Béziers: la création de la milice de Robert Ménard suspendue par la justice
Le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier a suspendu mardi la « garde biterroise » voulue par le maire d’extrême-droite de Béziers (Hérault) pour « renforcer la sécurité » de sa ville.
Qualifiée de « milice » par l’opposition municipale, la création d’une « garde citoyenne » avait été annoncée par le maire d’extrême droite de Béziers, Robert Ménard le 1er décembre dernier. Faite de « bénévoles » qui étaient censés patrouiller dans les rues de la ville. Sur une affiche, placardée dans la commune, on pouvait lire : « Vous êtes ancien policier, ancien gendarme, ancien militaire, ancien pompier, rejoignez la garde biterroise. »
La préfecture avait déposé deux recours: un référé en urgence pour s’assurer que la décision ne s’applique pas, et dont le résultat a été donné ce mardi; l’autre référé demandant l’annulation de la décision municipale doit encore être examiné.
La « garde » devait être « composée de citoyens volontaires bénévoles chargés d’assurer des gardes statiques devant les bâtiments publics et des déambulations sur la voie publique et devant alerter les forces de l’ordre en cas de troubles à l’ordre public ou de comportements délictueux », relève le juge. Le juge des référés précise faire « application d’une jurisprudence constante, selon laquelle la police administrative constitue un service public qui, par sa nature, ne saurait être délégué ». « Il juge ainsi que les tâches de surveillance des bâtiments publics et de la voie publique sont partie intégrante, dans les communes, de la police municipale et doivent être exercées par le maire ou par des agents placés sous son autorité, sous le contrôle du représentant de l’État, et que le conseil municipal de Béziers ne pouvait en conséquence légalement confier à des particuliers les missions de surveillance de la voie publique ou des bâtiments publics », poursuit le jugement. Il rejette en outre la notion de « collaborateur occasionnel du service public », mise en avant par Me Raphaële Hiault-Spitzer, l’avocate de la ville de Béziers à l’audience du 13 janvier. Mettant en avant « un doute sérieux sur la légalité de la délibération », le juge en ordonne la suspension et « enjoint » la commune de Béziers « de surseoir à la mise en place opérationnelle de la garde biterroise et de mettre fin à toute mesure d’information et de publicité la concernant, jusqu’à ce que le tribunal statue sur le fond de l’affaire ».
Après avoir déclenché plusieurs polémiques depuis son élection en 2014, annoncé le pourcentage d’élèves de confession musulmane dans les écoles publiques, instauré un couvre-feu pour les mineurs de moins de 13 ans non accompagnés ou organisé une campagne d’affichage faisant d’un énorme pistolet le «?nouvel ami?» de la police municipale, Robert Ménard voulait installer sa milice. La justice en a décidé autrement.
Béziers : une garde qui a tout d’une milice
L’affiche placardée dans les rues de Béziers. Photo dr L’utilisation de l’article, la reproduction, la diffusion est interdite – LMRS – (c) Copyright Journal La Marseillaise
D’anciens policiers, gendarmes ou militaires bénévoles vont patrouiller en ville. Aimé Couquet saisit le sous-préfet.
C’est le dernier buzz de Robert Ménard. La création d’une « garde biterroise » formée d’anciens gendarmes, policiers, militaires ou pompiers à la retraite a fait parler du maire de Béziers toute la journée du 1er décembre, quelques heures avant qu’il n’aille soutenir à Toulon la tête de liste FN de PACA, Marion Maréchal-Le Pen et y demander qu’on revienne « avant la France de Charles Martel » (sic).
« Les bras m’en tombent », réagit le socialiste Jean-Michel Du Plaa à l’annonce de ce recrutement de gens qui seront bénévoles (sous statut de collaborateurs occasionnels de service public) et patrouilleront en uniforme dans les rues de Béziers. Quelques jours après avoir – outrepassant ses fonctions de maire – demandé aux mosquées de signer une charte, voilà qu’il « relance la machine à produire du bruit dans les médias, en intégrant les réactions dans son plan com », souligne le conseiller municipal.
La mesure qui doit durer tant que durera l’état d’urgence, voire plus, sera accompagnée d’une campagne d’affichage mêlant drapeau bleu blanc rouge, appel à engagement genre guerre de 14 et photo de la cathédrale (sic) de Béziers. Les nouveaux croisés de Robert Ménard déambuleront donc dans les rues avec pour principal objectif les écoles et les bâtiments publics. La garde prétorienne du maire de Béziers disposera de « moyens de transmission pour alerter les services de police au besoin ».
Le directeur de la police municipale et l’adjoint à la sécurité seront chargés des entretiens individuels avant leur recrutement.
Pour le communiste Aimé Couquet, il s’agit d’une « nouvelle provocation à quelques jours des élections régionales ». Cela sent, du point de vue du conseiller municipal d’opposition, « la milice à plein nez ». Estimant qu’elle n’a pas sa place dans la législation en vigueur, ce dernier a saisi le sous-préfet »pour que cette garde biterroise ne voie pas le jour dans l’intérêt du vivre ensemble et de la sécurité de la population. »
Surfant sur les peurs décuplées après les attentats du 13 novembre, Robert Ménard profite de la situation pour faire avancer des idées chères à l’extrême droite. Des bavures sont déjà commises en ces temps d’état d’urgence par les forces de l’ordre officielles, le danger que des cow-boys vieillissants se croyant investis d’un pouvoir de police déambulent dans les rues de Béziers, n’est pas à exclure. Jean-Michel Weiss (Fédération autonome de la police municipale) dit autrement que « si la sécurité est l’affaire de tous, on ne doit pas faire n’importe quoi pour autant ».
A.M.