La méthode Gallieni1
Miné par les fièvres après avoir en quatre ans purgé le Tonkin des terribles Pavillons noirs, Gallieni, en juillet 1896, se soigne au pays natal, dans la petite station de Siradan, lorsque le ministre des colonies, André Lebon, le supplie d’interrompre son congé pour sauver Madagascar, occupé depuis un an à peine par les 15000 hommes du général Duchesne.
«Si vous refusez d’aller pacifier notre grande colonie africaine, elle est perdue pour nous.
— J’y vais, décide le colonel.
— « Général« , lui annonce le ministre, vous réunirez en vos mains tous les pouvoirs civils et militaires. Quelles troupes voulez-vous amener en sus du corps d’occupation ?
— Je ne demande qu’un bataillon de la Légion, afin de finir proprement s’il fallait succomber là-bas. »
L’insurrection qui vient d’éclater a été inspirée par la reine Ranavalona, qui trône à Tananarive sur les tribus hovas d’origine malaise. Du balcon de la résidence, Gallieni peut observer les incendies allumés par les insurgés. Il acquiert la preuve que les fils du complot sont tenus par l’oncle de la reine, Ratsimamanga, et le ministre de l’intérieur, Rainandriamampandry. Il les fait arrêter à la stupeur générale; une cour martiale les condamne à mort. Les accusés croient à une comédie, d’autant que la reine les fait rassurer par un émissaire de la cour. Si Gallieni recule, les Hovas vont mettre la Grande Ile à feu et à sang. A l’aube, les deux condamnés sont fusillés par une section de légionnaires. En quelques heures, Tananarive et ses abords sont pacifiés.
L’heure est grave
L’ordre est rétabli dans la partie centrale de l’île. Gallieni s’attaque aux autres groupements rebelles. En juillet 1897, il décide de pacifier la zone ouest des turbulentes tribus sakalaves et lance son chef d’état-major, le commandant Gérard, à la tête d’une colonne. Vers le 15 septembre parvient à Tananarive la nouvelle d’un soulèvement des Sakalaves et de l’enlèvement de quatre de nos postes. Une troupe française est isolée et des secours ne pourront la joindre avant plusieurs semaines; l’île entière risque de nouveau de s’ensanglanter, l’heure est grave.
Le chef d’escadron Putz, chef d’état-major intérimaire, aimait à conter par la suite, nous disait le général Aubert, avec quelle maîtrise admirable Gallieni encaissa les mauvaises nouvelles. Jamais il ne laissa échapper une parole de nervosité. Aux colons anxieux il prodiguait des paroles d’espoir. Sa réserve dura quatre jours. Le 20 octobre, à 11 heures du soir, il convoqua le commandant Putz et le garda deux heures dans son cabinet. Quand ce dernier sortit, il emportait tous les ordres possibles pour parer aux événements. Le général s’installera lui-même au bureau de Tananarive pour communiquer avec ses subordonnés par télégrammes successifs (il n’était pas question de téléphone à cette époque). Ainsi tout l’essentiel, tout le possible, conclut le général Aubert, se trouvaient décidés.
Gallieni à Madagascar sut s’entourer d’hommes sûrs qu’il avait déjà eus sous ses ordres au Tonkin : Gérard, Martin-Panescora, Boucabeille, Peltier, Putz, Hellot, Aubert, Nèple, Mérienne-Lucas. Il va bientôt faire appel à son ancien chef d’état-major de colonnne, le commandant Lyautey, qui, sans même toucher la France, passe à Suez du paquebot d’Indochine sur celui de Tamatave. Chargé de traquer Rabezavana, il le bat à Morafeno, reçoit sa soumission avec son anneau de commandement, le laisse libre et le réintègre dans son commandement. Gallieni approuve ce geste chevaleresque qui participe de sa méthode, qu’il a ainsi résumée: «Pacifier et occuper fortement le territoire par la méthode de la tache d’huile. Progresser constamment vers la périphérie. Continuer l’action politique et militaire pour prendre possessipn du pays. Entrer sans délai en contact intime avec les populations, connaître leurs tendances, leur état d’esprit et satisfaire à leurs besoins pour les attacher par la persuasion aux institutions nouvelles.»
Cette «organisation qui marche» que Lyautey devait appliquer au Maroc permit la soumission du sud de l’île, hérissé de forêts et de monts inviolés où les colonnes Gérard, Septans, Lamy, Dubois, Cléret, Sueillon, Boucabeille se couvrirent de gloire, frappant d’admiration des insurgés. A Fianarantsoa, devant 20000 Betsileos, Gallieni déclarait : «Je n’ai pas à savoir quelle est votre religion. Catholiques, musulmans, protestants ou adeptes seulement du culte des ancêtres, vous pouvez tous vous asseoir sur les bancs de nos écoles, apprendre notre langue, vous habiller des étoffes françaises renommées dans le monde entier. Vous apprendrez de nous à vous aimer, à aimer surtout la France, votre nouvelle patrie, et à devenir d’habiles ouvriers et de bons cultivateurs. »
La population indigène est de toujours décimée par la variole, la lèpre, la tuberculose, la mortalité infantile, le paludisme. Gallieni ordonne la création immédiate d’une école de médecine, de cliniques, d’hôpitaux, d’une direction de la santé aux consultations gratuites, vaccins, léproseries isolées. Parallèlement, il organise des écoles, cours professionnels, tribunaux sans vénalité, chantiers de route et de voirie, création du premier chemin de fer entre la capitale et la côte (Tamatave), travaux, crédit et concessions fonciers, haras, chambres de commerce, immigration des créoles de la Réunion, police des gisements aurifères, obligation du système métrique, topographique.
En 1900, venu à Paris, il obtient les crédits nécessaires pour la création de la base navale de Diégo-Suarez, qu’il confie au général du génie Joffre, qui en trois ans effectuera les remarquable travaux de la ville et du port.
La colonisation ainsi comprise, substituant l’ordre aux luttes intestines, au brigandage, au despotisme, respectueuse de la personne et des biens de l’indigène, est beaucoup plus un devoir qu’un droit: loin de perpétuer un esclavage, elle vise à la libération des peuples protégés.
Instructions de Gallieni pour la pacification de Madagascar
«Le meilleur moyen pour arriver à la pacification dans notre nouvelle et immense colonie de Madagascar, avec les ressources restreintes dont nous disposons, est d’employer l’action combinée de la force et de la politique. Il faut nous rappeler que, dans les luttes coloniales que nous impose trop souvent, malheureusement, l’insoumission des populations, nous ne devons détruire qu’à la dernière extrémité, et, dans ce cas encore, ne ruiner que pour mieux bâtir. Toujours, nous devons ménager le pays et ses habitants, puisque celui-là est destiné à recevoir nos entreprises de colonisation futures, et que ceux-ci seront nos principaux agents et collaborateurs pour mener à bien ces entreprises. Chaque fois que les incidents de guerre obligent l’un de nos officiers coloniaux à agir contre un village ou un centre habité, il ne doit pas perdre de vue que son premier soin, la soumission des habitants obtenue, sera de reconstruire le village, d’y créer immédiatement un marché et d’y établir une école. Il doit donc éviter avec le plus grand soin toute destruction inutile.
«Action politique. L’action politique est de beaucoup la plus importante ; elle tire sa plus grande force de la connaissance du pays et de ses habitants ; c’est à ce but que doivent tendre les premiers efforts de tout commandement territorial. C’est l’étude des races qui occupent une région, qui détermine l’organisation politique à lui donner, les moyens à employer pour sa pacification. Un officier qui a réussi à dresser une carte ethnographique suffisamment exacte du territoire qu’il commande est bien près d’en avoir obtenu la pacification complète, suivie bientôt de l’organisation qui lui conviendra le mieux.
«Toute agglomération d’individus, race, peuple, tribu ou famille, représente une somme d’intérêts communs ou opposés. S’il y a des moeurs et des coutumes à respecter, il y a aussi des haines et des rivalités qu’il faut savoir démêler et utiliser à notre profit, en les opposant les unes aux autres, en nous appuyant sur les unes pour mieux vaincre les secondes. […]
Action économique. Au fur et à mesure que la pacification s’affirme, le pays se cultive, les marchés rouvrent, le commerce reprend. Le rôle du soldat passe au second plan, celui de l’administrateur commence. Il faut d’une part, étudier et satisfaire les besoins sociaux des populations soumises ; favoriser, d’autre part, l’extension de la colonisation qui va mettre en valeur les richesses naturelles du sol, ouvrir des débouchés au commerce européen.
«Ce sont là, semble-t-il, les deux conditions essentielles du développement économique d’une colonie : elles ne sont nullement contradictoires. L’indigène, en général, n’a que fort peu de besoins. Il vit dans un état voisin de la misère, qu’il est humain de chercher à améliorer ; mais, le nouveau mode d’existence que nous lui ferons adopter, en créant chez lui des besoins qu’il n’avait pas, nécessitera de sa part des ressources qu’il n’a pas davantage et qu’il lui faudra trouver ailleurs.
«Il faudra donc qu’il surmonte sa paresse et se mette résolument au travail, soit en faisant revivre des industries languissantes, celles de la banane et de la soie par exemple, soit en augmentant ses cultures et en adoptant pour elles des méthodes plus productives, soit en prêtant aux colons européens le concours de sa main-d’oeuvre.
«Il rentre dans le rôle de nos commandants territoriaux de créer des écoles professionnelles, où l’indigène se perfectionnera dans son métier, par l’étude et l’application des moyens que la science et l’expérience nous ont acquis ; d’installer des fermes-modèles, où il viendra se rendre compte des procédés de culture féconds que nous employons et qu’il ignore ; d’encourager la reprise des industries nationales en facilitant l’établissement des premières fabriques qui s’organiseront et en les subventionnant au besoin ; de créer des marchés, francs de tous droits d’abord, et qui ne seront imposés que dans la suite, très progressivement, etc.
«Il se produira, infailliblement, une augmentation de richesse dans le pays, avec, comme conséquence naturelle, un besoin de bien-être, que le commerce européen saura mettre à profit. Il trouvera, dans les produits nouveaux de l’activité que nous aurons ainsi créée, des articles d’exportation, qui lui manquent un peu aujourd’hui, et, en tout cas, des ressources locales qui lui font absolument défaut.»
Joseph Gallieni, 2 mai 18982
Madagascar, colonie française
Voilà ce qui est enseigné, en français, aux collégiens d’une classe de troisième de Tuléar à Madagascar3.
A la fin du 19ème siècle, les pays européens (France, Angleterre, Belgique…) se lancent dans l’occupation de vastes territoires en Afrique et en Asie. La colonisation c’est l’occupation et l’administration par la force d’un pays pauvre par un pays riche. Cette domination est à la fois politique, économique, sociale et culturelle.
A – LES CAUSES DE LA COLONISATION
1. Les causes externes
a- Causes politiques et économiques
- Pour éviter les rivalités, les pays européens ont partagé le monde pour créer de vastes empires coloniaux. Ils se sont réunis à Berlin pour faire ce partage. Pendant cette conférence, l’Angleterre donne Madagascar à la France en échange de Zanzibar.
- Avoir un empire colonial était un signe de puissance et un motif de fierté.
- La révolution industrielle oblige les européens à chercher des matières premières pour leurs usines et des débouchés (marchés) pour les produits finis. Ils ont aussi besoin de terres de peuplement et de travail pour les hommes.
- Sur le plan stratégique la place de Madagascar permettait à la France de contrôler le commerce international dans l’Océan Indien et d’y installer une base militaire.
b- Causes sociales et culturelles
- Les Européens pensaient que leur civilisation était supérieure aux autres, par conséquent coloniser et instruire les « races inférieures » étaient un devoir : c’est la mission civilisatrice (éducation, évangélisation).
2. Les causes internes
- En 1883-1885, une guerre éclate entre les Malgaches et les Français. Elle se termine par la signature d’un traité (accord). Ce traité considère Madagascar comme protectorat français. Cependant le premier ministre Rainilaiarivony refuse ce protectorat qu’il appelle protectorat fantôme.
- Le refus du premier ministre provoque une deuxième guerre franco-malgache en 1894-1895. Elle se termine par la défaite malgache et la signature d’un protectorat réel.
- Des révoltes éclatent car la population malgache conteste ce protectorat. Des mouvements de résistance se forment ainsi que des mouvements xénophobes.
- La réaction de la France est immédiate :
- une loi d’annexion est votée,
- le protectorat est aboli et le 6 août 1896 Madagascar devient une colonie française.
B – L’ADMINISTRATION COLONIALE
Face aux différentes révoltes, la France envoie le premier gouverneur général, le général Gallieni, pour contrôler les Malgaches et pour faire régner la paix. Gallieni va mettre en place une administration militaire qui sera remplacée par une administration civile.
1. Administration militaire : la pacification (1896 -1905)
La pacification est la période pendant laquelle le général Gallieni rétablit la paix à Madagascar. Pour cela il utilise différentes méthodes :
- Politique de la terre brûlée : pour obliger la population à se soumettre, on détruit leurs cultures et leurs villages.
- Politique des races : il faut abattre la domination merina de l’époque.
- Politique « diviser pour mieux régner » : il faut séparer les Malgaches pour créer une confusion.
- Politique de la tâche d’huile : pacifier d’abord le centre et seulement après les autres régions pour arriver à tout Madagascar.
Cette pacification s’accompagne d’exécutions des chefs de mouvements de révolte pour terroriser la population. Les postes militaires ont été créés pour mieux contrôler la population.
2. Administration civile
a – Organisation générale
Le Président de la république française est le premier responsable de l’administration coloniale. Il est suivi du ministre des colonies qui s’occupe de l’administration coloniale et désigne les gouverneurs généraux dans les colonies. Ces deux personnalités résident en France.
b – Organisation interne
Les fonctionnaires responsables de l’administration coloniale :
- Le gouverneur général : il a tout les pouvoirs et publie les lois. Il est de nationalité française.
- Le secrétaire général : il est responsable de l’administration civile et politique. Il est également français.
- Le conseil de gouvernement : il est composé de 15 membres dont 13 Français et de 2 Malgaches. Ce Conseil s’occupe de la politique générale du pays.
- Les représentants économiques et financiers formés de 50 membres (25 Français, 25 Malgaches) : ils s’occupent de l’élaboration des lois et de l’aménagement du territoire.
c – Division administrative
- Madagascar est divisée en provinces, dirigées par un chef de province de nationalité française. Il exécute les ordres du gouverneur général.
- Chaque province est divisée en districts dirigés par un chef de district de nationalité française. Il contrôle l’exécution des tâches et il conseille.
- Chaque district comprend des cantons dirigés par un chef de canton de nationalité malgache. Il tient le registre et collecte les impôts. Dans son travail le chef de canton est aidé par le chef de village et le chef local traditionnel. Dans les cantons la population est organisée en fokonolona.
3. Les rôles de l’administration coloniale
Elle représente directement la métropole. Elle assure l’application des lois et la bonne marche des services publics. Elle aide les colons à sauvegarder les intérêts de la France à Madagascar.
C – L’EXPLOITATION COLONIALE
Le principal objectif de la colonisation est l’exploitation économique de Madagascar. Pour réaliser ce but différentes mesures ont été prises par l’administration coloniale :
le code de l’indigénat, le pacte colonial, et les impôts et prestations.
1. Le code de l’indigénat
C’est l’ensemble des règles qui placent les indigènes sous la domination des colons. Le non-respect de ce code expose l’indigène à des punitions très sévères. Les mesures d’ordre social et politique ont été prises. La société coloniale a été divisée en deux classes :
- La classe des dominants constituée par les colons : les Français qui ont tous les pouvoirs administratifs et politiques ainsi que tous les moyens de production.
- La classe des dominés constituée par les Malgaches. Cette classe est elle-même divisée en deux :
- Les citoyens : les Malgaches privilégiés mais minoritaires qui obtiennent quelques avantages mais restent soumis aux Français.
- Les indigènes : la masse populaire malgache soumise au code de l’indigénat. Ils sont comme des objets, des moyens de production français. Ils n’ont aucun droit politique et administratif. Ils doivent payer les impôts et faire des prestations (travail forcé).
2. Le pacte colonial et l’économie de traité
a- Le pacte colonial…
est un système économique qui oblige chaque colonie à ne vendre et à n’acheter qu’à sa métropole. Son objectif est de rendre l’économie de Madagascar dépendante de celle de la France. Il élimine la concurrence des autres pays et il fait de Madagascar une source de matières premières pour l’industrie française et un débouché pour vendre des produits manufacturés. Pour favoriser ce pacte des mesures ont été prises :
- Les transports de produits entre Madagascar et la France se font par l’intermédiaire de grandes compagnies de navigation françaises ; exemples : CLM : Compagnie Lyonnaise de Madagascar, CMM : Compagnie Marseillaise de Madagascar, SICE : Société Industrielle Commerciale de l’Empire.
- Il est interdit de construire des usines à Madagascar pour ne pas concurrencer les usines de la métropole.
- Les produits des autres pays sont taxés à la douane tandis que les produits français entrent librement.
- Madagascar entre dans la zone franc pour faciliter les échanges commerciaux.
- Un réseau bancaire a été créé pour financer les grandes compagnies commerciales ; exemples : la banque de Madagascar et le comptoir d’escompte.
b- L’économie de traité
Pour développer l’économie de traité, la France remplace l’économie d’autosubsistance par l’économie de marché. C’est une politique des colonisateurs qui consiste à acheter les matières premières à bas prix et à revendre les produits finis à prix élevé. Pour assurer le bon fonctionnement de l’économie de traité, les Français adoptent une loi sur le régime foncier et deviennent propriétaires des terres des Malgaches. Ces derniers doivent alors travailler dans les plantations françaises.
3. Les impôts et ses prestations
a- L’impôt
est une somme d’argent que l’on doit payer aux autorités. Pendant la colonisation l’impôt était une source d’argent pour l’administration coloniale. C’est aussi un moyen pour forcer les Malgaches à travailler dans les plantations françaises. L’impôt est un moyen pour éduquer et civiliser les malgaches par le travail. L’impôt permet le contrôle de la population. Les différents types d’impôt sont :
- la capitation,
- l’impôt sur les biens,
- l’impôt ou taxe sur les marchés.
b- Les prestations ce sont des mesures qui obligent les indigènes à faire des travaux gratuits pour l’administration coloniale dans le but de :
- Solutionner les problèmes de main d’œuvre.
- Tout homme malgache de 16 à 60 ans doit faire des travaux obligatoires de 10, 30 et 50 jours dans l’année. Durant cette période les hommes malgaches ont construit des routes, des chemins de fer, des tunnels, des ponts, des écoles, des hôpitaux…
Le but des prestations était aussi de lutter contre le brigandage et le vagabondage. C’était aussi un moyen de répression contre les mouvements de contestation. En 1901 les prestations sont supprimées par Gallieni et en 1926 l’administration coloniale met en place le SMOTIG (Service de la Main d’Oeuvre pour les Travaux d’Intérêt Général). C’est un service militaire obligatoire pour tous les jeunes pendant 3 ans.
4. Le bilan de l’économie malgache sous la colonisation
La colonisation a eu des aspects négatifs et des aspects positifs.
a- Les aspects négatifs
La France n’a pas cherché à développer Madagascar. Son principal objectif était de piller nos richesses :
- Madagascar était devenu un fournisseur de matières premières.
- Madagascar était aussi devenu un marché exclusivement français.
- Vol des terres des Malgaches.
- Déséquilibres régionaux : seules les régions riches sont développées.
b- Les aspects positifs
- Unification de Madagascar sous une seule autorité.
- Développement des transports (routes, chemins de fer…).
- Développement de l’équipement (hôpitaux, bâtiments administratifs).
- Développement du commerce extérieur (économie de marché).
- Utilisation de nouvelles techniques (utilisation d’engrais chimiques, machine).
La légende dorée de Gallieni
« Le général Gallieni gouverne notre colonie de Madagascar. Partout il construit des routes, il ouvre des écoles. » Tel est le commentaire de cette image tirée d’un manuel d’histoire de 1933. Une parfaite illustration de la légende du général Gallieni, celle du colonisateur « civilisateur ».
[L’Histoire, octobre 2005, n° 302 La colonisation en procès]
Pétition de 51 colons français au Gouverneur général de Madagascar, le 13 janvier 19004
«M. le Gouverneur,
«Comme nous tous vous êtes au courant de la mortalité effrayante qui frappe les prestataires5 employés à la construction de la route de Tananarive-Tamatave : elle a atteint dans ces derniers mois une proportion si grande qu’on peut prévoir qu’à brève échéance, la population même la plus valide des hauts plateaux sera tellement réduite que les colons ne pourront bientôt plus rien entreprendre, tant au point de vue du commerce que de l’agriculture et de l’industrie, dans ces régions où ils ont cependant le plus de chance de réussir.
«La question commence à se poser sérieusement de savoir s’il n’est pas préférable de ne pas avoir de routes, mais de conserver une population valide susceptible de mettre Madagascar en valeur, plutôt que de créer de belles pistes carrossables au prix de tant d’existences humaines sacrifiées, dans un pays où la population, si peu dense au moment de la conquête, s’éclaircit tous les jours davantage. Les indigènes sont d’ailleurs tellement las et exténués par des corvées et des travaux incessants, qu’ils déclarent aujourd’hui hautement préférer la mort à toute occupation autre que celle de la culture de leurs champs. […]
«C’est donc avec une fréquence vraiment inquiétante que se multiplient ces actes d’arbitraire dont chaque jour, colons et Malgaches ont à se plaindre. L’indigène est arrêté, emprisonné pendant des mois sans jugement, sans interrogatoire ; et cela avec d’autant moins de ménagements que le détenu est toujours utilisé comme main d’oeuvre économique.»
- Cet article, publié dans Le Monde du 20 septembre 1947, rappelait comment, à la fin du XIXe siècle, le général Gallieni avait soumis Madagascar à l’empire français. La publication de ce texte en septembre 1947, alors que la répression coloniale s’abattait sur Madagascar, témoigne de l’absence d’évolution des autorités françaises depuis l’époque de Gallieni.
L’article a été repris en mai-juin 2006 dans un hors-série du Monde2 intitulé Colonies : un débat français.
- Journal officiel de Madagascar, cité : http://hypo.ge.ch/www/cliotexte//html/colonisation.colonies.6.html.
- Nous avons repris l’intégralité de http://www.transmad.org/articleimp.php3?id_article=133, à l’exception de la dernière partie qui expose la lutte du peuple malgache contre la domination française.
- Source : http://hypo.ge.ch/www/cliotexte//html/colonisation.colonies.3.html.
- Prestataires : indigènes soumis au travail forcé attribués par le gouvernement aux colons français.