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Édition du 1er au 15 octobre 2024

roms et gens du voyage : discriminations et stigmatisation

La Commission nationale consultative des droits de l'Homme (Cncdh) a publié le 28 mars dernier un avis important 1 sur le respect des droits des “gens du voyage”, dont la plupart sont de nationalité française, et des Roms migrants, au regard des réponses récentes de la France aux instances internationales. Les conclusions de la commission sont sévères. La Cncdh invite le gouvernement à prendre des mesures afin de lever les dispositions législatives discriminatoires. Elle pointe également « l’insuffisante mise en œuvre de mesures spécifiques prenant en compte le mode de vie itinérant [qui tend] à renforcer la stigmatisation et les discriminations dont souffrent ces personnes [...] qui sont marginalisées et considérées comme des citoyens de seconde zone.» Des observations illustrées par les déclarations du maire de Royan, contre lequel la LDH vient de porter plainte.

Les déclarations du député-maire de Royan

La Ligue des droits de l’Homme a décidé de porter plainte pour «provocation à la haine ou à la violence et à la discrimination raciale», contre Didier Quentin, député-maire de Royan, en raison de propos qu’il a tenus sur les gens du voyage. L’élu a en effet déclaré, lors d’une réunion du conseil municipal, qu’«ils sont pollueurs, laissent quantité d’excréments, de détritus de toute nature, fraudeurs et voleurs à certains égards».

La section de Royan de la LDH rappelle que la commune de Royan est dans l’illégalité depuis 2002, date à laquelle elle devait disposer d’une aire d’accueil pour les gens du voyage itinérants.

La CNCDH tance le gouvernement au sujet des roms migrants et des gens du voyage

par O. Berthelin, La Gazette des communes, le 28 mars 2012

Dévoilé mercredi 28 mars 2012, l’avis de la Commission nationale consultative des Droits de l’Homme (CNCDH) rappelle au gouvernement ses engagements quant à l’abrogation des titres de circulation pour les gens du voyage, et pointe de nombreux dysfonctionnements non encore résolus. La commission se fait beaucoup plus critique concernant la politique suivie à l’égard des roms migrants, notamment sur les restrictions du marché de l’emploi et les procédures d’expulsion.

24 heures après l’expulsion contestée d’un camp dit rom à Corbeil Essonne et l’incendie d’un autre à Massy (Essonne), l’avis de la Commission nationale consultative des droits de l’homme sur les roms migrants et les gens du voyage tombe sans aucune préméditation au cœur de l’actualité. En effet, sans se soucier d’être confortée dans ses analyses par des évènements, la commission rend ses derniers avis avant d’être renouvelée après les échéances électorales.

Concernant les roms migrants, elle dénonce les bidonvilles et les squats insalubres qui « constituent des occupations par défaut, conséquence du manque d’hébergements et de logements accessibles aux personnes à très faibles revenus et aux blocages administratifs à l’entrée dans les hébergements sociaux ».

La CNCDH se montre extrêmement critique à l’égard des mesures transitoires qui bloquent l’accès à l’emploi des Roumains et des Bulgares. Elle dénonce aussi avec force les expulsions collectives et les effets pervers et les atteintes aux droits de l’homme découlant des dispositifs d’aide au retour et du fichier « Oscar » concernant les données biométriques des personnes en contact avec l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFFII).

La Commission est particulièrement féroce à l’égard de la « Stratégie du gouvernement français pour l’inclusion des Roms », communiquée en janvier dernier à la Commission européenne :

« La CNCDH tient à souligner que cette stratégie du gouvernement français ne peut être jugée satisfaisante en l’état :

– Elle entretient la confusion entre des populations diverses qui font face à des difficultés différentes, même si elles sont victimes des mêmes phénomènes de rejet et de discrimination.
– Le texte ne présente pas de réelle stratégie : il ne dégage pas de priorités, ne hiérarchise pas les objectifs, n’établit aucun critère de performance, et reste muet sur les crédits nécessaires pour atteindre les objectifs, et sur les moyens qui seront mobilisés. Aucun calendrier n’est proposé et aucune autorité ou administration n’est désignée pour piloter et évaluer la stratégie ».

Plan de lutte contre le racisme et les gens du voyage

La Commission se fait néanmoins un peu plus conciliante en ce qui concerne les atteintes aux droits de l’homme concernant les gens du voyage, citoyens français.

Elle note que deux pages leur sont consacrées dans le Plan national de lutte contre le racisme et l’antisémitisme, présenté le 15 février 2012 après avoir été annoncé en août 2010.

Reprenant le rapport du sénateur (UMP) de Haute Savoie Pierre Hérisson, le plan de lutte préconise la suppression des titres de circulation, et l’alignement du droit de vote des gens du voyage.

La commission s’étonne que ces mesures « soient encore restées au milieu du gué ». Allant plus loin que le rapport Hérisson, elle réitère ses demandes de 2008 préconisant la suppression de la commune de rattachement et du quota de 3 % limitant le nombre de personnes rattachées par commune.

Fondant une grande partie de ses remarques sur le rapport Hérisson, elle y ajoute les constats de l’Association nationale des gens du voyage catholiques (ANGVC) qui déplore que la grande majorité des documents d’urbanisme interdisent illégalement l’implantation d’habitats mobiles.

Par ailleurs, la CNDH dénonce le déficit en aires d’accueil et en terrains familiaux, mais s’oppose à la prise en compte de ceux-ci dans le calcul des 20 % de logements sociaux.
« Les habitats en caravane, doivent rester un mode d’habitat choisi et non imposé pour des raisons économiques ou de pénurie de logements ».

Dans le domaine de l’accès à l’éducation, la Commission salue les efforts annoncés depuis de nombreux mois, tout en soulignant qu’ils sont encore loin d’être réalisés.

Réponse gouvernementale ?

Le gouvernement répondra-t-il à ce rapport largement à charge ? Pour sa part, le sénateur Pierre Hérisson, qui vient d’être reconduit à la présidence de la Commission nationale consultative des gens du voyage, confirme qu’il travaille à la rédaction d’une proposition de loi sur le statut des gens du voyage, qu’il compte déposer au début de la prochaine législature.
Les parlementaires socialistes ayant reçu en février les associations de gens du voyage envisagent eux aussi une proposition de loi.

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