Communiqué LDH
Paris, le 5 juillet 2013
Le Front national, plusieurs visages, un seul discours :
la haine de l’autre
La Ligue des droits de l’Homme condamne vigoureusement les scandaleux propos tenus à l’encontre des Roms, à Nice, par le président d’honneur du Front national, ayant qualifié leur présence « d’urticante et d’odorante ».
Cette déclaration indigne confirme la réalité de la pensée de ce parti d’extrême droite, qui demeure fondée sur le racisme, la xénophobie et la haine des étrangers.
Un parti qui porte de tels discours doit être combattu avec la plus grande fermeté, sans être dupe des opérations de séduction fallacieuses engagées par ses autres dirigeants.
La Ligue des droits de l’Homme appelle à la plus grande vigilance et à dénoncer les alliances ou convergences envisagées avec ce mouvement anti-républicain, notamment en vue des prochaines élections municipales.
La Ligue des droits de l’Homme examine par ailleurs la procédure judiciaire la plus appropriée pour faire sanctionner à nouveau Jean-Marie Le Pen.
Communiqué Fondation Abbé-Pierre, FNARS1
Paris, le 8 juillet 2013,
UN DÉRAPAGE INACCEPTABLE
La Fondation Abbé Pierre et la FNARS dénoncent avec la plus grande fermeté les propos tenus dimanche dernier par le maire de Nice, Christian Estrosi à l’encontre des gens du voyage, propos qui ne sont pas dignes d’un élu de la république, ancien ministre et maire d’une des plus grandes villes de France.
Ces propos discriminatoires portent directement atteinte à la dignité des personnes concernées et constituent une brèche dans la cohésion sociale de notre pays.
En appelant les maires à la révolte contre les gens du voyage, le maire de Nice encourage une forme de violence de manière irresponsable, se situe clairement en dehors de l’Etat de droit et cautionne les propos les plus outranciers.
Nous rappelons que la loi du 5 juillet 2000 fait obligation aux communes de plus de 5 000 habitants de prévoir des conditions de passage et de séjour des gens du voyage sur son territoire par la réalisation d’aires d’accueil aménagées à cet effet. Un grand nombre de communes s’exonèrent de cette obligation (près de la moitié des places manquent à l’appel) et peu de départements disposent de
terrains pour les grands passages, obligeant les gens du voyage à s’installer sur des terrains inadaptés dans des conditions très précaires.
Nous demandons en conséquence au gouvernement d’assurer la mise en œuvre effective de cette loi sur l’ensemble du territoire national en sanctionnant les collectivités qui refusent de réaliser ces aires d’accueil et en demandant aux préfets d’assurer avec fermeté l’accès aux droits sociaux et à l’habitat de ces personnes itinérantes.
Contacts presse
- Mighelina Santonastaso, Chargée de communication Médias, "> 06 23 25 93 79, www.fondation-abbe-pierre.fr
- Céline Figuière, Responsable du service communication de la Fnars (Fédération nationale des associations d’accueil et de réadaptation sociale) "> 01 48 01 82 06, www.fnars.org
Estrosi sur les gens du voyage : des « propos calqués sur Le Pen »
Le Nouvel Observateur a questionné Laurent El Ghozi, président de la Fnasat (Fédération nationale des associations solidaires d’action avec les Tsiganes et les Gens du voyage), une association membre du collectif Romeurope.
- Comment avez-vous réagi aux propos de Christian Estrosi ?
Je constate que les propos de Monsieur Estrosi sont quasiment calqués sur ceux de Jean-Marie Le Pen. On est dans la droite extrême qui, pour exister, doit stigmatiser et exclure. On ne peut pas dire qu’on soit surpris, mais on est évidemment choqués. Ces propos sont parfaitement anti-républicains, parfaitement stigmatisants, et donc condamnables. On se réserve donc le droit de saisir une fois de plus le Défenseur des droits. On va voir ce que disent les juristes, mais pour moi c’est clairement de l’incitation à la haine raciale. Une fois de plus, les gens du voyage sont les boucs émissaires parfaits pour tous les soi-disant politiques de droite ou d’extrême-droite.
- Vous faites référence aux récents propos de Jean-Marie Le Pen sur les Roms, n’est-ce pas ?
Absolument. D’ailleurs Christian Estrosi mélange allégrement Roms et gens du voyage, comme s’il ignorait la différence. Il parle aussi de la circulaire du 26 août qui concerne les personnes vivant en bidonvilles et absolument pas les gens du voyage français. Tout cela est dans la droite ligne de la préparation d’élections municipales où Christian Estrosi est menacé sur son extrême droite par le Front national, il faut donc qu’il fasse de la surenchère. Depuis plusieurs années, en particulier depuis le discours de Grenoble en 2010, qui n’est pas nouveau, les gens du voyage et les Roms sont de plus en plus maltraités.
- Pouvez-vous nous rappeler l’objectif de la circulaire interministérielle d’août dernier ?
Christian Estrosi parle de « circulaire Valls », et là encore il se trompe. Elle est signée par sept ministres, dont Valls, et est interministérielle, ce qui est probablement une de ses plus grandes qualités. Et concerne la politique à l’encontre des personnes vivant en bidonvilles ou en squats originaires Roumanie et de Bulgarie et qui se disent Roms. Cette circulaire a pour objectif l’accompagnement du démantèlement des bidonvilles et des squats avec un diagnostic et des notions de scolarisation, accès aux droits, aux soins, au travail, etc…
Elle précise aussi que toute personne présente sur le territoire français qui en a besoin doit être hébergée et fait clairement référence à la nécessité de proposer des solutions alternatives en cas de besoin ou de décision d’évacuer. Ça concerne effectivement des Roms vivant en bidonvilles, qui sont des migrants pauvres originaires de Roumanie et de Bulgarie, et non des gens du voyage français. Ceux contre lesquels Christian Estrosi part en guerre sont des citoyens français vivant en caravane et voyageant, comme la Constitution et la loi leur donne parfaitement le droit. Ils ont la liberté d’aller et venir, de circuler, de s’arrêter, et les collectivités et les pouvoirs publics (préfet, conseil général, conseil régional et commune) ont l’obligation de leur assurer des conditions de stationnement.
- Selon le ministère de l’intérieur, « seules 4 (communes) sur 28 » des Alpes-Maritimes (dont Nice) respectent l’obligation légale, pour les communes de plus de 5.000 habitants, de mettre à disposition des aires d’accueil pour les gens du voyage. Et contrairement à ce que la loi impose aussi aux collectivités territoriales, le département n’a pas d’aire d’accueil dite « de grand passage ». En savez-vous davantage sur la situation sur place ?
La préfecture nous a confirmé qu’il y avait effectivement une aire d’accueil de 50 places à Nice, mais elle est destinée aux gens qui voyagent en petits groupes. Là c’est ce qu’on appelle effectivement un « grand passage », un nombre considérable de caravanes qui voyagent en période d’été ou de pèlerinage. Eux aussi ont le droit de s’installer. Tous les ans, en mars ou avril, une circulaire du ministère de l’Intérieur prévoit ces « grands passages. » S’il n’y en a pas dans le département c’est une carence des services de l’Etat et des collectivités. La plupart du temps, le préfet réunit les acteurs pour mettre au point cette aire. Dans certaines régions ça se passe très bien, dans d’autres toujours mal.
- Christian Estrosi dit qu’il applique la loi avec ses aires d’accueil, peut-on dans ce cas lui reprocher de ne pas avoir organisé d’aire de « grand passage » ?
On peut lui reprocher collectivement, en tant que maire de la plus grande ville du département, parlementaire de surcroît, qui ne peut ignorer la loi. S’il n’est pas seul responsable de l’absence d’aire de « grand passage », il est seul responsable, en revanche, de ses propos. En l’occurrence, la situation à Nice a finalement été réglée en 24 heures. C’est bien la preuve que c’est possible. Il faut simplement de la bonne volonté de la part des collectivités territoriales et des services de l’Etat. Mais s’il n’est pas seul responsable de l’absence d’aire de « grand passage », il est seul responsable, en revanche, de ses propos.