discuté et, dans certains cas, élaboré des politiques sur la manière de traiter les restes de personnes réduites en esclavage qui se trouvent dans leurs collections.

Mais en France, selon les critiques, le Musée de l’Homme limite les recherches sur les objets sensibles de sa collection, retenant des informations essentielles pour les demandes de restitution. Le musée a depuis longtemps pour politique de ne restituer que les restes « nominalement identifiés », c’est-à-dire les fragments de cadavre d’une personne spécifique ayant un lien avec le demandeur. Certains spécialistes estiment qu’il s’agit d’une tactique restrictive destinée à bloquer les retours.

De plus, la législation française a fait de tout retour un processus lourd et fastidieux.

« Nos musées devraient faire un examen de conscience », estime André Delpuech, ancien directeur du Musée de l’Homme qui a quitté ce poste en janvier. « Mais jusqu’à présent, on a fait l’autruche ».

Comme d’autres musées du XIXe siècle, le musée était initialement un dépôt d’objets collectés dans le monde entier. Les crânes étaient collectés lors de fouilles archéologiques et de campagnes coloniales, parfois par des soldats qui décapitaient des résistants. Prisés par les chercheurs travaillant dans le domaine, aujourd’hui démystifié, de la science des races, les restes sont ensuite tombés dans un relatif oubli.

En 1989, Mennecier, le conservateur, a créé la première base de données électronique de la collection. Elle lui permet d’identifier des centaines de crânes qu’il appelle « potentiellement litigieux » – des restes de combattants anticoloniaux et de peuples indigènes, collectés comme trophées de guerre ou pillés par des explorateurs – qui pourraient être réclamés par des personnes souhaitant honorer leurs ancêtres.

Sentant les problèmes potentiels liés à l’augmentation des demandes de restitution au niveau international, M. Mennecier a déclaré qu’il avait averti les responsables du musée à plusieurs reprises pendant plusieurs années au sujet de ces restes sensibles, les exhortant à « informer les plus hautes autorités gouvernementales, éventuellement les ambassades, les communautés concernées ».

Mais ces appels sont restés lettre morte, selon lui et Alain Froment, anthropologue au musée, laissant les gouvernements étrangers et les communautés autochtones dans l’ignorance.

Le musée n’a publié qu’une version en ligne dépouillée de sa base de données de crânes, ne communiquant aucun nom ou détail biographique, alors que la liste consultée par le Times contient ces informations sur des centaines de restes.

Lefèvre et Martin Friess, responsables des collections d’anthropologie moderne du Musée de l’Homme, ont déclaré que les informations n’ont pas été divulguées pour des raisons de protection de la vie privée, par crainte de la controverse et en raison d’incertitudes quant à l’identité de certains restes.

Par exemple, la provenance d’un crâne indiqué comme appartenant à un chef sioux nommé White Cloud était douteuse, a déclaré Friess, qui a fait des recherches plus approfondies sur cette affaire.

Mais plusieurs universitaires et législateurs ont déclaré que la position du musée découlait d’une préoccupation plus importante : la transparence pourrait ouvrir les vannes des demandes de restitution.

Comme d’autres institutions, le Musée de l’Homme a été confronté à des demandes de rapatriement de plus en plus nombreuses, émanant de pays tels que Madagascar et l’Argentine, ainsi que de populations indigènes d’Hawaï. Mais contrairement à de nombreux homologues en Europe et aux États-Unis, le musée n’a pas investi de manière significative dans la recherche de la provenance de sa collection de restes humains, ni publié de directives pour leur manipulation et leur restitution.

Au cours des deux dernières décennies, la France n’a restitué qu’une cinquantaine de dépouilles, notamment en Afrique du Sud, en Nouvelle-Zélande et en Algérie. En comparaison, l’Allemagne en a restitué huit fois plus sur la même période, selon un chercheur de l’école de médecine de Brandebourg.

« Cela fait paraître la France en retard », a déclaré Jeremiah Garsha, historien à l’University College de Dublin, notant que le pays « a une histoire coloniale beaucoup plus longue et un bilan moins positif » que l’Allemagne.

Cet écart s’explique en partie par des politiques telles que l’obligation d’identification nominale imposée par le Musée de l’humanité. Selon Mennecier et Froment, les projets de restitution des restes indigènes australiens de la collection, dont la plupart ne sont pas identifiables, sont au point mort pour cette raison.

Cette politique, cependant, n’est pas partagée par d’autres musées européens et « n’a pas de base juridique claire », comme le note le mémo confidentiel du musée. Elle contredit également un rapport commandé par le gouvernement en 2018, également obtenu par le Times, qui recommandait de considérer comme restituables les restes anonymes qui pourraient être liés à une famille ou à un groupe indigène. (Le rapport, qui encourageait la France à adopter une position proactive en matière de restitution, n’a jamais été rendu public et ses propositions n’ont jamais été promulguées).

La responsable du musée, Mme Lefèvre, a déclaré que l’affiliation à une communauté était un critère trop vague, notant que les liens avec les groupes du XIXe siècle étaient difficiles à établir. Mais elle a ajouté que les crânes anonymes d’individus dont les fonctions sociales peuvent être déterminées, comme les chefs de tribus, pourraient être jugés restituables.

Klara Boyer-Rossol, une historienne qui a étudié les restes de Madagascar, a déclaré que la politique d’identification du musée était restrictive, irréaliste et peut-être conçue pour limiter les restitutions.

« C’est complètement hypocrite », a déclaré Mme Boyer-Rossol, ajoutant que la plupart des crânes ont été collectés sans documentation et que, selon elle, le musée dresse des obstacles à la recherche universitaire malgré les récents efforts de transparence. Il lui a fallu dix ans pour obtenir un accès complet à la base de données du musée sur Madagascar, dit-elle.

Pour compliquer les choses, les objets des collections des musées publics sont la propriété de l’État français et ne peuvent pas changer de propriétaire à moins que le retour ne soit voté par la loi – un processus lourd qui a parfois conduit la France à prêter des vestiges au lieu d’en céder la possession.

Un représentant du ministère français de la culture a déclaré que les responsables travaillaient à l’élaboration d’une loi générale visant à réglementer les futurs retours de restes humains.

Mais Pierre Ouzoulias, un sénateur français de gauche qui a produit plusieurs rapports sur la restitution, a déclaré que le gouvernement avait montré tout sauf de la bonne volonté. Il a rejeté une proposition du Sénat visant à créer un conseil scientifique consultatif sur les restitutions et n’a toujours pas examiné un projet de loi adopté par le Sénat en janvier qui supprimerait la nécessité pour le Parlement d’approuver chaque restitution.

Mennecier, le conservateur, et Delpuech, l’ancien directeur du Musée de l’Homme, ont tous deux déclaré que le secret de l’institution et l’obstruction des autorités pourraient avoir des répercussions, alors que les appels à un retour sur le passé se multiplient.

M. Ouzoulias a fait écho à cette crainte lors d’une commission parlementaire l’année dernière. Faisant référence aux crânes des victimes du génocide arménien, il a déclaré que la France risquait « un conflit diplomatique majeur avec certains États lorsqu’ils prendront connaissance du contenu de nos collections ».

« Il est temps que cela cesse, a-t-il déclaré. Nous ne pouvons plus vivre avec des squelettes dans nos placards ».

Voir sur histoirecoloniale.net les pages relatives à la problématique de la restitution des « butins coloniaux ».

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