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Présentation de l’éditeur
Pendant la colonisation, pour sauver en Afrique la nature déjà disparue en Europe, les colons créent des parcs en expulsant brutalement ceux qui cultivent la terre. Et au lendemain des indépendances, avec l’Unesco ou le WWF, les dirigeants africains « protègent » la même nature, une nature que le monde entier veut vierge, sauvage, sans hommes.
Les suites de cette histoire sont connues : des millions de paysans africains expulsés et violentés, aujourd’hui encore. Mais comment a-t-elle pu advenir ? Qui a bien pu organiser cette continuité entre le temps des colonies et le temps des indépendances ? Guillaume Blanc répond à ces questions en plongeant le lecteur au cœur d’une étrange mission écologique mondiale, lancée en 1961 : le « Projet spécial africain ».
L’auteur raconte l’histoire de ce Projet, mais, plutôt que de suivre un seul fil narratif, il redonne vie à quatre mondes, que l’on découvre l’un après l’autre : le monde des experts-gentlemen qui pensent l’Afrique comme le dernier refuge naturel du monde ; celui des colons d’Afrique de l’Est qui se reconvertissent en experts internationaux ; celui des dirigeants africains qui entendent contrôler leurs peuples tout en satisfaisant les exigences de leurs partenaires occidentaux ; celui, enfin, de paysans auxquels il est demandé de s’adapter ou de disparaître. Ces hommes ne parlent pas de la même nature, mais, pas à pas, leurs mondes se rapprochent, et ils se rencontrent, pour de bon. Ici naît la violence. Car c’est la nature des hommes que d’échanger, pour le meilleur et pour le pire.
Historien de l’environnement et de l’Afrique contemporaine, Guillaume Blanc est maître de conférences à l’université Rennes 2 et membre junior de l’Institut universitaire de France. Il est notamment l’auteur de L’Invention du colonialisme vert (Flammarion, 2020) et de Décolonisations. Histoires situées d’Afrique et d’Asie (Seuil, 2022).
Table des matières
Introduction. Violences en milieu naturel : du pourquoi au comment
Face au présent
Saisir le moment
Faire des choix
Une galerie d’institutions
Une galerie d’acteurs
• 1. Protéger l’Afrique des Africains. L’univers des experts-gentlemen
Arusha 1961. Tout changer, pour ne rien changer
Un projet » réellement international «
Aider l’Afrique à s’aider elle-même
Le parc, toujours le parc
De l’impérialisme à l’internationalisme. Histoires
Imaginaires coloniaux
Promouvoir le » développement «
Lutter contre la » surpopulation «
Ascension d’une Internationale conservationniste
De la préservation à la conservation
De l’action coloniale à la coopération internationale
WWF, la banque des experts
Pour conserver : mondialiser d’un côté, africaniser de l’autre
Un seul monde, une seule nature
L' » Afrique » comme catégorie écologique
Protéger la planète, agir en Afrique
L’Afrique comme » bombe humaine «
Sauver ce qui peut encore l’être
La quête (a)politique des experts
Pour guider l’empire : la science
Pour guider l’Afrique : les parcs
Pour l’emporter sur la décolonisation : la conservation
Visages et figures d’Afrique
Les Africains poursuivent l’oeuvre colonisatrice
La faune africaine vit encore
L’Afrique, ou l’échantillon originel du monde
• 2. Sauver la citadelle est-africaine. Le monde de ceux qui restent
Arusha 1961. Travailler dans une Afrique libérée
La nouvelle donne indépendantiste
Le succès conservationniste
Accompagner la transition indépendantiste. Histoires
Les coloniaux reconvertis en experts
Le moment postcolonial
À chaque rupture sa continuité
L’Internationale est-africaine
L’Afrique de l’Est, ou » le meilleur de l’Afrique «
Une » mission régionale «
Un véritable » régime circulatoire «
Au nom du dernier bastion de la nature
Tuer pour protéger
Contrôler pour conserver
Naturaliser, par tous les moyens
Avec les » Africains « , contre les » Africains «
Coopération d’un côté, répression de l’autre
L’indépendance menaçante, mais salvatrice
Un impossible rêve
Les scientifiques au pouvoir
Les baroudeurs administrateurs
Les coloniaux contre les incapables.
Un cauchemar
» Un gardien de parc sans vrai parc «
» Une fois pas plus, merci «
» Si seulement le gouvernement nous soutenait ! «
• 3. Gouverner l’Éthiopie. La nation-monde des dirigeants africains
Arusha 1961. Protéger la nature, faire de la politique
La nature aux Africains
Les Africains face aux experts
La naturelle extraversion de l’État africain. Histoires
La dépendance comme stratégie
L’art de l’entre-deux
L’Éthiopie subissante et agissante
Statut actuel : demandeur d’aide
Faire appel aux institutions internationales
Faire avec le monde extérieur
Négocier et consentir
Accepter la dépendance
De la conservation pour les étrangers, avec les étrangers
De la nature pour les anciens colons, sans les Éthiopiens
L’Éthiopie d’abord
Le monde au service de la nation
Se faire reconnaître par l’extérieur, puis s’imposer à l’intérieur
Un peu de nature, beaucoup de pouvoir
Maudits farenj’
Souveraineté contestée, souveraineté revendiquée
Arrogance coloniale contre fierté nationale
Être vainqueur… et vaincu
Revanches
Meurtres en milieu naturel
Ne fait pas la loi qui veut
Le prix du prestige
• 4. Vivre en parc. Le village global des anonymes
Arusha 1961. La nature des uns, la vie des Autres
À la recherche des subalternes. Histoires
Écouter les sans-voix
Retrouver les modes d’action
Du présent jusqu’au passé
Tekelakay, ou comment résister
La contestation du quotidien
À chacun son pouvoir
Qui dit nature dit violence
Mengest, le puissant du coin
S’imposer sur la nature et ses voisins
Conserver, surveiller et punir
Serateña, employé invisible
Parc et précarité
Les anonymes disparus
Dehaw : le pauvre
Survivre dans la » nature «
Subir l’injustice
Être privé
Yemiyastekaklew, le débrouillard
Mille et une façons de s’adapter
À chacun son histoire
• Épilogue. Un peu de nature, beaucoup (trop) d’humanité
Quand s’achève le moment postcolonial
Quand débute le temps durable des postcolonies