La première annonce de ce projet a été faite en décembre dernier :
Pieds-Noirs : un monument qui regardera de l’autre côté
A l’occasion des dix ans de la Chaire algérianiste, Christian Estrosi a annoncé son édification, l’année prochaine sur la Promenade des Anglais, face à la mer.
Ambiance émotion, dans l’amphithéâtre du MAMAC où, devant de nombreux Pieds-Noirs, ont été célébrés les dix ans d’existence de la Chaire algérianiste en présence de Christian Estrosi, député-maire de Nice et d’Agnès Rampal, adjointe déléguée aux Rapatriés.
Basée au CUM2, cette chaire, fondée par le professeur Fernand Destaing et présidée, depuis 2007, par Émile Serna, inspecteur général honoraire de l’Éducation nationale, s’attache à retracer le passé de l’Algérie au travers de conférences.
Pour faire toute la lumière sur la présence française en Algérie
« Permettre aux enfants et petits-enfants de Pieds-Noirs d’aller à la recherche de leurs racines, explique Émile Serna. Non, nous n’avons pas à rougir de notre œuvre bâtie dans la sueur, le sang et les larmes.»
Saluant « l’objectivité irréprochable » des travaux et recherches menés par la Chaire algérianiste, Christian Estrosi a souligné que les conférences «sont suivies par un public fidèle, fier de son passé là-bas ».
Profitant de cette célébration, le député-maire a annoncé la célébration, l’an prochain, d’un autre anniversaire à marquer d’une pierre blanche pour la communauté : le cinquantenaire du rapatriement.
Lancement d’un concours d’artistes
«Nice se hissera à la hauteur de cet événement puisque les commémorations seront placées sous le haut patronage de Nicolas Sarkozy. Ces cérémonies s’attacheront à rendre hommage à l’œuvre que vous avez entreprise de l’autre côté de la Méditerranée. »
Et de révéler, sous les applaudissements du public, la construction d’un « monument sur la Promenade des Anglais, face à la mer, qui regardera de l’autre côté ». Pour cela, la Ville entend lancer dès janvier, un concours d’artistes, avec un cahier des charges précis. Et ce sera à un jury composé de Pieds-Noirs, de sélectionner parmi les œuvres présentées, celle à réaliser.
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Émile Serna, président de la Chaire algérianiste
« Viscéralement attachés à l’Algérie »
Pour fêter les 10 ans de la Chaire algérianiste, son président, Émile Serna, a donné une conférence sur le thème « des problèmes de l’eau à Oran », avant d’évoquer le personnage de l’abbé Lambert3.
- La Chaire algérianiste est unique en France?
Oui. Elle a été créée par le Cercle algérianiste, la Ville et le CUM pour porter à la connaissance du grand public l’histoire de l’Algérie. Au travers de conférences, tous les thèmes sont abordés : l’urbanisation, les problèmes de santé, mais aussi les courants littéraires, artistiques, etc.
- Et le public suit?
Oui et c’est un public fidèle, composé de Pieds-Noirs d’Algérie, mais aussi du Maroc, de Tunisie. Les sujets de nos conférences sont à même d’intéresser les jeunes. Parce qu’ils traitent de la réalité algérienne à travers l’œuvre du romancier et poète espagnol Miguel de Cervantès (Don Quichotte de la Mancha, Nouvelles exemplaires, etc.) C’est aussi une manière de revivre notre passé et d’informer la jeune génération de ce qu’a été notre vie là-bas.
- Le cinquantenaire du rapatriement, un anniversaire pour vous?
Une commémoration. D’ailleurs, nous préférons le terme exode. Rapatriement signifie retour vers la patrie. Or, beaucoup de Pieds-Noirs sont morts là-bas sans avoir connu la France, comme le père d’Albert Camus, par exemple. D’autres, tout aussi nombreux, l’ont découverte pour t’avoir défendue durant les deux guerres mondiales.
- L’émotion sera présente pour cette commémoration?
Bien sûr. Même si nous avons vécu plus de temps en France, l’Algérie restera pour nous, Pieds-Noirs, viscéralement ancrée en nous. C’est notre terre. Celle de nos racines.
Le projet est confirmé en janvier :
Un monument aux Rapatriés sur la Prom’ en face du CUM
30 juin 2012 à 17 heures. Les regards des pieds-noirs et des harkis se tourneront vers la Promenade des Anglais, se fixeront sur le trottoir sud, face à la mer. C’est à cet instant que sera dévoilé le monument érigé en hommage à tout un peuple victime d’un douloureux exode. Un peuple qui, chassé d’une rive, a appris à revivre sur l’autre rive.
Et notamment dans cette Baie des Anges où le maire de l’époque, Jean Médecin, leur a tendu les bras. Sur les 60 000 rapatriés en exil sur la Côte d’Azur, 40 000 ont élu Nice comme nouvelle terre natale. Ce ne fut pas un hasard.
Ce monument voulu par le maire actuel sera en quelque sorte la pierre angulaire du cinquantenaire du rapatriement des Français d’Algérie célébré à Nice en cette année mémorielle. Des manifestations qui, placées sous le haut patronage du président de la République, seront investies d’une dimension nationale.
On connaîtra ce 15 mars le nom de l’artiste choisi par le jury pour incarner la mémoire de ce passé, ses malheurs mais aussi ses grandeurs, les œuvres accomplies. La sculpture regardera l’horizon, là-bas vers le sud, vers cette terre abandonnée mais jamais oubliée.
Hier, Christian Estrosi a levé le voile sur le lieu où l’œuvre sera posée : le trottoir sud de la Prom’, en face du Centre Universitaire Méditerranéen. Tout un symbole. La proximité de ce temple d’un savoir universel donnera sans nul doute une dimension elle aussi universelle à ce monument.
Colloques, festival de cinéma, théâtre…
Cette inauguration du 30 juin, suivie de plusieurs festivités le 1er juillet, sera l’un des jalons d’une année entière dédiée aux Français d’Algérie : colloques historiques et scientifiques avec les plus éminents spécialistes, dès ce 26 janvier, festival de cinéma baptisé « Nostalgérie », création au théâtre national de Nice autour de textes d’Albert Camus et de Mouloud Feraoun, hommage aux littératures d’Afrique du Nord, célébration des traditions culinaires d’Algérie, de Tunisie et du Maroc, etc.
Le député-maire a évoqué les racines, l’histoire à retrouver à travers cette commémoration, un demi-siècle après : « Les petits-enfants des Français d’Algérie, désormais Niçois, veulent savoir, veulent comprendre. Ils posent des questions et ils ont raison. Les pages écrites par les Français d’Algérie là-bas, sur l’autre rive, méritent d’être lues. Les rapatriés et les harkis ne doivent pas être, ne seront pas les oubliés de l’histoire ».
Pour Agnès Rampal, l’adjointe déléguée aux Rapatriés, arrachée à l’Algérie à l’âge de six ans avec sa famille, ce cinquantenaire sera aussi l’occasion « pour nous les enfants, de dire merci à nos parents, eux qui ont tout fait pour qu’on puisse vivre heureux et s’épanouir en France, en dépit des malheurs de l’histoire ».
Des parents et des enfants qui, a rappelé Eric Ciotti, député, président du conseil général, ont participé avec tant d’ardeur à l’essor de la Côte d’Azur au cours de ce demi-siècle écoulé.
Mais certains Pieds-Noirs ont déjà déclaré : «Nous ne voulons pas de son mémorial … nous ne voulons pas de sa fête du cinquantenaire, alors que nous serons en deuil.»
à suivre …
- Référence : http://nice2008changerdere.fr/2011/12/pieds-noirs-un-monument-qui-regardera-de-lautre-cote/
- [Note de LDH-Toulon] – Le C.U.M., Centre Universitaire Méditerranéen, est un établissement municipal, sur la promenade des Anglais, qui offre au grand public des conférences, concerts, colloques, tables rondes… ainsi que des animations pour enfants et adolescents.
- [Note de LDH-Toulon] – Voir 284.