Algérie : le musée s’invite
Présent comme à chaque conseil municipal, le collectif «Non au musée de la mairie de Perpignan à la gloire de la colonisation» a fait disjoncter Jean-Marc Pujol, adjoint aux finances et pied-noir revendiqué. Alors qu’il s’apprêtait à faire voter le budget, il s’est adressé aux manifestants leur reprochant de «ne pas avoir la décence d’éviter de venir le jour de la commémoration du massacre de la rue d’Isly». «Vous dévoilez ainsi une attitude négationniste et révisionniste», s’est-il emporté suscitant une houleuse et véhémente riposte.
«Vous débattez avec des manifestants qui n’ont pas la parole alors qu’ils ne vous demandent que de revoir votre position», s’est insurgée Colette Tignères à son endroit. Car il faut savoir que lorsqu’un conseil municipal est réuni en séance publique, le public, justement, n’a pas le droit à la parole. Elle reste aux élus représentatifs du peuple et non à une partie du peuple. Jean-Paul Alduy ayant un temps menacé de faire évacuer la salle, le calme est finalement revenu quand il a accepté de prendre rendez-vous avec le Collectif.
La mairie de Perpignan aux abois
Lundi, alors que la séance du conseil municipal se déroulait depuis une heure, le maire et sa garde rapprochée ont tenté d’empêcher les opposants au projet de musée « à la gloire de la colonisation » d’occuper les bancs réservés au public.
Ils étaient une bonne cinquantaine à s’être présentés devant la salle Arago et ils ont trouvé porte close. Dénonçant cet acte illégal, puis acceptant de ne pas se couvrir le visage de leurs masques blancs, ils pouvaient enfin s’installer en silence comme à chaque conseil municipal dressant à bout de bras leurs pancartes « non à ce musée ». Les choses auraient pu en rester là, si Jean-Marc Pujol, à la surprise générale, ne s’était aventuré à lire un texte les accusant de « négationnisme et de révisionnisme » : tollé général, vives altercations, un maire au bord de la crise de nerf menaçant de faire évacuer la salle.
Après un temps de flottement, il tentait avec sa mauvaise foi coutumière d’amoindrir les propos insultants de son adjoint : « Nous sommes ouverts à une présentation pluraliste de la présence française en Algérie, nous sommes disposés à associer des historiens », puis, pour ne pas perdre ses bonnes habitudes, dans le registre de la provocation montrant du doigt le public : « contrairement à vous, nous sommes des démocrates ».
Il était alors interrompu par Colette Tignères : « piètre conception de la démocratie qui consiste à s’adresser à des personnes à qui vous ne donnez pas la parole et qui vous demandent de revoir votre position ». A la suite de quelques autres passes d’armes relayées par les élus de l’opposition, en particulier par Claude Cansouline, Jean-Paul Alduy voulant se donner le beau rôle, acceptait de recevoir dans les prochains jours une délégation du collectif « non au musée de la mairie de Perpignan à la gloire de la colonisation ». En quittant bruyamment la salle, les manifestants savaient qu’ils avaient gagné une première manche.
Ils se sont donnés rendez-vous pour le prochain conseil municipal, avec en tête la sentence du poète : « A la septième fois, les murailles tombèrent »
L’Algérie française méconnue
L’Algérie Française se rappelle des routes, des villes, des ports et des écoles, que de belles réalisations vitales pour tout un chacun, mais d’abord pour soi même – ne l’oublions pas !!! Qu’elle se rappelle aussi que plusieurs de ces chantiers furent réalisés par des forçats, ces fameux prisonniers de droit commun déportés sur ses terres. Oui ! Cette Algérie française, leur doit beaucoup, comme elle est redevable envers ces émigrants alsaciens, puis ces Italiens et Espagnols fuyant fascisme et franquisme, et devenus français par la force de l’histoire.
Avant leur arrivée, il y vivait des juifs, mêlés aux musulmans et aux chrétiens, Maltais, Grecs, Espagnols, Turcs et Berbères. Ils se partageaient ses villes mais, en 1870, le décret Crémieux fait disparaître à tout jamais les juifs de l’histoire algérienne en les naturalisant français ; un autre décret Blum-Violette, naturalisera français tout indigène qui répudiera la religion musulmane, deux décrets qui ont provoqué les premières réactions religieuses et antisémites. C’est la loi Warnier de 1873, sur le déplacement et le cantonnement des tribus.
L’Algérie Française, c’est cette lettre écrite en 1865 par Napoléon III adressée au Gouverneur Général Mac Mahon dénonçant le traitement fait aux Arabes en leur infligeant des impôts pour cultiver leurs propres terres, ces terres gérées jusqu’alors par des tribus ancestrales spoliées et vendues à des aventuriers qui devinrent vite de gros propriétaires terriens.
L’histoire de l’Algérie Française, ce sont les épidémies de 1849–1851, ce sont aussi les famines de 1870 et 1948, les massacres de 1830 et ce sont les révoltes de 1870 qui seront suivis de la déportation des chefs kabyles en Guyane.
C’est aussi les reportages d’Albert Camus publiés dans les années 1940 et dans lesquels il dénonce la famine en Kabylie.
Oui, nous pourrions en parler des heures de cette fameuse Algérie Française et raviver ainsi des faits et des événements qui blessent certains et en contentent d’autres. Alors de grâce laissons donc l’Algérie aux Algériens et posons-nous ces questions qui éclaireraient bien des lanternes : Qu’est-ce qu’un Pied-noir ? Qui est-il vraiment ? Quelles sont ses origines ? D’où vient-il ? Peut-on faire la différence entre un colon et un Pied-noir ? Et puis que sont devenus les juifs algériens ?