Tout au long de sa vie, Robert Badinter a mené courageusement des combats humanistes, dont celui contre le colonialisme durant la guerre d’Algérie. Le président de la République, Emmanuel Macron, n’en n’a rien dit lors de la cérémonie qui a eu lieu ce mercredi 14 février, place Vendôme. Pourtant, comme le rappelle Robert Badinter dans cet entretien accordé en 2018 à François Demerliac, il fut un avocat combatif du Comité Audin, fondé en 1957, et sa proximité avec Pierre Vidal-Naquet fut un fait important qui témoigne de son engagement anticolonialiste.
Plus tard, à la différence de Pierre Vidal-Naquet qui s’est opposé dès 1967 à toute colonisation des territoires palestiniens, Robert Badinter, attaché à une image d’Israël qu’il s’était forgée au sortir de la Seconde guerre mondiale, n’a rien trouvé à redire, à notre grand regret, face à l’expansionnisme d’Israël. Et il n’a pas qualifié la politique de cet État par le seul adjectif recevable, celui de coloniale, puisqu’elle a rejoint, à bien des égards, ce que fut la politique française lors de la guerre d’indépendance de l’Algérie.
Histoire coloniale et postcoloniale
Lors de son allocution à la cérémonie qui a eu lieu ce mercredi 14 février 2024, place Vendôme, en hommage à Robert Badinter, le président de la République, Emmanuel Macron, a eu des paroles fortes pour évoquer sa vie et son engagement contre la peine de mort, mais il n’a pas eu un mot pour rappeler son appel et sa mise en garde contre la « lepénisation des esprits » qui menace la République. Ni pour évoquer son combat durant la guerre d’Algérie contre la pratique de la torture, des disparitions forcées et des répressions barbares par les forces de l’ordre françaises, sous le regard indulgent d’une justice militaire aux ordres.
Robert Badinter a participé en septembre 1960 à la défense des militants du « Réseau Jeanson », six Algériens et dix-sept Français qui aidaient le FLN algérien, un procès qui s’est tenu dans la prison du Cherche-Midi à Paris où avait eu lieu en 1894 le procès du capitaine Alfred Dreyfus. Un procès du réseau Jeanson trop oublié, qui a été une étape importante dans la mobilisation contre la guerre d’Algérie. Robert Badinter a fait partie aussi de ceux qui ont accompagné Josette Audin dans son interminable parcours judiciaire, de 1957 à sa mort en 2019, pour faire connaître la vérité sur l’assassinat de son mari en juin 1957 par des militaires français.
Interrogé en avril 2018 pour le film de François Demerliac Maurice Audin, la disparition, Robert Badinter a raconté son rôle, alors tout jeune avocat, et celui de ses confrères, pour la défense du Comité Audin fondé par Laurent Schwarz et Pierre Vidal-Naquet dans de multiples affaires. En particulier dans la longue procédure lorsque ce comité a été victime de calomnies de la part du quotidien conservateur « La Voix du Nord ».
Nous reprenons la vidéo que diffuse « Place Audin », un espace d’échanges par l’image et par la parole entre l’Algérie et la France qui présente des films, des témoignages, des débats et des travaux sur la Guerre d’Algérie qui sont utiles dans la période marquée par la montée de l’extrême droite que nous traversons aujourd’hui.
Durée : 16′ 12 »
• 0:00:00 L’affaire Audin, une affaire symbolique
• 0:01:25 Le procès de Lille
• 0:02:06 La technique de l’affaire Dreyfus
• 0:03:37 Le sursis à statuer
• 0:04:42 La fin de la procédure – la vérité est dite
• 0:08:14 La justice pendant la guerre d’Algérie
0:09:18 L’opinion publique
0:10:10 L’aveuglement
0:12:12 Les lois d’amnistie
0:14:18 La vérité ou l’apaisement ?
0:16:12 Fin
Sur l’affaire Maurice Audin, lire notamment sur notre site :