La Françafrique
Après la nomination, le 18 février 2007, de Bernard Kouchner au poste de ministre des affaires étrangères, la lecture de ce texte de Rony Brauman [*]
rappelle que, remplaçant le vieux discours colonial sur la “ mission civilisatrice ”, le “ droit d’ingérence humanitaire ” est souvent été invoqué de nos jours pour justifier les interventions militaires occidentales.
Dès sa prise de fonction, Bernard Kouchner, qui se bat depuis des années pour la reconnaissance de ce droit d’ingérence, a manifesté que le dossier Darfour est une de ses priorités ...
Le Congo se prépare à célébrer le rapatriement des restes de son père fondateur, Pierre Savorgnan de Brazza. Un mausolée est en cours d’édification sur les rives du fleuve Congo.
Cet article fait suite aux deux pages suivantes de ce site : Pierre Savorgnan de Brazza (1852 - 1905) et Brazza dérangerait-il encore ?.
Du 6 au 8 septembre 2006, Faure Gnassingbé, le président mis en place à l’issue d’un massacre et d’élections truquées sera en France. Cette visite intervient au terme d’un véritable coup d’état institutionnel, électoral et militaire qui a fait plus de 800 morts et déplacé des dizaines de milliers de réfugiés. Une situation cautionnée par les autorités françaises.
Vous trouverez ci-dessous un communiqué commun du 14 juin dernier signé notamment par la LDH et la FIDH, suivi de l’intervention de Noël Mamère au colloque organisé par la LDH, le 9 avril 2005, dans les locaux de l’Assemblée nationale.
Le Président Jacques Chirac organise son dernier sommet France-Afrique.
Après qu’Hervé Liffran ait rappelé quelques précédents, Philippe Bernard montre que le scandale de l’Arche de Zoé illustre jusqu’à la caricature la vision de l’Afrique qui continue à imprégner la société française.
Vue de Paris, la crise tchadienne, c’est finalement assez simple. De féroces rebelles, armés par une dictature islamiste étrangère, tentent de renverser un pouvoir élu. Des soldats français défendent nos compatriotes, sans prendre part aux combats, et contribuent au retour de la paix. Happy end : les rebelles fuient, la force européenne va pouvoir s’installer et protéger les réfugiés dans l’Est tchadien, les zozos de l’Arche de Zoé seront bientôt graciés, et le président Déby peut compter sur l’« amitié » (sic) du président Sarkozy.
Bilan : Idriss Déby poursuit son règne. Il rêve d’une présidence à vie. L’économie – désormais pétrolière – est toujours classée 173e sur 177, selon l’ONU. L’illettrisme reste massif et l’espérance de vie inférieure à 45 ans. Sarkozy a bien raison de dénoncer la « Françafrique » et le fatalisme de l’Africain « qui jamais ne s’élance vers l’avenir ».
Après cette synthèse inspirée d’un commentaire du Canard enchaîné, voici trois articles du Monde, tous publiés le 13 février 2008.
En juin dernier, le CCFD-Terre Solidaire (Comité catholique contre la faim et pour le développement) a rendu public un nouveau rapport consacré aux avoirs détournés par certains chefs d’Etat africains. L’association, créée pour travailler sur les causes de la pauvreté et des inégalités et pour dégager des voies de développement, s’était précédemment penchée sur les cas des présidents Omar Bongo, Denis Sassou Nguesso et Teodoro Obiang Nguema (Guinée équatoriale). Le nouveau rapport intitulé « Biens mal acquis, à qui profite le crime ? » aborde notamment le patrimoine et l’enrichissement du président camerounais Paul Biya et de ses proches.
Vous trouverez ci-dessous la transcription de l’intégralité du chapitre de ce rapport consacré au Cameroun [1]. Un document que les vacances fastueuses du couple présidentiel camerounais à La Baule illustrent de façon scandaleuse (43 chambres ont été réquisitionnées dans deux hôtels de luxe de La Baule, au prix de 42 000 € par nuit [2]).
En janvier 2009, un rapport d’Amnesty International [3] avait rappelé que « L’opposition politique n’est pas tolérée au Cameroun. Toute dissidence est étouffée soit par la violence, soit par le détournement de la justice pour réduire les personnes qui émettent des critiques au silence. »
La France, oubliant qu’on ne peut être en même temps l’ami des démocrates et celui des dictateurs [4], aurait renouvelé son aide au Cameroun en confirmant le versement de 537 millions d’euros sur cinq ans pour le désendettement et le développement du pays [5].
La France va commémorer cette année le cinquantenaire de l’accession à l’indépendance en 1960 de quatorze pays francophones d’Afrique (Bénin, Burkina Faso, Cameroun, Centrafrique, Congo-Brazzaville, Côte d’Ivoire, Gabon, Madagascar, Mali, Mauritanie, Niger, Sénégal, Tchad et Togo) [6].
Les dirigeants de ces pays seront notamment conviés à un sommet « familial » qui se déroulera le 13 juillet. Le lendemain, en hommage à la “Force noire”, des troupes africaines participeront au défilé du 14-Juillet sur les Champs-Élysées. Mais Nicolas Sarkozy n’honorera aucune des invitations qui lui ont été faites d’assister aux cérémonies de commémoration.
Un cinquantenaire qui se déroule dans une ambiance où le malaise le dispute à l’indifférence...
En fait, comme le demande Achille Mbembé, « y a-t-il vraiment quoi que ce soit à commémorer ? ».
Douze chefs d’État africains [7] seront présents le 14 juillet à Paris pour célébrer, à la fois, la fête nationale et le cinquantième anniversaire des indépendances... ( y a-t-il vraiment quoi que ce soit à commémorer ? )
Dans une lettre ouverte adressée à Nicolas Sarkozy, et après avoir rappelé leur critique du projet de loi d’intégration en droit français des dispositions du statut de la Cour pénale internationale (CPI), la FIDH et la LDH s’inquiètent de la présence éventuelle au sein des délégations officielles de personnes accusées de graves violations des droits de l’Homme.
Les 50 ans des indépendances africaines ont été marqués par l’invitation de troupes africaines au défilé du 14 juillet, ce qui a suscité à la fois l’enthousiasme et la critique.
Pierre Boilley, professeur (Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne), directeur du Centre d’études des mondes africains (CEMAf), propose un décryptage des paradoxes liés à la célébration, par la France, de cet anniversaire.
Un article publié dans le N° 151, juillet-août-septembre 2010, de la revue Hommes & Libertés de la LDH.
Pour la sixième année consécutive, la Semaine anticoloniale va se dérouler à Paris (20e). Cette semaine se veut à la fois forum de discussion et moment d’initiatives concrètes, politiques et culturelles. Elle vise à fédérer tous ceux pour qui l’anticolonialisme n’est pas seulement une commémoration de quelques grands événements mais également l’expression vivante des luttes d’aujourd’hui et de demain.
Les événements historiques qui se développent de l’autre côté de la Méditerranée donnent une coloration toute particulière à cette sixième semaine anticoloniale. Et les organisateurs feront du 26 février, point d’orgue de la semaine, une manifestation de solidarité avec les peuples de cette région et une dénonciation de la politique étrangère du gouvernement.
Le programme de la semaine comporte en particulier la désignation des lauréats du prix du “colonialiste de l’année” et du prix “Françafrique”. Tout le monde peut voter (cliquer). Les résultats seront proclamés, samedi 19 février, lors du « Salon anticolonial », à la Bellevilloise (19-21 rue Boyer, 75020 Paris, métro Gambetta). Le lauréat se verra remettre le « casque colonial » (le programme).
La Ligue des droits de l’Homme rappelle qu’« aucune réconciliation, aucun retour à la paix civile n’est possible [en Côte d’Ivoire] sans qu’un processus d’établissement des faits, de recherche des responsabilités et de jugement des coupables soit rapidement enclenché dans des conditions d’impartialité incontestables. »
Lire également le communiqué de la FIDH.
Après les indépendances, la France signe une vingtaine d’accords de défense et de coopération avec ses anciennes colonies africaines. En vertu de ses accords, ou afin de venir en aide à ses ressortissants, l’armée française est intervenue à près de quarante reprises sur le sol africain en l’espace d’un demi-siècle. Certaines opérations françaises n’ont duré que quelques jours, d’autres ont donné lieu à des déploiements beaucoup plus longs. Une présence militaire, et des « coups de force », devenus des symboles d’une certaine « France-Afrique en kaki », sur lesquels le président Sarkozy dit vouloir tourner la page.
Cet article a été écrit par Olivier Fourt pour l’Anniversaire des indépendances africaines et publié le 14 juillet2010, sur le site RFI [8]. Source : Que fait l’armée française en Afrique ? Raphael Granvaud aux éditions Agone.
Cinq organisations (ACAT France, CCFD-Terre Solidaire, Defap (service protestant de mission), LDH, CGT) ont appelé mercredi « à l’arrêt des exactions » en Côte d’Ivoire. « Bien que la situation sécuritaire se soit nettement améliorée en Côte d’Ivoire, des civils continuent d’être victimes d’exactions commises par des hommes en armes dans plusieurs régions du pays », dénoncent ces organisations dans un communiqué commun.
« Nombre de ces exactions sont perpétrées par des hommes se réclamant des Forces Républicaines de Côte d`Ivoire (FRCI) » d`Alassane Ouattara, affirment-elles. « Ces exactions doivent cesser, la sécurité doit à nouveau être assurée pour tous (...) sans distinction », insistent-elles, demandant à ce que la lumière soit « faite sur ces exactions ».
Elles demandent que les autorités ivoiriennes permettent « à la Cour pénale internationale (CPI) d`enquêter sur les exactions commises depuis septembre 2002 », et mènent « des enquêtes judiciaires indépendantes, exhaustives et impartiales sur toutes les allégations d`atteintes aux droits de l`homme recensées depuis le début de la crise ivoirienne ».
Deux responsables religieux du Centrafrique, un catholique et un musulman, lancent un message de paix et de réconciliation, appelant à l’intervention d’une force internationale pour apaiser les esprits.
En 1899, l’écrivain Joseph Conrad avait écrit Au cœur des ténèbres. Une histoire africaine se déroulant sur le fleuve Congo qui est devenue un succès mondial et la source d’inspiration de nombreux cinéastes. Lui, son inspiration, il l’avait puisée dans un livre écrit dix ans auparavant, en 1888, par Rudyard Kipling : L’Homme qui voulut être roi.
Faut-il voir dans l’actualité les séquelles lointaines des épopées coloniales ?
« Il faudra un jour tirer les leçons du désastre absolu que représente la Centrafrique et se demander s’il fut bien raisonnable, au nom des politiques d’ajustement structurel, d’empêcher les Etats africains de se doter d’armées et d’administrations fonctionnelles et de fermer les yeux sur la corruption des régimes » écrit Colette Braeckman, avant de poursuivre sur son carnet : « Mais avant le temps des regrets, il faut passer à l’action : arrêter les massacres, sortir les Français de leur isolement, faire jouer la solidarité européenne. Car Bangui aujourd’hui, cela pourrait être demain Brazzaville, Abidjan, Yaoundé sinon Kinshasa… » [9]
Nous reprenons deux billets du carnet de Colette Braeckman, suivis d’un entretien avec l’écrivaine et femme politique malienne Aminata Traoré qui, un an après le début de l’opération Serval, réagit aux interventions françaises au Mali et en Centrafrique...
Selon Amnesty International, les soldats de la force internationale de maintien de la paix sont impuissants face au nettoyage ethnique qui se trame dans l’ouest du pays. Les civils musulmans, accusés d’être complices des rebelles de la Séléka, sont les cibles des anti-balaka. L’ONG constate un exode musulman « sans précédent ». Les Centrafricains de confession musulmane, qui composent 15% de la population – contre 50% pour les chrétiens –, fuient notamment vers le Tchad ou le Cameroun.
Deux jours après l’hommage rendu sur les Champs Elysées à l’implication des troupes coloniales dans la Grande Guerre, François Hollande s’est envolé pour une tournée en Afrique qui l’a mené successivement à Abidjan, Niamey et N’Djamena. Pour l’association Survie qui dénonce les dérives de la Françafrique, ce voyage, initialement axé sur les intérêts économiques en Côte d’Ivoire, consacre finalement l’ingérence militaire française au Sahel, incarnée par la nouvelle opération « Barkhane ».

suscite un débat
La commission sur les archives françaises relatives au Rwanda et au génocide des Tutsi, présidée par l’historien Vincent Duclert, a été installée en avril 2019 par Emmanuel Macron « pour un approfondissement de notre connaissance et de notre compréhension de cette entreprise terrifiante de destruction humaine » et pour « faire toute la lumière » sur le rôle de la France. Avant son rapport final qui doit intervenir en avril 2021, elle a remis une note intermédiaire le 5 avril 2020 (en lien ci-dessous). Nous publions la réaction de l’association Survie, un article paru dans Le Monde en avril 2019 sur l’absence dans cette commission des historiens Hélène Dumas (CNRS) et Stéphane Audouin-Rouzeau (EHESS) et l’émission La grande H où ces deux universitaires s’expriment sur la composition de la commission et pourquoi ils en ont été écartés.

Au terme d’une longue bataille administrative, le Conseil d’État vient d’accorder l’ouverture des archives de l’Élysée sur le Rwanda au chercheur François Graner, membre de l’association Survie, co-auteur du livre, L’État français et le génocide des Tutsis au Rwanda. Il a estimé que ses demandes présentent « un intérêt légitime au regard de la liberté de recevoir et de communiquer des informations et des idées pour nourrir les recherches historiques et le débat sur une question d’intérêt public ». Le chercheur demandait à accéder notamment aux documents de Bruno Delaye, Hubert Védrine et Dominique Pin. Cette décision créée une jurisprudence, elle pose un point général de droit qui dépasse son cas et va s’imposer pour les demandes futures sur d’autres sujets.

sur la construction de la Françafrique,
par François Gèze
L’Empire qui ne veut pas mourir. Une histoire de la Françafrique : ce livre collectif monumental a été dirigé par Thomas Borrel, Amzat Boukari-Yabara, Benoît Collombat et Thomas Deltombe. Publié en octobre 2021 par les éditions du Seuil, il propose au grand public une vision passionnante de l’histoire coloniale et postcoloniale de la France en Afrique, extrêmement bien documentée. Il montre en particulier comment Jacques Foccart, secrétaire général aux affaires africaines et malgaches de 1960 à 1974, a exercé la mission reçue de De Gaulle d’« assurer, en Afrique subsaharienne, une transition vers des “indépendances” favorables aux intérêts français ». De ce livre qui marque un saut d’envergure dans nos connaissances de ce passé trop méconnu et des traces profondes qui en subsistent aujourd’hui, François Gèze propose ici une recension détaillée.

par Khadim Ndiaye
En marge du 38e Sommet de la francophonie à Djerba, Tunisie, les 19 et 20 novembre 2022, Emmanuel Macron a déclaré que le français était « la vraie langue universelle du continent africain ». Il eut aussi cette autre phrase étonnante : « La francophonie, c’est la langue du panafricanisme ». Après la revue Afrique XXI, nous publions ici un chapitre de l’ouvrage collectif L’Empire qui ne veut pas mourir. Une histoire de la Françafrique (2021), déjà présenté sur notre site. L’historien Khadim Ndiaye y raconte l’histoire d’une francophonie dont De Gaulle prévoyait qu’elle serait « le relais de la colonisation » et qui est effectivement conçue, depuis le lendemain des indépendances, comme l’élément clé d’un soft power néocolonial français en Afrique.